Projet de décret portant diverses dispositions relatives à la procédure d’autorisation environnementale, à la planification et à la gestion de la ressource en eau
Consultation du 15/05/2023 au 07/06/2023 - 210 contributions
Ministères
Aménagement
du territoire
Transition
écologique
Consultations publiques
Ministère de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation
Ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche
Consultation du 15/05/2023 au 07/06/2023 - 210 contributions
Commentaires
Ne nous voilons pas la face, c’est encore un décret qui veut remettre en cause l’existence même des étangs en permettant aux préfets et à leur service de s’attaquer aux ouvrages fondés en titre et donc aux étangs de cette catégorie.
Les modifications apportées aux code de l’environnement pourront ainsi soumettre la remise en eau d’un étang fondé en titre aux conditions, ou revendications devrais-je dire, des services de l’état. Non seulement c’est une atteinte au droit à la propriété mais en plus c’est une ouverture vers la politique d’effacement des étangs insufflée par la persistance de dogmes bien identifiés dans plusieurs administrations. Quand le dogme de la continuité écologique va à contre sens de la préservation des ressources en l’eau.
Les étangs sont des zones humides d’intérêt majeur comme de nombreux pays étrangers les considèrent. Dans « Vivant », le reportage Yann Arthus-Bertrand sur France 2, la vision proposée a remis l’humain au cœur de la biodiversité, et la biodiversité des plans d’eau et des marais y est bien présentée, enfin !
Je suis contre ce décret, car je ne veux pas voir nos plans d’eau devenir des champs agricoles sans intérêt. Je suis contre les aménagements bétonnés, contre les dérivations artificielles sans vie avec des températures létales pour les poissons, contre les bassins de décantation surdimensionnés qui sur le long terme ne servent strictement à rien.
Je veux continuer de voir ces plans d’eau, zones humides riches en vie avec leurs canards, leurs hérons, leurs aigrettes, leurs poissons, leurs plantes, … Je veux continuer de voir le paysage de mon département ponctuer de masses d’eau sauvage réparties entre les rivières, les moulins et les plans d’eau. Il y a plusieurs siècles, de nombreux étangs fondés en titre ont été créés par les moines des abbayes. Il y avait un peu moins d’étangs mais ils étaient plus grand en moyenne, et pourtant il y avait de la truite sauvage partout et même de l’écrevisse à patte blanche et ceci jusqu’aux années 70. Les anciens n’étaient pas idiots, ils savaient ce qu’ils faisaient, savaient construire des étangs, les gérer et les utiliser à bon escient.
Alors non, arrêtons le massacre, préservons nos étangs !
Ce projet de décret prévoit de modifier plusieurs paragraphes du code de l’environnement pour donner aux préfets et donc à leurs services des dispositifs pour contraindre à terme la gestion et donc l’existence même des étangs fondés en titre.
Ce projet de décret est édifiant à plusieurs titres car c’est un décret ministériel qui se permet de modifier substantiellement le code de l’environnement en négation du rôle précédent du législateur et qui prône clairement de mettre en cause la notion de droit fondé en titre (étangs comme moulins) au mépris du droit à la propriété garanti par la constitution.
D’une part il résulte de la loi (article L 214–6 du code de l’environnement) que « Dans tous les cas, les droits des tiers sont et demeurent réservés », et que « Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d’une législation ou réglementation relative à l’eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section ». Restreindre d’une manière quelconque, et cela par décret, la portée de cette règle, constitue clairement une remise en cause du travail précédent établi par le législateur qui ne voulait pas porter atteinte au droit de propriété.
D’autre part, un texte réglementaire ne peut entrer en contradiction avec la loi, qui reconnaît le caractère perpétuel et intangible des droits afférents à un ouvrage fondé en titre. Par définition il est autorisé de plein droit, sans que l’administration puisse s’y opposer.
Juridiquement, ce décret met en cause les travaux précèdent du législateur cumulé dans le code de l’environnement. Il ouvre donc la porte à de nombreuses requêtes devant le conseil d’état dont le premier rôle reste de protéger au mieux les droits des citoyens donc le droit à la propriété. Un tel texte donnera peut être naissance à une jurisprudence qui ne pourra que garantir la protection des installations fondées en titre.
L’OUGC Lot est défavorable à l’ensemble de ce projet. L’avis ci-dessous détaille plus particulièrement les raisons pour lesquelles les articles 3 et 8 doivent être supprimés :
Article 3 :
Cet article 3 du projet de décret doit être supprimé car il va tout simplement à l’encontre des règles de droit fondamentales : une décision de jurisprudence ne peut être opposée qu’aux parties au contentieux, et à elles seules.
Il n’est pas possible d’appliquer à des tiers les conclusions du contentieux.
Nous demandons le retrait de cet article.
Article 8 :
La rédaction de cet article pose énormément de questions pratiques :
• Un point important est qu’un point de prélèvement (quel que soit la ressource) peut être transféré d’une exploitation à une autre (reprise, rachat…). Donc le besoin peut changer radicalement selon le type d’exploitation et ainsi une moyenne ne voudra plus rien dire.
• Certains OUGC comme celui du Lot transfèrent le point de prélèvement avec son historique complet. Mais certains OUGC créent un nouveau point de prélèvement (sur le même emplacement) si l’exploitation change. Ceci afin de bien distinguer les 2 historiques de prélèvements des 2 exploitations. Ce fonctionnement risque entrainer des erreurs de calculs.
• Bien sûr un volume prélevé peut varier énormément selon les rotations annuelles de cultures et selon les années climatiques. Par exemple pour du melon, une retenue va être utilisée à plein pendant 4 ans puis les 4 années suivantes elle ne servira pas car le melon doit changer de parcelle (obligatoire vis à vis de certaines maladies). Donc une moyenne amputerait quasiment de moitié le besoin du préleveur.
Cet article pose aussi des questions d’équité et de bon sens :
Les irrigants ont besoin d’avoir des volumes autorisés qui ne correspondent pas précisément aux prélèvements effectivement réalisés : ces deux notions sont fondamentalement différentes. Il faut conserver une marge de manœuvre.
• Avoir une « assurance climatique » dans le cadre d’un contexte climatique changeant
• De plus en plus de cultures qui n’étaient pas irriguées jusqu’alors le sont aujourd’hui et le seront de plus en plus comme les céréales ou le colza.
• Obtenir un contrat avec un acteur de la filière aval (industrie agroalimentaire, grossistes, …) ou de la filière amont (semencier).
• Cette marge de manœuvre nécessaire permet d’intégrer de nouveaux irrigants
• Un préleveur fait sa demande de volume en fonction des surfaces totales potentiellement irrigables de son exploitation. D’autant plus que ces volumes attribués correspondent à du réseau et du matériel dans lequel l’exploitation a investi et qui demeure une plus-value économique, tout en étant un facteur assurantiel fort contre les risques climatiques.
• La pluviométrie ne peut pas être anticipée faisant baisser d’autant les besoins en irrigation.
• Quid du calcul des volumes prélevés lors des années de restrictions
Par conséquent nous demandons de supprimer cet article 8 afin de permettre au Préfet d’être libre dans l’attribution des volumes en cas de rallongement des délais d’instruction.
Par conséquent nous demandons de supprimer cet article 8 afin de permettre au Préfet d’être libre dans l’attribution des volumes en cas de rallongement des délais d’instruction.
Encore de nouvelles restrictions en vue, comme toujours, décidées par l’administration centrale, et les représentants de l’état sur le terrain, sans concertation avec les habitants et propriétaires concernés, chaque territoire ayant ses particularités.
Venez donc passer du temps à la campagne, et écouter les ’vraies gens’ qui connaissent le terrain mieux que VOUS, mais ce serait Voyage en terres inconnues ! et surtout en eaux profondes puisqu’on parle de l’eau.
Me concernant, je veux parler principalement des étangs de petite surface, personne ne va nous apprendre comment les gérer, et gérer leur eau, nous savons mieux que quiconque le faire.
Et cette suppression des droits fondés en titre ? et qu’en est t’il du droit de propriété ? L’objectif final ne serait t’il pas de nous déposséder de nos biens familiaux pour la plupart d’entre nous, et de tout passer dans le domaine public pour que nos chers écolos bobos, qui s’empilent derrière leurs bureaux, puissent venir faire ’mumuse’ sur nos biens. Nous entretenons notre patrimoine avec nos deniers, sans demander de subventions, et vous allez en plus nous demander de faire des travaux faramineux, qui mèneront à la ruine des propriétaires et des étangs par la même occasion.
Quant à notre agriculture, que voulez-vous ? Qu’elle meure ? Et la France importera encore plus de fruits et légumes, de lait, de viande, etc…., produits dans des pays lointains, bravo pour l’empreinte écologique dont vous nous rebattez les oreilles à longueur de journée.
Savez-vous ce qu’est le BSP ? bon sens paysan pour ceux et celles qui l’ignorent, nous ruraux, en avons assez de ces réglementations sans fondement.
Pauvre France, notre si beau pays des libertés, où sont t’elles ?
TOTALEMENT CONTRE CE PROJET et MARRE DE CETTE ECOLOGIE PUNITIVE !
Nous demandons la suppression de l’article 8.
Notre département de la Gironde est concerné par l’OUGC du bassin Dordogne et l’OUGC Garonne Aval- Dropt. Les dispositions de l’article 8 ne nous paraissent pas acceptables car l’instruction des nouvelles demandes d’AUP hors délai peut découler de raisons non inerrantes aux irrigants concernés par cet encadrement.
Selon votre note d’accompagnement à la consultation : « L’article 8 modifie l’article R. 214-22 du code de l’environnement afin de définir les modalités dans lesquelles le préfet peut encadrer l’irrigation, lorsque l’instruction des nouvelles demandes d’autorisation unique de prélèvement ne peut pas être faite dans des délais. Cette disposition vise à garantir que l’irrigation soit menée dans le respect de l’autorité de la chose jugée ainsi que des objectifs de gestion équilibrée de la ressource en eau issus des SDAGE, par l’introduction d’un plafond cohérent avec ceux indiqués dans les décisions jurisprudentielles récentes et correspondant à la moyenne des prélèvements annuels effectivement réalisés sur chaque point de prélèvement sur les dix dernières années. »
Contrairement à la note d’accompagnement de la consultation, par l’article 8, le préfet doit respecter ces différentes exigences pour encadrer les prélèvements. Il ne peut pas décider autrement. Il ne s’agit pas d’une possibilité laissée au préfet mais d’une obligation réglementaire qui est nouvelle. La présentation de cet article par le ministère en charge de l’écologie n’est donc pas correcte et induit le justiciable en erreur.
La référence au respect de la jurisprudence est inexacte. Il n’est pas pensable en droit d’ériger en principe et donc en normes des décisions de juges administratifs. Seuls ces arrêts du Conseil d’Etat quand ils le décident expressément obligent le pouvoir réglementaire à faire évoluer les textes jugés. De manière générale, le juge administratif interprète le droit administratif au regard de la situation qui lui est soumise. Il n’emporte pas création d’une norme sinon il deviendrait lui-même un législateur à la place du législateur. Sa jurisprudence n’est pas créatrice de légalité.
L’article 8 instaure une inégalité de traitement entre les OUGC et donc entre les irrigants dès lors que la demande de renouvellement ne peut pas être traitée dans les temps. L’article 8 décide que le renouvellement réalisé hors délais d’une AUP est soumis obligatoirement à des règles de calcul de volumes spécifiques. L’inégalité de traitement juridique entre irrigants qui en découle, n’est pas acceptable en droit.
Enfin, cette règle différenciée est absurde. Elle encourage en réalité le prélèvement des volumes puisque plus les prélèvements effectués sont importants et plus les volumes octroyés le seront. Il y a là une prime à la non économie d’eau ce qui est contraire aux politiques publiques mises en place actuellement (Plan Eau 2023) et à l’ensemble du travail que la Chambre d’agriculture mets en place depuis des années pour la gestion efficiente de l’eau.
L’article 8 est donc à ce titre inintelligible et contrevient à la clarté obligatoire du droit qui conduit au final à des sanctions pénales.
Il y a une différence entre les volumes autorisés administrativement et les volumes prélevés effectivement dans le milieu. Il est tout d’abord normal que les volumes prélevés ne dépassent pas les volumes autorisés par l’AUP, puis répartis annuellement par le Plan Annuel de Répartition, ce qui tend à démontrer la bonne répartition des volumes opérée par les OUGC et la bonne gestion de la ressource en cours de campagne (tours d’eau). Les irrigants ont besoin d’avoir des volumes autorisés qui ne correspondent pas précisément aux prélèvements effectivement réalisés : ces deux notions sont fondamentalement différentes. Il faut conserver une marge de manœuvre pour :
• Avoir une « assurance climatique » dans le cadre d’un contexte climatique changeant pouvant déboucher sur un manque d’eau mortel pour les productions. La demande est donc évaluée de manière à couvrir les besoins extrêmes des plantes mais elle est souvent peu ou pas valorisée. Les projections actuelles du bassin Adour-Garonne prévoient une augmentation de l’évapotranspiration de 10 % à 30 %.
• De plus en plus de cultures qui n’étaient pas irriguées jusqu’alors le sont aujourd’hui et le seront de plus en plus comme les céréales ou le colza.
• Obtenir un contrat avec un acteur de la filière aval (industrie agroalimentaire, grossistes, …) ou de la filière amont (semencier).
• Cette marge de manœuvre nécessaire permet d’intégrer de nouveaux irrigants, et ce d’autant que les volumes supplémentaires demandés par les irrigants actuels sont également de plus en plus importants afin de leur permettre de s’adapter au changement climatique. L’installation de nouveaux agriculteurs, dans un contexte de départ à la retraire rapide d’agriculteurs, est indispensable à la continuité de l’agriculture. L’eau étant un élément indispensable pour sécuriser l’installation et le maintien des exploitations.
Le calcul réalisé sur chaque point de prélèvement n’a aucun sens et fige les exploitations agricoles qui dépendent de l’irrigation ou celles qui en dépendront dans le cadre du changement climatique. L’impact sur le milieu doit être analysé par unité de gestion et ressource et non par point de prélèvement.
L’accès à l’eau est incontournable afin de maintenir l’activité agricole. L’agriculture irriguée nourrit les Hommes. Dans ces conditions, cette activité économique relève de l’intérêt général de la Nation en assurant la sécurité alimentaire de nos concitoyens. Restreindre de fait les prélèvements comme le fait l’article 8 sans fondement sur l’état de la ressource en eau entraînerait des conséquences sur notre potentiel de production alimentaire et contribuera à davantage d’importations de produits alimentaires au détriment de notre volonté de produire localement.
L’article 8 doit être supprimé.
— La référence au respect de la jurisprudence est inexacte :
La Chambre administrative d’appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 21/12/2021, 21BX01326 a décidé
« qu’il résulte de l’instruction qu’un plafonnement des prélèvements autorisés à la moyenne des prélèvements annuels effectivement réalisés sur chaque point de prélèvement n’est pas possible en l’absence de données connues par l’Etat [..] sur la consommation antérieure par points de prélèvement » ;
Par ailleurs, l’utilisation de la jurisprudence n’est pas acceptable : Il n’est pas pensable en droit d’ériger en principe et donc en normes des décisions de juges administratifs. Seuls ces arrêts du Conseil d’Etat quand ils le décident expressément obligent le pouvoir réglementaire à faire évoluer les textes jugés. De manière générale, le juge administratif interprète le droit administratif au regard de la situation qui lui est soumise. Il n’emporte pas création d’une norme sinon il deviendrait lui-même un législateur à la place du législateur. Sa jurisprudence n’est pas créatrice de légalité.
— L’article 8 n’est pas une simple clarification de rédaction du code de l’environnement comme le dit la présentation du projet de décret : l’article 8 modifie plusieurs articles du code de l’environnement :
On peut comprendre que cet article permet au préfet d’adopter un arrêté de prescriptions « transitoire » dans l’attente d’un nouvel arrêté de prescriptions complémentaires permettant de renouveler une AUP sans modifications substantielles ;
Ce qui suppose que cet article interfère avec la procédure de demande d’un renouvellement non substantiel de l’AUP :
- Doit - on comprendre que ce faisant, le calcul des prélèvements autorisés donc des volumes autorisés via l’AUP induisant automatiquement une baisse de volumes, décide d’office que la baisse de volumes n’est pas assimilable à une modification substantielle du projet d’origine ?
- Alors même que la baisse des prélèvements pourrait signifier une modification substantielle du projet initial de l’AUP et donc la nécessité de passer par une nouvelle AUP et non un renouvellement de l’ancienne AUP ;
- Ce faisant l’article 8 du projet de décret modifie les règles d’appréciation du caractère substantiel ou pas des modifications du projet initial autorisé par l’AUP ;
— l’article 8 instaure une inégalité de traitement entre les OUGC et donc entre les irrigants dès lors que la demande de renouvellement ne peut pas être traitée dans les temps :
L’article 8 décide que le renouvellement réalisé hors délais d’une AUP est soumis obligatoirement à des règles de calcul de volumes spécifiques.
Il induit un traitement juridique différencié avec les renouvellements d’AUP qui seraient réalisés dans les temps.
La complexité juridique qui s’en suit, tout comme l’inégalité de traitement juridique entre irrigants qui en découle, n’est pas acceptable en droit. D’autant que rien n’est dit sur ce qui pourrait justifier que la demande de renouvellement ne peut pas être traitée dans les temps.
L’article 8 est donc à ce titre inintelligible et contrevient à la clarté obligatoire du droit qui conduit au final à des sanctions pénales. L’article 8 modifie des règles de calcul établies par ailleurs et modifie donc de multiples articles du code de l’environnement en instaurant un régime dérogatoire au droit commun qui deviendra le droit commun. Il instaure une inégalité de traitement entre les irrigants qui n’est pas acceptable en droit et dans les faits.
— Cette règle différenciée est absurde
- Elle encourage en réalité la consommation des volumes puisque plus les prélèvements effectués sont importants et plus les volumes octroyés le seront. Il y a là une prime à la non économie d’eau ce qui est contraire aux politiques publiques mises en place actuellement (Plan Eau 2023).
- De fait, le volume autorisé doit être supérieur au volume prélevé : ramener le volume autorisé au volume prélevé conduit donc systématiquement à une baisse de volume autorisé.
- Le volume prélevé varie de manière importante selon les années en fonction du contexte climatique, de l’utilisation ou non de certains points de prélèvements en fonction de la rotation des cultures et des parcelles irriguées, du matériel et de la main d’œuvre disponible à un instant donnée, des éventuelles restrictions. A titre d’exemple, pour un agriculteur ayant une parcelle de melon, un point de prélèvement peut être utilisée au volume autorisé quasi maximum pendant 4 ans, puis ne plus être utilisé du tout pendant les 4 années suivantes (le melon sera sur une autre parcelle et pourrait être remplacée par une culture non irriguée). Ramener le volume autorisé au volume réellement prélevé en moyenne, conduirait à baisser le volume autorisé à plus de la moitié du volume initial, et n’aurait aucun sens par rapport aux besoins.
Chambre régionale d’agriculture Occitanie
Concernant votre projet de décret portant diverses dispositions relatives à la procédure d’autorisation environnementale, à la planification et à la gestion de la ressource en eau, nous souhaitons vous faire part des observations suivantes :
Article 3
Nous souhaitons que cet article soit supprimé. En effet nous estimons que les Préfet et ses services sont compétents pour statuer sur les demandes d’autorisations sans cet alinéa.
De plus, la jurisprudence du tribunal administratif ne peut pas être créatrice de légalité. Cela remettrait en cause la séparation du pouvoir judiciaire et du pouvoir législatif.
Article 8
La rédaction de cet article ne correspond pas à la note de présentation. En effet la note indique une possibilité de recourir à la règle de la moyenne en cas :
« le préfet peut encadrer l’irrigation, lorsque l’instruction des nouvelles demandes d’autorisation unique de prélèvement ne peut pas être faite dans des délais »
Or dans les faits, l’alinéa est rédigé de manière à rendre obligatoire le recours à cette règle en cas de modification de l’AUP quel qu’en soit sa nature. L’ensemble des AUP actuellement en vigueur qui seront renouvelées sans modification substantielle seront impactées. De même, en cas d’arrêté d’AUP modificatif pour régler des questions mineures, le Préfet sera contraint d’appliquer cette règle. Cette écriture est très lourde de conséquence.
De plus, même si cette règle a pu être évoquée dans certaines jurisprudences, d’autres jurisprudences ont indiqué que le recours à cette règle était annulé car « entaché d’erreur d’appréciation » (CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 21/12/2021, 21BX01326).
Dans son jugement, le tribunal rappelle qu’« il résulte de l’instruction qu’un plafonnement des prélèvements autorisés à la moyenne des prélèvements annuels effectivement réalisés sur chaque point de prélèvement n’est pas possible en l’absence de données connues par l’Etat [..] sur la consommation antérieure par points de prélèvement »
En effet cette règle n’est pas applicable concrètement car les volumes prélevés sont connus et comparés par rapport aux autorisations qui peuvent se répartir sur plusieurs points de pompages effectifs et par rapports à un préleveurs-irrigants précis. De plus le travail à faire pour rendre effectivement l’application de cette règle s’avère colossal et insurmontable avec un nombre d’autorisation avoisinant les 3000, et d’une évolution entre chaque campagne de 10 à 15% des préleveurs-irrigants (sans parler de leurs points)
Au niveau de ses conséquences économiques, cette règle s’avère injuste dans son application. Elle récompense les préleveurs-irrigants ayant employé le plus d’eau au détriment des plus petits préleveurs. Elle récompense également les préleveurs qui n’ont pas eu de restriction ou qui ne les auraient pas respectées au détriment des « bon élèves ». Cela s’avère d’autant plus injuste que lorsque des restrictions sont appliquées sur un axe réalimenté cela traduit bien souvent une ambition de gestion afin de disposer le plus longtemps possible de la ressource stockée pour tous les usages.
L’utilisation d’une moyenne sur les 10 dernières années pour autorisation maximale ne reflète pas la variation interannuelle des besoins agronomiques des cultures irriguées. En effet si l’on procède par analogie cela revient à réduire notre consommation électrique à la moyenne de ce que nous utilisons durant la journée alors qu’aujourd’hui nous avons une puissance maximale souscrite. Sans cela nous ne pourrions utiliser de manière ponctuelle les gros électroménagers tels que les laves linges, …
De plus l’intérêt d’un plafonnement des volumes autorisés sur l’ensemble des types de ressources n’est pas cohérent. En effet dans le cadre de ressources stockées type retenues déconnectées ou cours d’eau réalimenté, les contraintes sont liées à la répartition de ce volume stockée dans le temps. Le plafonnement des volumes ne permettra pas une valorisation maximale des plans d’eau. Et pire, en réduisant le volume assujetti à chaque irrigant, pour rentabiliser leurs ouvrages, les gestionnaires seraient contraints d’augmenter le nombre de préleveur et par conséquent le débit affectable. Cela mettrait en danger l’équilibre des systèmes réalimentés.
Nous vous rappelons que la politique de valorisation maximale des retenues existantes est prônée par le Varenne de l’Eau.
Par conséquent nous demandons de supprimer cet article 8 afin de permettre au Préfet d’être libre dans l’attribution des volumes en cas de rallongement des délais d’instruction.
Ce projet de décret montre bien qu’il a été écrit sans consultation des acteurs agricoles, ce qui est totalement contre-productif. Le gouvernement demande sans cesse des concertations pour une meilleure compréhension de chaque partie mais il considère qu’il est au-dessus de ses propres préconisations, ce qui est très dogmatique.
L’article 8, par son hostilité manifeste contre l’irrigation, remet directement en cause notre souveraineté alimentaire. C’est inconcevable. Le préfet devra encadrer les prélèvements à la moyenne des volumes consommés 10 dernières années quand le renouvellement de l’AUP sera en retard. Connaissant les investissements nécessaires pour réaliser les études demandées aux OUGC, ainsi que les demandes de compléments toujours plus complexes des DDT lors de l’instruction, cette situation arrivera plus d’une fois en France et pourrait même être provoqué sciemment par des organismes détracteurs via des blocages dans les enquêtes publiques. Cette nouvelle modalité de calcul des prélèvement sur le réel consommé des 10 dernières années revient à niveler par le bas les prélèvements sans tenir compte des volumes de références antérieurement calculés et autorisés.
Par ailleurs, cet encadrement est prévu au niveau du point de prélèvement et non en global à l’échelle de l’OUGC. C’est inconcevable pour les exploitations ayant plusieurs points de prélèvement avec mutualisation du volume. La betterave sucrière porte-graine, par exemple, nécessite un temps de retour sur la parcelle de minimum 8 ans, 10 ans au mieux. Avec ces nouvelles règles, finis les échanges de parcelles donc finis la production de semences de betteraves qui, rappelons-le, vient d’augmenter fortement en France avec l’impossibilité de les cultiver en Ukraine en raison du conflit politique. Idem pour les transferts de prélèvement avec les cessions et les reprises d’exploitation : un territoire est vivant et les agriculteurs sont des humains, ce ne sont pas que des lignes sur des tableurs dans les bases de données des OUGC. Ce projet semble avoir oublié ce point. Qui plus est, le travail de collecte des données sur 10 ans est titanesque comme a pu le constater l’OUGC AREA Berry qui a effectué ce travail pour déterminer les volumes de références de ses bénéficiaires. Les écueils suivants sont rencontrés : prend-on uniquement les années irriguées sur les 10 ans ? Si non, les moyennes baissent drastiquement jusqu’à anéantir toute viabilité économique. Si oui, sur combien d’année la moyenne sera faite ? Est-il concevable de baser les calculs sur 2 ou 3 années uniquement ? Et comment faire lorsque sur ces quelques années, la consommation est minimes car l’agriculteur a eu une panne de matériel, indépendante de sa volonté mais totalement dépendante de la disponibilité sur le marché qui, depuis la crise du Covid, est allongée de plusieurs mois ? Est-elle incluse également dans le calcul ?
Qui plus est, la citation des décisions de jurisprudence est totalement partiale et abusive. En effet, la Chambre administrative d’appel de Bordeaux, 5ème Chambre, du 21 décembre 2021, n°21BX01326 a décidé "qu’il résulte de l’instruction qu’un plafonnement des prélèvements autorisés à la moyenne des prélèvements annuels effectivement réalisés sur chaque point de prélèvement n’est pas possible en l’absence de données connues par l’Etat [..] sur la consommation antérieure par points de prélèvement ».
La Chambre d’agriculture de Vaucluse est opposée à la rédaction de l’article 8 tel qu’il est rédigé dans la version soumise à consultation.
En effet, il impose des règles de calcul, et pourrait engendrer une modification du code de l’environnement. Ainsi il nous semble que les conséquences de cet article ne sont pas suffisamment explicitées et analysées, que ce soit sur le terrain ou au niveau juridique.
Il est important de rappeler le rôle essentiel, vital de l’agriculture irriguée sur nos territoires. Il est primordial de permettre un accès à l’eau aux agriculteurs, afin qu’ils puissent continuer d’exercer cette activité économique qui relève de l’intérêt général de notre Pays, à savoir produire une alimentation saine et suffisante.
L’eau est un bien commun dont il faut assurer le partage entre les usagers de façon équitable, tout en respectant les milieux naturels. C’est avec cette vision que la chambre d’agriculture de Vaucluse s’est engagée à porter un OUGC. Or cet article n’est pas équitable pour les agriculteurs et réduit la gestion collective (NB : mise en place à la demande des services de l’état).
L’OUGC doit pouvoir continuer d’assurer pleinement sa mission de partage de l’eau, et c’est bien au niveau local que les règles doivent se décider, car ce sont ceux qui vivent sur le territoire qui peuvent proposer les solutions les plus adaptées. Ainsi, imposer une règle de calcul des volumes autorisés homogène sur la France entière serait une erreur. Le cadrage actuel est suffisant.
En imposant une règle de calcul pour l’attribution des volumes autorisés, cet article 8 remet en question le rôle central de l’OUGC et de son organisation : L’OUGC 84 s’est doté d’instances de concertation pour établir des règles de partage le plus équitables possibles, validées collégialement au niveau local par les représentants du monde agricole. Dans le respect de l’AUP, donc borné par les services de l’Etat, l’OUGC 84 permet au monde agricole de gérer le partage des volumes en fonction des besoins du territoire. Imposer un mode de calcul enlèverait à l’OUGC sa principale raison d’exister. L’OUGC serait réduit à une mission de collecte et synthèse de données. Ainsi, la chambre d’agriculture a accepté de porter un OUGC, avec toute l’implication que cela comporte, en termes de coûts, d’accompagnement des agriculteurs …. : il n’est pas acceptable que sa mission soit réduite de cette façon.
Cet article vient en opposition totale avec la mission principale de l’OUGC, qui est de répartir les volumes entre les demandeurs, de façon équitable et en fonction des besoins de chacun. En effet ce mode de calcul imposé serait préjudiciable pour les raisons suivantes :
- Non équitable pour les irrigants : cet article induit une inégalité de traitement entre les irrigants, ce n’est pas acceptable.
- De nature à favoriser ceux qui utilisent le plus d’eau : considérer la moyenne des 10 dernières années ne vas pas inciter à faire des économies d’eau, au contraire.
- Aucune possibilité d’adaptation pour des situations particulières locales
- Aucune prise en compte des variations de besoins annuels des irrigants (modifications d’assolements, rotations faisant varier le besoin d’une unité de gestion à l’autre, hausse ou baisse de surfaces irriguées d’une année à l’autre etc …)
- Certaines années les volumes prélevés sont faibles, voire nuls pour certains points, et cela serait préjudiciable que ces années soient prises en référence. 2 exemples sur notre territoire : en 2021, un gel de printemps a causé des pertes sur bon nombre de cultures pérennes / les agriculteurs concernés ont peu arrosé ensuite car il n’y avait pas de fruits sur les arbres (donc un besoin inférieur aux autres années). En 2022, du fait de la forte sécheresse estivale, les agriculteurs n’ont pas pu irriguer (ressource non disponible et arrêtés sécheresse). Ainsi si on prend un exemple d’un jeune arboriculteur installé en 2020, avec le projet de calcul imposé il se retrouverait avec une moyenne de 3 ans, dont 2 années avec un volume faible ou nul ? ce n’est pas acceptable.
- Bien que créés au départ pour gérer les zones déficitaires, il faut bien avoir en tête qu’aujourd’hui des OUGC sont en place sur des zones non déficitaires, où une augmentation des volumes prélevés (encadrés et limités) est permise, en adéquation entre les besoins de l’agriculture et la gestion des milieux. Le mode de calcul imposé contraindrait ces territoires à des baisses de volumes prélevés non nécessaires, tout en pénalisant l’activité agricole, qui rappelons le, permet de nourrir la population.
Bien qu’annoncée comme transitoire en attente de renouvellement d’AUP, nous craignons que cette règle de calcul imposée soit appliquée de manière fréquente :
- Au vu des délais pour constituer et instruire une demande d’AUP : dans les faits certaines demandes d’AUP nécessitent plusieurs années avant d’aboutir. Il conviendrait plutôt de travailler à des solutions permettant aux OUGC de monter des demandes plus rapidement (simplification) et aux services de l’Etat de tenir et / ou réduire les délais d’instruction, plutôt que de trouver des adaptations pour pallier à ces retards.
- Nous craignons que cette règle annoncée comme « temporaire » devienne la règle de base à l’avenir
Enfin, nous déplorons l’absence de concertation amont avec le monde agricole sur ce projet.