Projet d’arrêté encadrant la chasse de la tourterelle des bois pour la saison cynégétique 2025/2026
Consultation du 01/08/2025 au 22/08/2025 - 5769 contributions
Contexte
Dans le cadre de sa politique de protection de la biodiversité et en application de la directive 2009/147/CE relative à la conservation des oiseaux sauvages, la France poursuit l’adaptation de ses règles de chasse aux exigences de conservation fixées à l’échelle européenne. Le projet d’arrêté soumis à l’avis du public s’inscrit dans le cadre des recommandations formulées par la Commission européenne et les groupes d’expertise associés, notamment le groupe NADEG (Nature Directives Expert Group), chargé du suivi de la mise en œuvre des directives "Oiseaux" et "Habitats".
Ainsi lors de la réunion du NADEG du 1er avril 2025, la Commission a reconnu une amélioration de l’état de conservation de la tourterelle des bois sur la voie de migration centre-ouest, à laquelle appartient la France. Cette évolution positive permet d’envisager une reprise encadrée de la chasse à travers un plafond limité, conditionné à des mécanismes rigoureux de suivi et de contrôle.
Saisit pour avis, le comité d’experts sur la gestion adaptative a donné un avis favorable à un plafond de prélèvement fixé à 10 560 tourterelles des bois pour la saison 2025/2026.
Présentation du contenu de l’arrêté
L’arrêté relatif à la chasse de la tourterelle des bois (Streptopelia turtur) pour la saison cynégétique 2025-2026 fixe un cadre strict visant à concilier la pratique de la chasse avec les impératifs de conservation de l’espèce. Il établit un plafond national de prélèvements autorisés, fixé à 10 560 individus pour l’ensemble de la France métropolitaine. Ce plafond constitue une limite absolue et non fractionnable à respecter à l’échelle nationale.
L’arrêté impose à chaque chasseur l’obligation de déclarer immédiatement tout prélèvement via l’application mobile ChassAdapt, développée par la Fédération nationale des chasseurs (FNC). Toute absence de déclaration est constitutive d’une infraction. Parallèlement, les agents habilités utilisent l’application ChassControl, leur permettant de vérifier sur le terrain les déclarations effectuées.
Afin d’assurer un suivi quotidien des prélèvements, la FNC est tenue de transmettre à l’Office français de la biodiversité (OFB) et au ministère chargé de la chasse les données recueillies via l’application. Dès que le plafond national est atteint, l’OFB en informe les autorités compétentes et la FNC, laquelle doit immédiatement transmettre l’information aux chasseurs par l’intermédiaire des fédérations départementales. À compter de cette notification, toute déclaration devient impossible via ChassAdapt, et tout prélèvement supplémentaire est interdit et réputé illégal.
En fin de saison, la FNC doit transmettre, au plus tard le 1er juin 2026, un bilan consolidé des prélèvements, ainsi qu’un rapport d’évaluation des contrôles menés, ce dernier devant être adressé au directeur de l’eau et de la biodiversité avant le 1er juillet 2026. En complément, un bilan biologique des prélèvements devra également être fourni, incluant une analyse du sexe et de l’âge des individus capturés.
Consultations obligatoires
Le projet d’arrêté, ayant une incidence directe sur l’exercice de la chasse et sur l’environnement, nécessite un examen par le Conseil national de la chasse et de la faune Sauvage conformément à l’article L. 421-1 A du code de l’environnement.
Il fait également faire l’objet d’une consultation du public en application de l’article L.123-19-1 du code de l’environnement, ouverte du 1er août au 22 août 2025.
Pour la bonne prise en compte de votre avis veuillez faire apparaitre le mot « favorable » ou « défavorable » dans le titre de votre consultation.
Commentaires
Avis défavorable de la LPO AURA : la restauration globale de la population de tourterelles des bois est à nuancer : l’augmentation de la population est principalement enregistrée dans la zone centrale de l’aire de distribution de la population en Andalousie, Castille-et-León, Castille-La Manche (régions où se trouvent les 2/3 de la population espagnole ; SEO). En dehors, il n’y a pas d’augmentation significative, les tendances sont plutôt stables. En France on note une légère augmentation de l’indice annuel du STOC en 2024 mais la tendance demeure toujours négative. Dans les pays du nord-ouest de l’Europe (UK, BE, NL, DE), la tendance est stable avec des tailles de population qui demeurent très faibles. La réouverture de la chasse demeure prématurée, tant les populations de tourterelles des bois dans les pays du nord de son aire de répartition demeurent décimées et ne montrent pas pour l’instant de tendance à la restauration. Le rétablissement ne s’est produit que dans une petite zone géographique (la zone centrale, mais toujours petite par rapport à l’aire de répartition de l’espèce), située en bordure de la voie de migration secondaire dont il est question. Les Tourterelles des bois prélevées en France, en Italie et au Portugal sont issues de population encore en déclin ou stable, ce qui compromet leur rétablissement. La France doit faire mieux pour restaurer les habitats agricoles que l’espèce fréquente. L’absence de rétablissement de l’espèce en dehors de la zone centrale montre que les mesures prises pour les habitats ne sont pas encore efficaces à grande échelle. La France a signalé auprès de la CE avoir mis en place en 2024 des interventions ciblées de gestion de l’habitat : fourniture de points d’eau, plantation de haies et la plantation d’arbres et/ou d’arbustes sur parcelle. Si la superficie d’intervention de ces mesures peut paraître relativement vaste, 230 000 ha, elle ne représente que 0,4 % du territoire métropolitain… D’autre part le plan de gestion de la TdB publié en 2021 est toujours en attente de mise en œuvre…
Et accessoirement que la tourterelle des bois a quasi disparu de régions comme AURA : elle ne devrait pas y être chassée.
Nous savons également que l’application ChassAdapt n’est qu’insuffisamment opérationnelle pour garantir un contrôle du quota fixé. De nombreux chasseurs refusent de s’en servir. Bien sûr il peut y avoir des contrôles de la part de la police de la nature mais nous savons qu’elle est bien trop peu nombreuse, et craintive à raison dans certaines régions de migration de l’Ouest de la France.
Louis Granier Président LPO AURA