Projet de décret relatif à l’encadrement de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les sites NATURA 2000
Consultation du 16/05/2022 au 05/06/2022 - 355 contributions
Contexte :
les sites NATURA 2000 sont des zones de protection et de conservation des habitats naturels et des populations des espèces de faune et de flore sauvages protégées, créées par l’Union Européenne. En France, elles permettent de mobiliser les acteurs d’un territoire sur la définition de règles communes permettant de protéger la biodiversité.
Dans sa décision du 15 novembre 2021, le Conseil d’Etat a jugé que les dispositions réglementaires en vigueur ne permettaient pas de garantir que l’utilisation des pesticides soit restreinte ou interdite conformément à l’article 12 de la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. Il a ainsi enjoint au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour les sites terrestres NATURA 2000.
Le réseau français NATURA 2000 comporte 1756 sites terrestres et marins, représentant une surface terrestre de 7 millions d’ha au total. La superficie agricole utilisée (SAU) dans les sites NATURA 2000 est de l’ordre de 3 millions d’ha soit environ 10% de la SAU nationale, dont la moitié environ est en prairie permanente, avec donc peu ou pas d’usage de produits phytosanitaires.
La gestion des sites NATURA 2000 repose sur des orientations définies par des documents d’objectifs (DOCOB), avec une gouvernance impliquant les acteurs du territoire et sur des mesures de protection de la faune et de la flore adaptées aux situations locales, prises essentiellement dans le cadre de contrats et chartes élaborés localement.
Les mesures de réduction ou d’arrêt volontaires d’utilisation des produits phytopharmaceutiques peuvent par exemple se formaliser par des contrats d’aides à la conversion à l’agriculture biologique ou par certaines mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) s’adaptant ainsi aux enjeux du site concerné.
Objectifs du texte :
Objectifs du texte :
afin de mettre en œuvre la décision du Conseil d’Etat et de garantir l’application systématique de l’article 12 de la Directive européenne n°2009/128, le dispositif prévoit que les préfets organisent pour chaque site les concertations nécessaires à l’évaluation de la mise en œuvre des objectifs fixés par l’article 12 de la directive. Une instruction leur sera adressée en ce sens au terme de la présente consultation du public.
A l’issue des concertations menées au niveau départemental, qui permettront le cas échéant de faire évoluer au besoin les documents d’objectifs, chartes ou contrats, les préfets, en l’absence de mesures prises sur une base volontaire, encadreront par voie réglementaire l’utilisation des produits phytopharmaceutique dans les sites concernés, en lien avec les Régions. Cet encadrement devra intervenir dans un délai de 6 mois à compter de la publication du décret, pouvant être porté à 12 mois dans des circonstances particulières.
C’est pourquoi le projet de décret mis en consultation du public habilite le préfet à réglementer l’utilisation des produits phytopharmaceutique dans un site NATURA 2000 lorsque celle-ci n’est pas prise en compte dans les contrats et chartes, compte tenu des objectifs de conservation ou de restauration des habitats naturels et des espèces définis dans le DOCOB.
Le dispositif instauré par le projet de décret faisant l’objet de la présente consultation garantit l’application systématique des exigences posées par l’article 12 de la directive du 21 octobre 2009 tout en préservant le modèle contractuel de gestion des sites NATURA 2000 qui reste l’approche privilégiée dans la gestion de ces sites.
Celui-ci permet de définir de manière concertée au niveau local les mesures pertinentes à mettre en œuvre sur chaque site, en fonction des objectifs de protection et de conservation des habitats naturels et des populations des espèces de faune et de flore sauvages qui y sont définis.
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Commentaires
"veiller à ce que
l’utilisation de produits phytopharmaceutiques soit restreinte ou interdite dans les sites Natura 2000" , c’est bien ce que nous demande la directive européenne. Et s’il est nécessaire de rappeler cet objectif, c’est bien parce que les dispositifs actuels fondés sur les chartes et contrats ont montré leurs limites.
Le gouvernement français a ignoré la transposition de la directive pendant des années. Et maintenant qu’il y est contraint, on voit bien que les trois ministres signataires font tout pour assurer l’inefficacité de leur décret :
- Remplacement du terme « restreindre l’utilisation » des pesticides par le terme creux de « encadrer l’utilisation » ; des pesticides encadrés seront-ils moins nocifs ?
- Défausse sur les préfets de la responsabilité de règlementer.
- Absence totale de dispositif d’évaluation des résultats.
- Non recours à la règlementation conditionné seulement par la « prise en compte » du problème dans des chartes ou contrats.
Tous les acteurs des sites Natura 2000 travaillent dans la concertation, et n’ont sans doute pas besoin qu’un décret le leur redise. Mais ce qu’il faut cadrer c’est bien cette concertation, ses objectifs, ses limites et ses moyens, tout ce que ne fait pas ce décret.
Un décret pour que rien ne change ?
La dernière expertise de l’INRAe (ESCO) portant sur les effets néfastes des pesticides sur la biodiversité et les écosystèmes est sans appel !
Il faut agir pour préserver les milieux fragiles et naturels des effets néfastes des pesticides.
Ne pas interdire ces substances toxiques dans ces zones d’intérêt écologique que sont les zones NATURA 2000 est une aberration !
En outre, laisser dans les mains des seuls préfets l’encadrement ou l’interdiction de ces substances est problématique.
L’expérience montre que ces derniers sont trop souvent soumis aux fortes pressions des acteurs économiques.
Leur mission principale étant avant tout de développer l’économie du territoire, et non de protéger l’environnement, comment imaginer qu’ils s’opposeront fermement aux attentes de certains représentants de l’agrochimie?
Nous demandons donc d’amender le Décret en intégrant :
1. l’interdiction totale des pesticides de synthèse dans toutes les zones NATURA 2000 terrestres. Cela ne semble pas insurmontable puisque d’après les données figurant sur le site de la consultation, "le réseau français NATURA 2000 comporte 1756 sites terrestres et marins, représentant une surface terrestre de 7 millions d’ha au total. La superficie agricole utilisée (SAU) dans les sites NATURA 2000 est de l’ordre de 3 millions d’ha soit environ 10% de la SAU nationale, dont la moitié environ est en prairie permanente, avec donc peu ou pas d’usage de produits phytosanitaires."
2. des mesures fortes de prévention dans les zones maritimes NATURA 2000 qui pourraient être concernées par des effluents d’intrants agro-chimiques
3. un système de gouvernance collégiale avec des représentants équitables des différents collèges coprésidés par les représentants des associations de défense de l’environnement, du ministère de la Transition Ecologique, du ministère de l’Agriculture et des syndicats agricoles.
Restreindre ou interdire l’usage des produits phytosanitaires ans les zones natura 2000 : c’est bien le texte de la directive européenne qu’il s’agit ici de transposer. Et s’il est nécessaire de rappeler cet objectif, c’est bien aussi parce que les dispositifs actuels de chartes et de contrats ne suffit pas à assurer que l’objectif soit atteint.
Après avoir si longtemps négligé de transposer la directive, l’arrêté des deux ministres se donne tous les moyens pour assurer l’inefficacité de sa transposition :
- éclatement de la responsabilité au niveau des départements
- absence totale de critères de résultats
- conditionnement des procédures de règlementation à la seule "prise en compte" de la question dans des textes (chartes et contrats)
- substitution des termes "encadrer l’utilisation des phytosanitaires" aux termes "restreindre l’udage". Des phytosanitaires "encadrés" seront ils moins nocifs?
Oui la logique de la concertation est nécessaire dans les zones natura 2000, et ce n’est pas le rôle des ministres de la mener.
Mais leur rôle est bien de règlementer pour encadrer cette concertation.
Un arrêté pour que rien ne change?
L’étude de veille concurrentielle 2020 réalisée par France Agrimer pour la filière française de pommes démontre son déficit flagrant de compétitivité. Les exigences phytosanitaires nationales y sont clairement identifiées comme le facteur principal qui dégrade la compétitivité.
Ce projet de décret si il venait à se concrétiser ne ferait qu’aggraver encore plus une situation qui met déjà en danger une grande partie de nos vergers.
Pourtant, la production de pommes françaises est agréée à 70% Vergers écoresponsables qui détient la Certification Environnementale de niveau 2 depuis 2013, et plus de 60% des exploitations françaises sont certifiées HVE.
Nous utilisons de façon raisonnée des produits phytosanitaires qui font l’objet d’autorisations et d’homologations d’organismes européens et français. Nous respectons à la lettre les diverses conditions d’emploi.
Les pouvoirs publics prônent la souveraineté et la sécurité alimentaires, mais les mesures décourageant les producteurs français s’ajoutent les unes aux autres pour entraîner dans certains cas la mort des vergers. Pour chaque hectare qui disparaît faute de pouvoir être correctement mis en production, ce sont en moyenne 35 tonnes de pommes, aliment métropolitain par excellence, à haute valeur santé, qui ne finiront plus dans les assiettes des Français et que nous importerons de pays où les contraintes sont sans commune mesure avec les nôtres.
Pour toutes ces raisons, je suis opposé à la mise en place de ce décret qui ne vise qu’à satisfaire des attentes réglementaires au mépris des réalités économiques, sociales et environnementales.
Par cette mesure mon exploitation se trouverait amputée de 1,7ha de jeunes vergers de pommiers, sera t-elle assortie d’une indemnisation intégrale des pertes d’exploitation pour la totalité de la carrière professionnelle, quant est-il des emplois qui seraient également impactés?
Vous pouvez copier/coller ce texte :
L’étude de veille concurrentielle 2020 réalisée par France Agrimer pour la filière française de pommes démontre son déficit flagrant de compétitivité. Les exigences phytosanitaires nationales y sont clairement identifiées comme le facteur principal qui dégrade la compétitivité.
Ce projet de décret si il venait à se concrétiser ne ferait qu’aggraver encore plus une situation qui met déjà en danger une grande partie de nos vergers.
Pourtant, la production de pommes françaises est agréée à 70% Vergers écoresponsables qui détient la Certification Environnementale de niveau 2 depuis 2013, et plus de 60% des exploitations françaises sont certifiées HVE.
Nous utilisons de façon raisonnée des produits phytosanitaires qui font l’objet d’autorisations et d’homologations d’organismes européens et français. Nous respectons à la lettre les diverses conditions d’emploi.
Les pouvoirs publics prônent la souveraineté et la sécurité alimentaires, mais les mesures décourageant les producteurs français s’ajoutent les unes aux autres pour entraîner dans certains cas la mort des vergers. Pour chaque hectare qui disparaît faute de pouvoir être correctement mis en production, ce sont en moyenne 35 tonnes de pommes, aliment métropolitain par excellence, à haute valeur santé, qui ne finiront plus dans les assiettes des Français et que nous importerons de pays où les contraintes sont sans commune mesure avec les nôtres.
Pour toutes ces raisons, je suis opposé à la mise en place de ce décret qui ne vise qu’à satisfaire des attentes réglementaires au mépris des réalités économiques, sociales et environnementales.
Préambule :
La biodiversité, indispensable pour les services écosystémiques et la lutte contre le réchauffement climatique ne sera pas sauvée par des discours mais par des actes.
Le nouveau gouvernement va-t-il enfin relancer d’urgence son application pour réellement lutter contre l’effondrement de cette biodiversité?
La directive européenne Habitats-Faune-Flore qui fête cette année ses 30 ans a prévu la création d’un réseau de « zones spéciales de conservation » (ZSC) et de « zones de protection spéciale » (ZPS) appelé Natura 2000.
Le réseau français Natura 2000 pourrait être cet outil nécessaire ambitieux, novateur et pertinent et devenir un moyen de reconquête de la biodiversité.
Hélas le bilan est faible du fait d’un manque de volonté politique.
Au point que le Conseil d’État, donnant raison à FNE Nationale par arrêt du 15 novembre 2021, a ordonné au Gouvernement d’agir pour réduire drastiquement l’utilisation des pesticides dans les sites Natura 2000, leur redonnant leur mission première : la protection de la biodiversité.
La responsabilité donnée aux Préfets dans le projet de décret
Le projet de décret relatif à l’encadrement de l’utilisation des pesticides soumis ici à consultation fait donc suite à la décision du Conseil d’État. Qu’en est-il de ce projet de décret ?
Malheureusement, bien que ce ne soit pas une surprise, au lieu d’apporter un réel cadrage national et des transpositions des textes européens dans le droit français, le gouvernement reporte une fois de plus la responsabilité de l’élaboration de mesures d’encadrement ou d’interdiction de l’utilisation de pesticides sur les préfets de départements.
Retour aux pressions des lobbies de l’agrochimie et des syndicats agricoles majoritaires. Les décisions seront fonction des rapports de force locaux et se dessinent des contestations au plan contentieux.
Pour sa part, dénonçant les insuffisances manifestes du projet de décret, FNE 71…
- demande l’interdiction totale des pesticides de synthèse dans les zones Natura 2000.
- dénonce et s’oppose par ailleurs à l’utilisation des pesticides hors sites Natura 2000, leurs effets nuisant à la conservation de ces derniers.
- demande une planification du développement de l’Agriculture Biologique en priorité sur les zones à enjeux eau et les zones à enjeux biodiversité, dont les sites Natura 2000
- soutiendra l’accompagnement des agriculteurs en agriculture biologique, en particulier dans les politiques d’installation dans les sites Natura 2000 ; moyens que la PAC néglige de façon évidente.
La présidence collégiale de FNE 71
Avis défavorable si il n’y a pas de proposition alternative
Les excès ne sont jamais bons.
Lorsque il est proposé une obligation, il faut absolument auparavant avoir résolu les questions et proposer des solutions pour y répondre.
Interdire les pesticides sans solution alternative n’est pas raisonnable.
Par exemple nous avons bien vu les conséquences des interdictions d’insecticides sur betteraves : résultat pénurie de sucre français, des sucreries vont fermer et la France va importer du sucre dont les origines sont beaucoup moins "écologiques".
Il ne faut pas oublier que dans le terme "développement durables" il y a 3 notions qui doivent être toutes les 3 résolues : écologie, social et économie.
Vous oubliez toujours les notions de "SOCIAL"et "ECONOMIE".
Imposer est néfaste, il faut proposer des modes alternatifs.
Le réseau natura2000 de l’Ain se compose de 19 sites représentant 80 000 ha, soit 14% de la surface du département. Plusieurs sites d’envergure (Dombes, Val de Saône) concernent fortement l’agriculture (près de 30000 ha de SAU en Dombes, 3500 ha en Val de Saône, …) avec dans certains cas, une forte présence de cultures. Ce projet de décret représente donc un enjeu fort pour nos exploitations agricoles.
La mise en place des DOCOB s’est réalisée au sein de chaque territoire avec tous les acteurs locaux dont les représentants de la profession agricole, parfois difficilement, mais au final dans un cadre partagé. Il est donc essentiel de maintenir cet état d’esprit et de poursuivre les échanges au niveau de chaque site via les COPIL permettant de prendre en compte les spécificités locales. Nous saluons ainsi la possibilité donnée par ce projet de travailler au sein de chaque site et le rôle donné au préfet d’analyser les DOCOB et/ou trancher les mesures à intégrer. Ils pourront s’appuyer sur les comités départementaux de suivis.
Nous souhaitons quelques modifications de ce projet de décret :
- nous proposons que l’analyse des mesures d’encadrement de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques devant être faite par les préfets porte sur le contenu des DOCOB. En effet, selon le code de l’environnement, les chartes et contrats Natura 2000 doivent être conformes au DOCOB. Ainsi, vérifier les mesures présentes dans les DOCOB revient à vérifier, en partie, le contenu des chartes et des contrats.
- nous proposons une évolution rédactionnelle du texte afin d’apporter une meilleure compréhension du décret. Il conviendrait ainsi de rendre plus précis l’article 1, en modifiant la phrase : « lorsque cette utilisation n’est pas effectivement prise en compte par les mesures, prévues au V de l’article L. 414-1 du code de l’environnement, définies dans le cadre des contrats et chartes » par, « lorsque cet encadrement ou cette interdiction n’est pas effectivement pris en compte par les mesures prévues au V de l’article L. 414-1 du code de l’environnement. »
- Enfin, nous préconisons un délai plus long pour la mise à jour des documents Natura 2000 : 9 mois (au lieu des 6 mois proposés) en conservant la possibilité de porter ce délai à 12 mois, afin de laisser le temps pour un dialogue constructif au niveau des territoires.
Enfin, la profession agricole doit être associée à l’ensemble des travaux Natura 2000 : de l’élaboration de l’instruction technique qui viendra compléter ce décret au niveau national, aux discussions au niveau local et la synthèse de l’analyse des mesures par les préfets. L’instruction technique devra conserver le principe d’une discussion et décision en local au sein des comités de pilotage Natura 2000