Projet de décret fixant les règles et procédures applicables à la destruction de haies
Consultation du 25/11/2025 au 16/12/2025 - 12022 contributions
Ce projet de décret est pris en application de la loi n°2025-268 du 24 mars 2025 d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations futures (dite loi « OSARGA »). L’article 37 de cette loi a introduit dans le code de l’environnement un dispositif de protection et de gestion durable des haies codifié aux articles L. 412-21 à L. 412-27.
Afin de renforcer la préservation des haies et de maintenir le linéaire planté, l’objectif de ce dispositif est de simplifier et unifier les procédures administratives applicables aux projets de destruction de haies, en créant une déclaration unique préalable (ou, le cas échéant, une autorisation unique), avec une compensation systématique et au moins équivalente.
Commentaires
C’est une démarche ecocide et irresponsable. Il faut préserver les habitant.e.s de ces haies !
Problème : une nouvelle haie mettra beaucoup de temps avant de fournir les mêmes fonctionnalités écologiques qu’une vieille haie détruite. Un décalage « qui entraînera pendant ce délai le déclin irréversible des espèces dépendant des haies détruites », note le CNPN.
« Une haie qu’on replante mettra potentiellement plusieurs dizaines d’années à retrouver le rôle qu’avaient les anciennes haies »
’obsession pour la « simplification » n’aide pas toujours à gérer intelligemment un sujet complexe. À commencer par les définitions trop floues dans le texte : qu’est-ce qu’une « destruction de haie » ? À partir de combien de linéaire détruit ? Ou si l’on coupe, par exemple, à 5 mètres de haut ? À partir de quand une « pratique usuelle locale » d’entretien est considérée comme destructive ? Autant d’incertitudes que devront trancher les arrêtés préfectoraux.
Ce projet c’est NON
Voici mes commentaires sur le projet actuel du projet de décret relatif à la protection des haies
1. Un principe louable, mais une mise en œuvre préoccupante
Le guichet unique constitue une avancée en matière de simplification administrative. Toutefois, sous couvert de simplification, le projet de décret affaiblit considérablement les règles de protection des haies, ce qui est inacceptable au regard des enjeux écologiques.
2. Une priorité mal orientée : la préservation doit primer
La conservation des haies existantes doit être l’objectif central. Or, le texte se concentre sur la compensation, reléguant au second plan les étapes essentielles « Éviter » et « Réduire ». Cette approche contrevient à la logique même de la séquence ERC et compromet la lutte contre la destruction des haies.
3. Compensation : un coefficient dérisoire
Le ratio minimal de 1 pour 1 est insuffisant et scientifiquement injustifiable. Une jeune haie ne compensera jamais les fonctions écologiques d’une haie ancienne avant plusieurs décennies. Le CNPN préconise un coefficient d’au moins **3,5**, ce qui doit être intégré sans délai pour garantir une réelle équivalence écologique.
4. Un régime déclaratif inadapté et dangereux
Le projet privilégie la déclaration au détriment de l’autorisation, réduisant le contrôle effectif des destructions. Les critères de bascule vers le régime d’autorisation sont lacunaires et reposent sur des évaluations informatiques, sans analyse de terrain. Cette automatisation excessive ouvre la voie à des dérives.
5. Des périodes d’interdiction insuffisantes et non conformes aux enjeux biodiversité
Limiter les interventions à la seule période de nidification des oiseaux est une erreur. Les haies abritent également des chiroptères, reptiles, amphibiens et insectes. La durée actuelle (21 semaines) est déjà insuffisante pour l’avifaune, alors que la LPO recommande une interdiction du **16 mars au 31 août**. Cette période doit être étendue et s’appliquer à toute intervention, en particulier les destructions.
6. Une territorialisation excessive et des exigences minimales à renforcer
Le projet confère une large marge d’appréciation aux préfets, créant un risque d’inégalités territoriales. Des standards nationaux doivent être imposés : coefficients de compensation, périodes d’interdiction, définition des pratiques usuelles. Sans cadre commun, la protection des haies sera fragmentée et inefficace.
7. Des outils inexistants et une automatisation illusoire
Le dispositif repose sur des outils non disponibles (typologie des haies, guide méthodologique) et sur une logique d’automatisation. Or, seule une expertise de terrain, menée par des conseillers formés, peut garantir une évaluation fiable des impacts.
8. Avis défavorable du CNPN : un signal fort
Le Conseil national de la protection de la nature a émis un avis défavorable, confirmant la gravité des lacunes du projet. Cet avis doit être pris en compte pour revoir en profondeur le texte.
Les chiffres de la destruction des haies en France sont alarmants : 70 % ont disparu depuis 1950, et 23 500 km continuent d’être perdus chaque année depuis 2017. Les haies jouent pourtant un rôle crucial pour le climat, les sols, l’eau et la biodiversité :
Stockage de carbone et régulation climatique
Lutte contre les sécheresses, l’érosion des sols et les inondations
Refuge pour la biodiversité
Valeur patrimoniale, naturelle et culturelle des paysages
Le projet de décret, en facilitant la destruction des haies, va à l’encontre de leur protection et constitue donc un recul environnemental majeur.
1. Risque d’encouragement à la destruction
La création d’un guichet unique pour les demandes de destruction risque de simplifier les démarches de suppression de haies. L’absence de réponse dans le délai de deux mois étant considérée comme une acceptation tacite, il existe un réel risque d’autorisation automatique, surtout si les services compétents sont surchargés.
2. Définition insuffisante des haies
Le décret exclut de sa définition les « trouées » supérieures à 5 mètres, bien que ces espaces soient constitués de végétation utile (ronces, buissons, jeunes arbres…). Ces portions échappent ainsi à toute protection et peuvent être détruites sans autorisation, réduisant artificiellement le linéaire protégé.
3. Limites de la compensation
Le décret met l’accent sur la replantation pour compenser les destructions, mais cela pose plusieurs problèmes :
La compensation est la dernière étape de la séquence ERC (Éviter – Réduire – Compenser), alors que l’étape principale – éviter la destruction – est négligée.
Une haie nouvellement plantée mettra des années à atteindre la fonctionnalité écologique d’une haie existante.
Le programme Breizh Bocage montre que 23 % des haies plantées disparaissent dans les 10 ans, malgré un suivi volontaire de 3 ans, ce qui illustre le risque d’échec élevé pour les plantations de compensation.
Conclusion
La priorité doit être la protection des haies existantes, non la facilitation de leur destruction. Par conséquent, Agir pour l’environnement exprime un avis défavorable à la publication de ce décret.