Projet de décret portant diverses dispositions relatives aux mesures de protection des espèces animales non domestiques et végétales non cultivées (Consultation terminée)
La présente consultation, fondée sur l’article L. 123-19-1 du code de l’environnement, porte sur un projet de décret portant diverses dispositions relatives aux mesures de protection des espèces animales non domestiques et végétales non cultivées.
Consultation du 24/09/2025 au 19/10/2025 - 32190 contributions
Le contexte :
1) Au niveau international et de l’Union européenne :
La Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe (Convention de Berne) du 19 septembre 1979 a récemment été modifiée le 6 décembre 2024 afin de reclasser une espèce, le loup (Canis lupus), relevant du statut d’espèce de faune strictement protégée (annexe II) au statut d’espèce protégée (annexe III).
Cette modification de statut a également eu lieu au sein de la Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (Directive Habitats Faune Flore) le 17 juin 2025 avec un passage de la même espèce de l’annexe IV « espèces animales et végétales (…) nécessitant une protection stricte » à l’annexe V « espèces animales et végétales (…) dont le prélèvement dans la nature et l’exploitation sont susceptibles de faire l’objet de mesures de gestion »).
2) Au niveau national :
Le 1° du I de l’article L. 411-1 du code de l’environnement, qui est relatif aux espèces protégées, prévoit que lorsqu’un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l’écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d’intérêt géologique, d’habitats naturels, d’espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits :
« La destruction ou l’enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d’animaux de ces espèces ou, qu’ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ».
L’article L. 411-2 du code de l’environnement dispose qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles sont notamment fixées « les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l’article L. 411-1 ».
Or, à ce jour, l’article R. 411-3 du code de l’environnement, pris pour l’application de l’article L. 411-2 de ce même code, se contente de confier aux ministres chargés de la protection de la nature et de l’agriculture la compétence pour préciser, pour chaque espèce qu’ils déterminent, la « nature » des interdictions visées au 1°) de l’article L. 411-1 qui trouvent à s’appliquer à celles-ci.
En effet, l’article R. 411-3 du code de l’environnement précise que, pour chaque espèce, les arrêtés interministériels prévus à l’article R. 411-1 de ce code (notamment les espèces animales non domestiques faisant l’objet des interdictions définies par l’article L. 411-1 sont établies par arrêté conjoint du ministre chargé de la protection de la nature et soit du ministre chargé de l’agriculture) précisent :
- 1° La nature des interdictions mentionnées à l’article L. 411-1 qui sont applicables ;
- 2° La durée de ces interdictions, les parties du territoire et les périodes de l’année où elles s’appliquent.
L’article R. 411-3 du code de l’environnement ne prévoit actuellement pas les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l’article L. 411-1 de ce code et c’est pourquoi il est proposé de mettre en cohérence la partie législative et réglementaire du code de l’environnement.
Les objectifs :
La modification réglementaire envisagée vise à mettre en cohérence les articles L. 411-1, L. 411-2 et R. 411-3 du code de l’environnement et à permettre de procéder en droit français aux modifications du statut de l’espèce et de définir les règles de sa gestion.
Le dispositif envisagé :
Le projet de décret vise à modifier l’article R. 411-3 du code de l’environnement afin d’y ajouter que les arrêtés interministériels prévus à l’article R. 411-1 précisent, en plus de la « nature » des interdictions mentionnées à l’article L. 411-1, les « modalités de mise en œuvre » de ces interdictions, dans le but « d’assurer un état de conservation favorable des populations des espèces concernées et permettre leur coexistence avec les activités économiques existantes. ».
Cette modification permettra d’adapter le cadre juridique en vigueur applicable au loup aux évolutions récentes de la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe (Convention de Berne) du 19 septembre 1979 et de la Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.
Cette modification permettra, au-delà du seul cas du loup, en cas de changement d’annexe d’une espèce protégée, de pouvoir adapter la réglementation nationale.
S’agissant plus particulièrement du loup, ces prescriptions feront l’objet d’un arrêté cadre interministériel fixant les nouvelles modalités de gestion de l’espèce dans le cadre de son reclassement. Sa destruction restera mise en œuvre dans le cadre de la défense des troupeaux. Ce texte donnera lieu à une nouvelle consultation du public.
Consultations obligatoires :
Le projet de décret présentant un impact sur l’environnement, il doit être soumis à une consultation publique conformément aux dispositions de l’article L. 123-19-1 du code de l’environnement.
La consultation du Conseil national de protection de la nature (CNPN) est facultative sur ce projet de décret, elle n’est pas requise conformément aux dispositions de l’article L. 134-2 du code de l’environnement.
En revanche, conformément à l’article R. 411-2 du code de l’environnement, les arrêtés interministériels seront pris après avis du Conseil national de la protection de la nature.
Le projet de décret doit également être soumis à l’avis du Conseil d’État.
Merci de préciser, en intitulé de vos observations, votre positionnement sur le texte (FAVORABLE ou DÉFAVORABLE).
La consultation initialement ouverte du 24 septembre au 14 octobre est prolongée jusqu’au 19 octobre 2025 inclus en raison de problèmes techniques rencontrés lors du dépôt des contributions publiques sur la plate-forme.
Commentaires
Le loup n’est pas un danger : il est un régulateur naturel essentiel à l’équilibre de nos territoires.
Son régime alimentaire est composé à plus de 70 % d’ongulés sauvages — cerfs, chevreuils, sangliers — et non de bétail. Là où les troupeaux sont protégés, la part de proies domestiques reste marginale.
Dans nos campagnes, les populations d’ongulés ont explosé au cours des dernières décennies. Ce déséquilibre provoque des dégâts importants sur les forêts, les prairies et les cultures. En 2023, l’État a déjà débloqué 20 millions d’euros pour participer au financement des dégâts causés par le grand gibier sur les cultures, et a promis 60 millions supplémentaires sur plusieurs années pour accompagner la régulation.
Dans le contexte actuel, où la chasse ne concerne plus qu’environ 1,5 % de la population française, il serait difficilement compréhensible — et très mal perçu par le grand public — de continuer à abattre des loups alors qu’un tel financement vient d’être accordé pour la régulation du gibier.
Le loup accomplit ce travail de manière naturelle, continue et complémentaire, sans bloquer les espaces, sans danger pour l’homme et sans coût supplémentaire pour la collectivité. Il agit jour et nuit, même dans les zones où la chasse ne peut intervenir, et contribue à une gestion équilibrée des écosystèmes.
Là où il est présent, les populations de sangliers et de cervidés se stabilisent ; les cultures sont moins ravagées et les collisions routières liées à la faune diminuent.
Ces effets profitent directement aux agriculteurs, dont les champs fournissent aussi les céréales et fourrages nécessaires à l’alimentation hivernale des troupeaux.
Ainsi, en limitant les dégâts de gibier sur les récoltes, le loup protège indirectement les éleveurs eux-mêmes : il préserve ce que leurs animaux mangent.
Contrairement aux idées reçues, le loup ne choisit pas le mouton : il privilégie le gibier et ne s’attaque aux animaux domestiques que s’ils sont sans protection. Les élevages équipés de chiens de garde, de clôtures et d’une surveillance adaptée enregistrent une forte baisse de prédation.
De plus, sa présence éloigne les chiens errants et opportunistes, responsables d’un nombre non négligeable d’attaques sur les troupeaux. Ces faits sont documentés, mais trop souvent ignorés.
Il faut aussi rappeler que certaines attaques attribuées au loup proviennent en réalité de chiens de chasse ou de voisinage. C’est pourquoi les constats officiels doivent toujours distinguer clairement ce qui est certain, probable ou indéterminé.
Les tirs de loups sont souvent contre-productifs : ils désorganisent les meutes, favorisent la dispersion des individus isolés et peuvent même augmenter la prédation sur les troupeaux. Plusieurs études ont montré que lorsque des femelles dominantes — qui régulent naturellement la reproduction — sont tuées, la structure sociale s’effondre, les jeunes se dispersent et la prédation devient plus erratique. Les tirs ne résolvent donc pas le problème, ils le déplacent.
Le loup apporte d’autres bénéfices encore : il contribue à la santé écologique des milieux en éliminant les animaux malades ou faibles, freinant ainsi la propagation de maladies (comme la tuberculose bovine ou la maladie débilitante des cervidés).
Il nourrit les charognards et recycle la matière organique ; il favorise la régénération naturelle des forêts et soutient la diversité biologique.
À la différence des chasses humaines, le loup ne ferme pas les chemins, ne bloque pas les promeneurs et ne crée pas d’incidents : les statistiques montrent qu’il y a chaque année beaucoup moins d’accidents liés aux loups qu’à la chasse.
Sa présence favorise la randonnée, les sports de nature et même un certain tourisme rural, qui redonnent vie à des zones de montagne ou de campagne souvent en difficulté. Ces activités concernent une part bien plus importante de la population que la chasse, et participent activement à la vitalité économique et culturelle des territoires ruraux.
Selon plusieurs sondages récents, une large majorité de Français se déclarent favorables à la préservation de la biodiversité, à la protection du loup et au développement d’activités de nature non létales. Cet électorat, aujourd’hui majoritaire, incarne une attente claire : celle d’une cohabitation apaisée et moderne avec le vivant.
En maintenant la biodiversité et l’attractivité de ces paysages, le loup soutient aussi indirectement les circuits courts et les ventes à la ferme.
Entretenir la peur du loup, au contraire, freine ces dynamiques positives et dessert ceux qui vivent déjà difficilement dans les territoires ruraux.
Refuser le loup, ce serait renoncer à un équilibre écologique et économique dont dépendent à la fois les agriculteurs, les éleveurs, les forêts et la biodiversité tout entière.
L’État doit reconnaître son rôle de régulateur, renforcer la prévention auprès des élevages, améliorer la transparence des constats et considérer le loup non comme un problème, mais comme une solution naturelle et durable.
Le loup ne divise pas : il relie.
Il relie les forêts aux plaines, la faune sauvage à l’agriculture, et l’humain à la logique du vivant.
Il est temps de cesser de le craindre : il faut enfin le comprendre.