Projet de décret relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas
L’objet principal du projet de décret est de transférer les compétences d’autorité environnementale (AE) (avis sur l’étude d’impact et sur la prise en compte de l’environnement par le projet) et d’examen au cas par cas (afin de déterminer si un projet doit faire l’objet d’une évaluation environnementale) du ministre chargé de l’environnement à la formation d’autorité environnementale de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD). Celle-ci était déjà compétente pour un certain nombre de projets.
Consultation du 17/07/2024 au 10/08/2024 - 36 contributions
Le projet de décret prévoit une réforme de l’autorité environnementale et de l’autorité en charge de l’examen au cas par cas dans le cadre des projets soumis à examen au cas par cas ou à évaluation environnementale, en transférant la compétence actuellement exercée par le ministre chargé de l’environnement à la formation d’autorité environnementale de l’IGEDD. La formation d’autorité environnementale de l’IGEDD sera désormais compétente.
Comme corollaire du transfert des compétences de l’AE ministre à l’AE de l’IGEDD, le projet de décret prévoit :
- le transfert des compétences d’évocation et de transfert jusqu’ici attribuées au ministre chargé de l’environnement :
- pour les projets : possibilité, pour l’AE de l’IGEDD et pour l’exercice de la mission d’avis, de se saisir de tout projet relevant de la MRAE ou au contraire de lui déléguer un projet (II du R.122-6). En conséquence, le V de l’article R.122-7 est modifié pour prévoir qu’en cas de transfert de dossier, le délai court à compter de la date à laquelle l’AE, à qui il est transféré, reçoit le dossier (cette précision existe déjà dans le cadre du transfert du ministre chargé de l’environnement vers l’AE de l’IGEDD)
- pour les plans programmes : possibilité, pour l’AE de l’IGEDD de se saisir d’un plan programme relevant de la MRAE
- la modification de l’article R.122-24-2 relatif à la prévention des conflits d’intérêts, ces dispositions ne s’appliquant désormais qu’à la MRAE (l’AE de l’IGEDD disposant d’un nombre de membres suffisant pour permettre que certains se déportent, le cas échéant).
Enfin, le projet de décret intègre deux autres dispositions prévoyant, d’une part, que le porteur de projet doit prendre en compte, le cas échéant, les résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement dans le cadre de la demande d’examen au cas par cas portant sur son projet (I du R.122-3-1), et, d’autre part, lorsque le projet fait l’objet d’une évaluation environnementale, la possibilité pour le maître d’ouvrage de solliciter un échange avec l’autorité environnementale avant l’émission de son avis (IV du R.122-7).
Commentaires
- De plus, la prévention des conflits d’intérêts est modifiée et semble diminuée ce qui est grave et négatif. N’est-ce pas contraire à la mise en demeure par la Commission européenne qui exigeait que « La transposition de l’obligation pour les États membres de veiller à ce que les autorités compétentes accomplissent leurs missions de manière objective et ne se trouvent pas en situation de conflit d’intérêts pose également problème"
- Est-ce que ce projet améliore l’indépendance, l’impartialité et l’objectivité des avis rendus en matière d’environnement ? Si oui je donne un avis favorable Si non je donne un avis défavorable.
- De nombreux dossiers engageant des recours contentieux, des finances publiques, le mépris de l’intérêt général et le mépris des avis citoyens ainsi que la violation de la Convention d’Aarhus démontrent la nécessité d’une amélioration des procédures en matière de protection de l’environnement, objectif prioritaire de constitutionnalité. Est-ce que ce projet (ces projets !) de décret apporte une amélioration significative ?
- Par ailleurs, je note qu’encore une fois les consultations publiques importantes sont ouvertes pendant les vacances, lorsque la plupart du public est absent ou peu disponible. Celle-ci a été ouverte, de plus, après la dissolution de l’Assemblée Nationale alors même que les ministres du gouvernement précédent était interpellé sur certains projets destructeurs de l’environnement qui perdurent depuis plusieurs décennies au mépris de la réalité actuelle de l’environnement avec certains liens et conflits d’intérêts ! Est-ce que ce transfert de compétences permettra à l’avenir d’éviter les projets destructeurs ? Lili adhérente associations protection environnement
Tout d’abord je tiens à souligner l’incongruité d’une consultation sur un sujet important en pleine période des congés estivales. Elle ne peut que recueillir peu d’avis et en ce sens elle ne répond pas à la nécessité d’informer et impliquer les citoyens
Ce projet de décret ambitionne de modifier partiellement le processus devant l’autorité environnementale et les MRAE.
Ce projet de modification aurait dû être soumis à évaluation environnementale, étant susceptible d’entraîner des conséquences sur l’environnement.
La consultation de l’autorité environnementale et des MRAE, est une partie intégrante du processus d’évaluation environnementale (L122-1 III du code de l’environnement).
Ce projet est donc illégal et doit faire l’objet d’une évaluation environnemental.
Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) accueille favorablement ce projet de décret qui répond aux exigences d’indépendance des services.
En revanche, le SER estime que la disposition qui prévoit que « Lors de l’examen au cas par cas, le porteur de projet doit prendre en compte, le cas échéant, les résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement requises au titre d’autres législations applicables » (ajout à la fin du I du R122-3-1) n’est pas suffisamment précise et encadrée.
Le SER souhaite ainsi que des précisions soient apportées sur les points suivants :
- Le périmètre concerné par cette disposition : quels terrains sont précisément concernés ?
- La nature des « autres évaluations pertinentes » qui sont visées : s’agit-il de celles menées par le porteur de projet lui-même au titre d’une autre législation ou est-ce plus large ? Si d’autres études étaient visées, il conviendrait alors de se limiter à celles qui sont dans le domaine public afin d’éviter qu’un travail de recoupement entraîne des frais pour accéder à des études non publiques.
- La liste des « autres législations applicables » qui sont visées.
Enfin, le SER souligne que les MRAe, faute de moyens humains suffisants, émettent des avis souvent génériques sur les projets. Il conviendrait aussi de s’assurer que les MRAe soient destinataires des réponses des porteurs de projet.
La Société des grands projets souhaiterait que soit apportée une clarification sur l’obligation par le porteur de projet de prendre en compte les résultats d’autres évaluations dans le cadre d’une demande d’examen au cas par cas pour les raisons suivantes.
La page de présentation du projet de décret indique que :
« le projet de décret intègre deux autres dispositions prévoyant, d’une part, que le porteur de projet doit prendre en compte, le cas échéant, les résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement dans le cadre de la demande d’examen au cas par cas portant sur son projet ».
Cette indication laisse penser que le porteur de projet doit prendre en compte le résultat d’études d’impacts de projets ou d’évaluation environnementales de documents de planification sur le territoire concerné portés par d’autres maitres d’ouvrages ou personnes responsables.
Toutefois, l’article 2 du projet de décret modifiant l’article R122-3-1 du code de l’environnement dispose que :
« Le maître d’ouvrage tient compte, le cas échéant, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement requises au titre d’autres législations applicables »
Les termes suivants « requises au titre d’autres législations applicables » qui peuvent donner un autre sens que ce qui est indiqué dans la page de présentation.
En effet, le renvoi à d’autres législations applicables laisse penser :
• d’une part, qu’il s’agirait de résultats d’études non requis par la législation relative à l’évaluation environnementale ;
• d’autre part, qu’il s’agirait des législations applicables au projet concerné par la demande d’examen au cas par cas.
Or, il nous semble que seule la législation relative à l’autorisation environnementale prévoit une étude d’incidence environnementale (article R181-14 du code de l’environnement) et, qui plus est, pour les projets non soumis à étude d’impact.
Aussi, dans le cadre d’un examen au cas par cas d’un projet soumis à autorisation environnementale, le porteur de projet n’est pas encore en mesure de savoir s’il est soumis à étude d’impact ou à étude d’incidence environnementale, l’un excluant l’autre.
Il ne pourra donc pas prendre en compte dans le cadre de sa demande d’examen au cas par cas de tels résultats.
Le projet de décret ajoute une nouvelle obligation pour le maître d’ouvrage chargé de remplir des examens au cas par cas (« Le maître d’ouvrage tient compte, le cas échéant, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement requises au titre d’autres législations applicables »). La formulation de cette nouvelle obligation est source d’insécurité juridique pour le maître d’ouvrage qui n’a pas nécessairement une connaissance exhaustive, ni l’accès à l’ensemble des évaluations environnementales réalisées pour un projet. Afin de ne pas ralentir la mise en œuvre de projets pour la transition énergétique, il est proposé d’assouplir la rédaction (i.e. possibilité pour le MOA et non une obligation) et de l’encadrer (i.e. rester compatible avec des délais de traitement acceptables pour un maître d’ouvrage diligent).
Par ailleurs, en cas de transfert de dossier entre l’IGEDD et la MRAe, le projet de décret prévoit que le délai pour rendre l’avis court à compter de la date à laquelle l’AE, à qui il est transféré, reçoit le dossier. Cette modification pourrait provoquer un allongement des délais dans lesquels les avis de l’AE sont rendus, ce qui entraîne un risque fort de glissement de planning pour les projets, ainsi que pour les plans et programmes concernés (notamment les S3RENR), ce qui est contraire à l’objectif d’accélération de la transition énergétique et au développement des énergies renouvelables.
Veuillez trouver nos observations par article :
Article 3 : (122.6, II)
Le partage des attributions d’autorité environnementale entre l’Autorité Environnementale et les Missions Régionales d’Autorité Environnementale n’est pas clairement défini.
Actuellement, l’Autorité Environnementale peut, sur instruction ministérielle, retirer une compétence des Missions Régionales d’Autorité Environnementale pour la traiter elle-même.
Le nouveau texte étend ce pouvoir, permettant à l’Autorité Environnementale de dessaisir les Missions Régionales d’Autorité Environnementale de leurs compétences sans motivation ni critères définis. L’extension des prérogatives de l’Autorité Environnementale, permettant un contrôle accru sans exigences de motivation, pourrait déséquilibrer la représentation des intérêts environnementaux par rapport à d’autres intérêts des Maîtres d’Ouvrage (MOA). Bien que l’Autorité Environnementale soit principalement consultative, elle détient aussi un pouvoir décisionnel dans certains cas, accentuant cette dynamique.
Article 4 du décret :
Nous recommandons de proposer un échange avec l’Autorité Environnementale pour présenter le projet (contexte, particularités, aspects techniques). Cependant, cette recommandation se heurte souvent au refus de l’AE. Dans certains cas, l’AE a reconnu a posteriori que l’échange aurait été pertinent, même s’il a été initialement refusé.
Un tel dispositif serait bénéfique pour les porteurs de projet et pour l’AE, car il assurerait une meilleure compréhension des projets. En pratique, sur certains dossiers, l’AE a parfois indiqué après coup qu’un échange refusé aurait finalement été utile.
Toutefois, la rédaction proposée n’apporte pas de changement significatif : à ce jour, rien n’interdit au maître d’ouvrage de solliciter un échange sans garantie que l’AE accepte. Cet ajout formalise la possibilité d’un échange, offrant ainsi plus de confort aux AE qui pouvaient être réticentes pour des raisons de neutralité. Cependant, il est probable que cet ajout reste théorique et sans effets concrets pour les MOA.
De plus, la formule « avant que celle-ci n’ait élaboré son avis » est ambiguë. Elle peut être interprétée de manière variable, laissant à l’AE une marge de manœuvre pour refuser l’échange. Il serait plus approprié de préciser que l’échange doit avoir lieu dans les premières semaines post-saisine, période pendant laquelle l’avis de l’AE ne peut logiquement être élaboré.
Nous vous proposons la modification suivante :
L’article R. 122-7 du code de l’environnement est ainsi modifié :
« 1° Après le III, il est inséré un IV ainsi rédigé :
IV.- Le ou les maîtres d’ouvrage du projet peuvent solliciter un échange avec l’autorité environnementale avant que celle-ci n’ait rendu son avis. L’autorité environnementale peut refuser cet échange par décision motivée. Cet échange est toutefois accepté dès lors que la sollicitation du maître d’ouvrage intervient durant les trois semaines suivant la date de réception par l’autorité environnementale du dossier mentionné au premier alinéa du I et que ledit échange a pour objet d’assurer la présentation du projet et la bonne compréhension de ses enjeux.
2° Le IV devient le V ;
3° Au IV devenu V, les mots « des deuxièmes ou quatrièmes alinéas du 1° du I » sont remplacés par les mots « du II » et après les mots « la formation d’autorité environnementale » sont insérés les mots « ou la mission régionale d’autorité environnementale. »
La recherche de simplification et d’efficience est toujours absente avec des propositions qui alourdissent le processus existant et les délais des projets.
Défavorable : "Le maître d’ouvrage tient compte, le cas échéant, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement requises au titre d’autres législations applicables".
C’est une source d’insécurité juridique, car non claire et non réalisable (il n’est pas réaliste de consulter l’ensemble de la bibliographie des avis de l’AE). Le processus existant permet déjà d’avoir un échange avec les services compétents dans le cadre de réunions, d’un avis d’examen au cas par cas… pour cibler les enjeux et les attentes.
Défavorable : "le décret permet la possibilité pour le MOA de solliciter un échange avec l’Ae avant que celle-ci n’ait élaboré son avis".
Le processus existant permet déjà d’échanger avec l’Ae, notamment à l’occasion de la visite de terrain (que l’Ae demande avant émission de son avis sur une étude d’impact de projet). L’Ae dispose déjà d’un délai déjà contraint de 2 mois pour émettre son avis laissant peu de place à ces temps d’échanges supplémentaires.
La procédure d’autorisation environnementale est, par ailleurs, fortement perturbée dans son déroulement par les dispositions permettant des "demandes de compléments" (avec suspension de délai) lors de l’instruction.
Les sociétés SNCF Réseau et SNCF Gares & connexions souhaitent formuler les observations suivantes sur le projet de décret relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas.
ARTICLE 1er et ARTICLE 3
SNCF Réseau et SNCF Gares & connexions prennent acte que la formation d’autorité environnementale de l’iGEDD reste, pour l’ensemble de leurs projets de travaux, d’aménagement ou d’ouvrages, chargée de l’examen au cas par cas mentionnée au premier alinéa du IV de l’article L. 122-1 et demeure l’autorité environnementale mentionnée au V de l’article L. 122-1.
Elles s’en félicitent. Il apparaît effectivement important que l’ensemble des projets ferroviaires, de par leurs spécificités et de la nécessité de la cohérence du Réseau Ferré National, soient instruits par une unique autorité.
ARTICLE 2
Les dispositions visant à ajouter à l’article R.122-3-1 du code de l’environnement relatif à l’examen au cas par cas une mention selon laquelle « Le maître d’ouvrage tient compte, le cas échéant, des résultats disponibles d’autres évaluations pertinentes des incidences sur l’environnement requises au titre d’autres législations applicables. » apparaissent peu claires, et donc source d’insécurité juridique pour les MOA.
En effet, à la lecture de ces dispositions, il n’est pas possible de savoir si le MOA doit tenir compte de ces résultats en tant que sources d’études bibliographiques lui permettant d’établir son état initial, ou s’il est tenu d’analyser les éventuelles incidences cumulées des projets ou plans/programmes qui ont donné lieu à ces évaluations avec son projet. Une telle obligation aboutirait à exiger du MOA d’inclure, à un stade prématuré, une analyse aboutie des effets cumulés avec des projets d’autres maîtres d’ouvrages, pour lesquels une évaluation des incidences aurait déjà été réalisée.
Cette orientation se révèlerait particulièrement difficile et lourde à mettre en œuvre en pratique (quelles évaluations à prendre en compte et où les obtenir), pour un intérêt faible quant à l’appréciation des risques d’incidences d’un projet présenté dans le cadre d’une demande d’examen au cas par cas et dont l’actualité de l’information resterait de très faible durée.
Compte tenu de ce qui précède, il nous semble nécessaire de supprimer ces dispositions.
ARTICLE 4
SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions s’étonnent de l’apport du décret sur la possibilité pour le MOA de solliciter un échange avec l’Ae avant que celle-ci n’ait élaboré son avis : d’abord parce qu’il est déjà possible d’échanger avec l’Ae, notamment à l’occasion de la visite de terrain que l’Ae-IGEDD demande avant émission de son avis sur une étude d’impact de projet ; ensuite parce que l’Ae dispose d’un délai déjà contraint de 2 mois pour émettre son avis laissant peu de place à ces temps d’échanges supplémentaires, alors que la procédure d’autorisation environnementale est, par ailleurs, fortement perturbée dans son déroulement par la nouvelle procédure de consultation introduite par la loi Industrie Verte.
France Nature Environnement déplore l’occasion ratée que représente ce décret.
Etape clé de l’évaluation environnementale, l’étude d’impact permet de décrire et d’apprécier les incidences sur la population et la santé humaine ; la biodiversité, les terres, le sol, l’eau, l’air et le climat ; les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage… et surtout d’apprécier les propositions permettant d’éviter, de réduire, voire de compenser ces atteintes. Les études d’impact constituent donc le socle des débats environnementaux sur les projets, programmes ou plans. Les informations qu’elle fournit sont donc essentielles.
L’évaluation environnementale est encore trop souvent perçue comme une contrainte procédurale inutile par les acteurs alors qu’elle est indispensable pour élaborer des projets, plans et programmes vertueux, et pour aboutir à une décision finale qui respecte l’environnement, d’autant que l’évaluation environnementale est également la clé d’entrée des décisions administratives dans le processus de la participation du public qui permet d’améliorer l’acceptabilité desdites décisions.
A la lumière de ces simples rappels, la décision de soumettre un projet ou un plan à évaluation environnementale est donc cruciale.
Malheureusement, pour 80 % des décisions relatives aux projets, cette mission est confiée à des préfets de département ou de région chargés de concilier les politiques publiques sur le territoire et donc d’arbitrer entre des missions souvent contradictoires. La même autorité doit trop ainsi réaliser une analyse critique en fonction des enjeux environnementaux, puis décider d’autoriser ou non un projet en tenant compte des aspects économiques et sociaux : force est de constater, notamment à la lumière des nombreux contentieux engagés et jugés, que l’économie pèse toujours plus lourd que la nature et la santé.
Dans certains cas, comme par exemple pour les ouvrages de protection contre les risques naturels, le préfet de département possède, en plus du rôle de décisionnaire et d’autorité environnementale, celui de maître d’ouvrage ou d’assistant au maître d’ouvrage. L’État peut donc tout à la fois proposer un projet en tant que maître d’ouvrage et le valider en tant que décisionnaire. Comment croire à l’impartialité de sa décision lorsqu’il doit décider, en fonction des enjeux et des incidences probables du projet, que le projet doit être soumis à évaluation environnementale ?
Bien souvent dans les faits, quand le préfet est décisionnaire, l’économie prévaut, au détriment de la santé humaine et de l’environnement. Les statistiques sur les procédures d’enregistrement, notamment en matière d’ICPE agricoles le confirment d’ailleurs sans détour : le simple fait de confier à l’autorité préfectorale la décision au cas par cas de soumettre un projet à évaluation environnementale suffit à fragiliser juridiquement des projets et à aggraver les difficultés financières des opérateurs économiques.
Depuis la loi de 2019 qui a confié aux préfets la compétence de déterminer si une évaluation environnementale est nécessaire pour les projets qui sont soumis au « cas par cas » à cette obligation, le nombre de projets soumis à évaluation a diminué.
La Commission Européenne a d’ailleurs mis la France en demeure de mettre fin au risque de conflit d’intérêt en la matière.
Il est donc parfaitement incompréhensible que ce décret, présenté comme visant à écarter toute impartialité apparente du processus dans les cas où le ministre en charge de l’environnement intervenait, n’ait pas été l’occasion de se mettre également en conformité avec le droit européen s’agissant des projets soumis à décision déconcentrée.
Proposition de FNE :
- Confier à l’Autorité Environnementale du CGEDD ou aux Missions Régionales de l’Autorité Environnementale (selon la taille du projet concerné) la mission de déterminer si une évaluation environnementale est nécessaire pour l’ensemble des projets soumis à évaluation environnementale « au cas par cas » pour que la décision soit prise en toute indépendance et permettre que soit enfin close la procédure pré-contentieuse engagée contre la France par la Commission Européenne.
La Fédération Nationale des Travaux Publics est engagée depuis de nombreuses années pour une meilleure prise en compte des incidences écologiques des différents projets d’infrastructures.
Le projet de décret relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas va dans le bon sens, car il permet d’harmoniser les procédures et d’avoir un interlocuteur unique : l’IGEDD. Ces dispositions sont positives, car elles permettent de consacrer une phase préalable et indispensable de discussion entre l’autorité environnementale et le maître d’ouvrage.
Néanmoins, si cette phase de discussion est une avancée importante pour l’acceptation des projets notamment, il faudra rester vigilant à ce que cette phase ne retarde pas la formulation de l’avis de l’autorité, risque majeur dans un contexte de réindustrialisation du Pays.
Il serait nécessaire de préciser d’une part, que le temps d’échange puisse avoir lieu en amont du dépôt du projet, et d’autre part, que ces discussions puissent aussi être engagées sur initiative de l’autorité environnementale.
Dès lors, nous proposons de modifier le décret comme suit :
Proposition de modification :
« L’article R. 122-7 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le III, il est inséré un IV ainsi rédigé :
« IV.- Le ou les maîtres d’ouvrage du projet ou l’autorité environnementale peuvent engager solliciter un échange ensemble avec l’autorité environnementale avant que celle-ci n’ait élaboré son avis.
Le ou les maîtres d’ouvrage peuvent également solliciter un échange avant que celui-ci ne dépose son projet » ;
2° Le IV devient le V ;
3° Au IV devenu V, les mots « des deuxième ou quatrième alinéas du 1° du I » sont remplacés par les mots « du II » et après les mots « la formation d’autorité environnementale » sont insérés les mots « ou la mission régionale d’autorité environnementale ». »
- soit un droit de suite en lui permettant de la MRAE dans un délai à définir, à compter de la publication officielle de la réponse du porteur de projet, afin d’avoir son appréciation technique sur cette réponse
- soit un droit de saisine plus large, afin de lui soumettre le cas échéant, des éléments ignorés ou négligés par les porteurs de projet