Projet de décret fixant les règles et procédures applicables à la destruction de haies
Consultation du 25/11/2025 au 16/12/2025 - 2779 contributions
Ce projet de décret est pris en application de la loi n°2025-268 du 24 mars 2025 d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations futures (dite loi « OSARGA »). L’article 37 de cette loi a introduit dans le code de l’environnement un dispositif de protection et de gestion durable des haies codifié aux articles L. 412-21 à L. 412-27.
Afin de renforcer la préservation des haies et de maintenir le linéaire planté, l’objectif de ce dispositif est de simplifier et unifier les procédures administratives applicables aux projets de destruction de haies, en créant une déclaration unique préalable (ou, le cas échéant, une autorisation unique), avec une compensation systématique et au moins équivalente.
Commentaires
L’INRAE a mené des études qui prouvent que pour diminuer significativement l’usage des pesticides il faut des haies en alternance avec des bandes enherbées tous les 100 m pour accueillir les oiseaux, serpents, batraciens, insectes… toute cette faune et microfaune d’espèces prédatrices des ravageurs des cultures.
https://www.inrae.fr/actualites/comment-diversite-vegetale-peut-nous-aider-reduire-pesticides
Bien sûr il faut replanter des haies mais Il faut d’abord impérativement préserver les haies existantes.
Les haies les mieux préservées des usages agricoles adjacents, souvent les plus larges et les plus hautes, sont les plus riches et doivent être conservées prioritairement. Il existe en effet une relation entre l’ancienneté d’une haie et sa biodiversité : une nouvelle haie n’offrira pas avant longtemps la richesse en espèces d’une haie ancienne détruite ailleurs ; il faudra plusieurs siècles, si les espèces n’ont pas disparu entre-temps.
Je suis donc totalement défavorable à ce décret qui facilite la destruction des haies.
Ce texte, en l’état, est en contradiction flagrante avec les engagements de la France en matière de biodiversité, de lutte contre le dérèglement climatique et de résilience territoriale.
**1. Incompatibilité avec les engagements nationaux et internationaux**
La France s’est engagée, via les accords de Paris (COP21) et les rapports du GIEC, à renforcer la séquestration du carbone et à protéger la biodiversité. Or, les haies jouent un rôle clé dans ces deux domaines : elles stockent du CO₂, régulent le climat local, protègent les sols et abritent une biodiversité essentielle. L’INRAE et de nombreuses études scientifiques ont démontré leur importance pour la qualité de l’eau, la prévention de l’érosion, la gestion de l’hydrologie de surface et même la sécurité alimentaire (par exemple, la prévention de la pénurie de phosphore).
**2. Illusion de la compensation**
Une haie mature détruite ne peut être compensée qu’après plusieurs décennies, si tant est que les nouvelles plantations survivent et remplissent les mêmes fonctions écosystémiques. Aujourd’hui, la France perd environ 25 000 km de haies par an, pour seulement 7 000 km de nouvelles plantations, dont une grande partie ne parvient pas à maturité. Ce décret aggraverait encore ce déséquilibre, au mépris des Plans Climat-Air-Énergie Territoriaux (PCAET) et des objectifs de neutralité carbone.
**3. Menace pour la résilience territoriale et la santé globale**
Les haies sont un rempart contre les effets du dérèglement climatique : elles limitent l’érosion, protègent les cultures du vent et du gel, et contribuent à la filière bois-énergie, source de revenus complémentaires pour les agriculteurs. Leur destruction massive affaiblit la résilience des territoires et va à l’encontre du concept de « One Health », reconnu par la France à l’ONU, qui lie santé humaine, animale et environnementale.
**4. Un signal politique désastreux**
Ce projet envoie un message catastrophique : celui d’une administration prête à sacrifier le bien commun et la responsabilité environnementale sur l’autel de la simplification administrative. Il est en totale contradiction avec les attentes des scientifiques, des citoyens et des collectivités locales engagées dans la transition écologique.
**Conclusion**
Je demande donc le retrait pur et simple de ce projet de décret, et l’élaboration d’un cadre réglementaire qui protège et valorise les haies, conformément aux engagements de la France et aux impératifs écologiques. La crise climatique et l’effondrement de la biodiversité ne souffrent plus de demi-mesures ni de reculs.
Ce projet de décret est à contre-courant du consensus scientifique, et surtout de notre besoin d’avoir une vision long-terme de la Santé. Santé avec un grand S, car la destruction des haies entraine des impacts négatifs sur les sols, l’érosion, la faune, la flore, les éco-systèmes et, au bout de la chaîne, sur notre santé.
Je m’oppose donc, comme la quasi-totalité des scientifiques et autres membres de la société civile, à ce décret indigne d’une nation réellement désireuse de prendre la crise climatique et environnementale à bras-le-corps.