Projet d’arrêté précisant les conditions d’exercice de la pêche de loisir dans le domaine maritime
Consultation du 11/09/2025 au 02/10/2025 - 1289 contributions
Le règlement (UE) 2023/2842 relatif au contrôle des pêches prévoit une évolution majeure avec l’enregistrement obligatoire dès le 10 janvier 2026 des pêcheurs de loisir dans le domaine maritime et de la déclaration de certaines captures d’espèces plus sensibles, via un système électronique.
La meilleure connaissance du secteur de la pêche de loisir en mer est un enjeu essentiel, qu’il s’agisse de documenter la population des pêcheurs concernés et les prélèvements des stocks de poissons. L’objectif est d’accroître la gestion scientifique des espèces afin de renforcer l’exploitation durable des ressources.
Dans ce contexte, une plateforme électronique actuellement en cours de développement par la Commission européenne RECFishing sera mise en place pour dématérialiser la procédure. La version finale de cette application sera disponible en décembre 2025 (ne correspond à la version actuellement disponible). Cette plateforme a également été choisie par neuf autres États membres de l’UE et permettra donc d’être au rendez-vous de janvier 2026. L’application fonctionnera même en l’absence de réseau et sera facile d’utilisation et ergonomique. Elle offrira différents services aux usagers comme la reconnaissance des espèces capturées sur photo.
L’article 55 du règlement (UE) 2023/2842 impose aux États membres de l’UE de disposer d’un système électronique pour l’enregistrement annuel des pêcheurs récréatifs et la déclaration de leurs captures de façon journalière, quel que soit leur mode de pêche, et selon le calendrier suivant :
a) A compter du 10 janvier 2026, pour les pêcheurs de 16 ans et plus souhaitant capturer des espèces soumises à des mesures des gestion européennes, comme une limitation journalière de capture. L’actuelle version de la liste des espèces concernées est disponible en annexe de l’arrêté proposé à la présente consultation et dans l’encadré ci-dessous.
b) A compter du 1er janvier 2030, pour les pêcheurs de 16 ans et plus souhaitant capturer les espèces, les stocks ou les groupes de stocks pour lesquels les possibilités de pêche sont fixées par l’Union ou qui, en pêche professionnelle, sont couverts par un plan pluriannuel ou qui sont soumis à l’obligation de débarquement, et pour lesquels les avis scientifiques indiquent que la pêche récréative a un impact significatif sur la mortalité par pêche. La liste de ces espèces sera fixée en 2029.
La liste des espèces concernées par cette réglementation dépend des mesures mises en œuvre au niveau européen et sera donc de nature à s’étoffer, elle sera pour 2026, à ce stade, constituée de :
- Lieu jaune (Pollachius pollachius) : zone CIEM 7 et 8 ;
- Bar (Dicentrarchus labrax) : zone CIEM 7 et 8 ;
- Thon rouge (Thunnus thynnus) : Atlantique à l’est de la longitude 45° Ouest, Manche et mer Méditerranée ;
- Dorade rose (Pagellus bogaraveo) : zone CIEM 7 et 8 et en mer Méditerranée ;
- Dorade coryphène (Coryphaena hippurus) : en mer Méditerranée.
L’application RECFishing permettra aux pêcheurs de sélectionner et déclarer les captures des espèces par leur nom commun (et non par le code FAO).
Les pêcheurs de loisir en mer ne ciblant pas les espèces listées ne seront pas concernés par cette obligation sur la façade Atlantique, dans la Manche et dans les régions ultrapériphériques (RUP). Cette liste pourra évoluer en fonction de la réglementation des stocks halieutiques au niveau européen.
Par ailleurs, la résolution de la Commission générale des Pêches pour la Méditerranée (CGPM) n°CGPM45/2022/12 dispose que « d’ici au 1er janvier 2025, les parties contractantes mettent en place et tiennent à jour un programme d’autorisation ou d’enregistrement obligatoire couvrant tous les pêcheurs récréatifs." Cette disposition s’applique aux pêcheurs récréatifs à pied s’ils ciblent les espèces concernées. La façade méditerranéenne est donc dans l’obligation d’enregistrer tous ses pêcheurs de loisir, sauf pêcheurs à pied non concernés, dès le 1er janvier 2026 contrairement aux autres façades.
Le groupe de travail « pêche de loisir maritime » du Conseil National de la Mer et des Littoraux (CNML) a été constitué le 14 décembre 2023 à l’initiative de la DGAMPA. Il est coprésidé par les sénateurs Alain Cadec et Pierre Medevielle, constitué des services de l’Etat, de représentants de la pêche de loisir (notamment la Confédération « Mer et Liberté »), des représentants industriels de la pêche de loisir (GIFAP), de l’Ifremer, de l’OFB, d’ONG, des régions et collectivités, ainsi que du CNPMEM. A sa création, ce GT a été consulté sur la mise en œuvre de l’enregistrement des pêcheurs, ainsi que sur la déclaration de leurs captures tel que prévu par l’article 55 du règlement (UE) n° 2023/2842. Ce dernier a eu l’occasion de se prononcer sur l’utilisation de RECfishing ainsi que sur les présentes dispositions de cet arrêté.
Comme chaque année, un arrêté spécifique précisera, en 2026, l’organisation des campagnes de pêches de thon rouge loisir.
Commentaires
REPONSE A LA CONSULTATION PUBLIQUE.
Christian CHERVALIER FFPM.
La proposition d’enregistrement des pêcheurs est une bonne chose tant que celle-ci reste dans l’objectif premier de la reconnaissance d’un pêcheur responsable qui s’enregistre volontairement. Le but étant de connaître le nombre que représentent les pêcheurs de loisir, pour que leur parole soit entendu et que soit reconnu le poids économique qu’ils représentent.
• Débuter un arrêté en employant « l’enregistrement obligatoire » ne pourra que freiner ou du moins rebuter certains. Une obligation de plus alors que déjà, de nombreux pêcheurs ont vendu ou détruit leur bateau, car ils se sentaient privés de liberté alors qu’ils pratiquent une pêche qui porte le nom de loisir. L’obligation doit-être retiré de cet arrêté.
La plateforme électronique est un système auquel aujourd’hui, nous ne pouvons échapper.
Cependant à la lecture de « L’application fonctionnera même en l’absence de réseau et sera facile d’utilisation et ergonomique. » Cela laisse sous-entendre que dès la prise d’une espèce soumise à des mesures de gestion européennes, elle devra être enregistrée et déclarée.
• Si c’est le cas, ce sera une obligation de plus, il faut savoir que dans les aires marines protégées en Méditerranée cette obligation a été levée, les pêcheurs peuvent remplir leur déclaration en arrivant au port ou à leur domicile. Pourquoi ne pas se référer à des systèmes qui existent et qui ont permis de retrouver une certaine sérénité ?
Dans la liste émise dans ce projet d’arrêté, le Thon rouge (Thunnus thynnus) est cité, bien que l’espèce soit reconnue en forte progression.
D’après l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), son statut de conservation est « Préoccupation mineure », la question se pose pour sa présence dans cette liste, le thon rouge est une espèce très suivie, les contrôles sont très fréquents.
Les pêcheurs n’étant pas tous familiarisés à la pratique de la saisie par ordinateur, la déclaration de capture pour le thon rouge doit se faire dans les 48h au minimum.
Christian CHERVALIER FFPM
Je salue l’esprit général du projet qui s’inscrit dans une démarche qui va permettre la vérité de l’impact de la pêche récréative sur la ressource.
Il est à noter que le pêcheur de loisir ne cible pas uniquement une espèce et que des prises accidentelles de bar ou lieu jaune peuvent se faire et il est donc nécessaire que dans ce cas précis tous les pêcheurs de loisir qu’ils soient en méditerranée, Atlantique ou manche puissent se déclarer. Ils pourraient ainsi bénéficier des informations mises à leurs disposition par l’application.
Cependant, j’attire votre attention sur les modalités de mise en œuvre qui, en l’état, risquent de fragiliser l’adhésion des pêcheurs récréatifs et de compliquer la réussite du dispositif.
1. Enregistrement des pêcheurs
L’enregistrement du pêcheur est un préalable à la déclaration des captures et il ne faut pas que cela devienne une contrainte. Il faut donc une fois par an les aider à comprendre la réglementation en posant quelques questions sur leur pratique mais aussi donner un accès à l’information nationale, régionale et même locale.
1. Déclaration des captures
La volonté de mieux connaître les prélèvements est légitime. Néanmoins, l’exigence de déclarer les captures le jour même, avec des informations détaillées (poids vif, codes FAO, clé taille-poids), paraît disproportionnée pour des pêcheurs amateurs. Une simplification des formats (nom commun, taille (l’application informatique pourrait calculer le poids et donner automatiquement le code FAO) et un délai plus raisonnable (par exemple une semaine comme pour le Thon) faciliteraient une déclaration sincère et efficace, surtout pour des pêcheurs devant passer par l’aide d’une tierce personne. Ce serait ignorer l’existence de nombreux pêcheurs âgés ou non, de niveaux sociaux différents en délicatesse avec l’informatique. La pêche doit rester accessible à tous. C’est une activité populaire.
Par ailleurs il est nécessaire de simplifier la mise en œuvre pour la pêche sous-marine.
2. Marquage des engins
L’identification des engins dormants est justifiée pour éviter les confusions. Toutefois, les normes (taille, matériau, fixation des étiquettes) entraînent des contraintes matérielles et financières superfétatoires. Soit l’administration fournit des kits de marquage, soit on reste sur le marquage unique de la bouée en surface avec son immatriculation.
3. Gouvernance et suivi
Je demande que la mise en œuvre de ce dispositif soit accompagnée d’une véritable concertation avec les fédérations des pêcheurs de loisir. Cela garantirait une meilleure appropriation, une pédagogie adaptée et une remontée d’informations fiables au bénéfice de la ressource.
En conclusion j’appelle à une simplification des modalités pratiques d’un projet nécessaire pour quantifier le poids réel de la pêche récréative, sans quoi le dispositif va décourager les pratiquants, générer des non-déclarations et donc de compromettre l’objectif même de collecte de données fiables tout en ressemblant à un hyper contrôle de Bruxelles et de l’Etat. Sur le plan politique ce serait désastreux pour les millions de votants que représente la pêche de loisir.
Cordialement
Didier Le Quellec
Bonjour,
Cela est une bonne chose, mais pourquoi ne pas proposer un quota de déclaration de prises par mois (au lieu d’un système journalier). Cela permettrait de faire des sorties en mer plus qualitatives pour les pêcheurs, en redonnant un intérêt aux navigations.
Il serait souhaitable de mieux contrôler les débarques annexes des bolincheurs et de limiter les pêches dans les petits fonds (en dessous de 12mètres….ou moins…..)
Il est très regrettable de voir des pêcheurs de loisir sous prétexte de pêches récréatives ou de loisir pratiquer le "no kill" , "s’amuser " avec des poissons, puis les rejeter en grands nombres après que ces animaux aient été blessés et donc voués à une mort certaine…. (remises à l’eau de bars saignants, remises à l’eau de lieus avec l’estomac sorti par la bouche… Tout ceci en espérant avoir toujours de plus grosses prises…)
Je soussigné(e) Leyret Thierry, membre du COPERE, émets un avis défavorable sur le projet d’arrêté soumis à consultation pour les différentes raisons suivantes :
1. Une application imposée avant d’être finalisée
Le projet rend obligatoire l’usage de RECFISHING dès janvier 2026, alors que l’outil ne sera finalisé qu’en décembre 2025. Il n’est donné dans la présentation du projet aucune description de l’application permettant aux citoyens de formuler un avis éclairé, ni de délai raisonnable pour s’y préparer. Cela viole le principe de sécurité juridique et de loyauté de la consultation publique.
2. Une confusion avec l’application CatchMachine
En Méditerranée, l’articulation entre RECFISHING et CatchMachine reste floue. Les deux applications semblent non interopérables, ce qui risque d’imposer une double déclaration. Cette différence de traitement entre pêcheurs, selon les zones, est contraire au principe d’égalité.
3. Une disparité des seuils d’âge non justifiée
L’arrêté fixe l’obligation de déclaration à partir de 16 ans, alors que CatchMachine impose déjà cette contrainte dès 12 ans (Golfe du Lion, Calanques) ou 15 ans (Cap Corse). Cette incohérence territoriale porte atteinte à la clarté de la norme et aux droits des jeunes pêcheurs, protégés par la Convention internationale des droits de l’enfant (art. 31).
4. Une absence de transparence et de représentativité
Le texte se fonde sur l’avis du CNML du 14 décembre 2023, dont les conclusions ne sont ni publiées ni vérifiables. La composition de ce groupe de travail est déséquilibrée. La confédération « Mer et Liberté », désignée comme représentante des pêcheurs récréatifs, n’a pas la compétence ni la légitimité pour représenter l’ensemble des pêcheurs récréatifs (indépendants, associatifs, professionnels), contrairement au COPERE, à l’ADIC et au SMGPF. Cela constitue un vice substantiel.
5. Un contexte contentieux ignoré
L’administration maintient l’imposition d’applications de déclaration obligatoire alors que le recours du SMGPF contre CatchMachine est toujours pendant devant le juge administratif.
6. Une exclusion des citoyens non-connectés
Le projet ne prévoit aucune alternative pour les pêcheurs récréatifs ne disposant pas d’un moyen informatique pour se déclarer, ni pour ceux qui n’ont pas les connaissances nécessaires pour y parvenir, principalement parmi les plus anciens. Cette absence de dispositif papier constitue une rupture d’égalité et un frein disproportionné à l’accès à un loisir que certains auront pratiqué toute leur vie.
Il conviendrait de prévoir un formulaire papier téléchargeable, disponible en mairie ou auprès des services compétents, permettant d’obtenir une autorisation de pêche et de déclarer ses captures.
La Commission générale des pêches pour la Méditerranée défend explicitement ce principe d’égalité dans ses recommandations relatives à l’enregistrement de tous les pêcheurs. Il en va de même pour la Politique commune de la pêche, qui n’exclut aucune tranche de la société de ses dispositifs de gestion.
7. Un frein à la transmission et au développement du loisir pêche
La fixation d’un âge minimal de déclaration à 16 ans, sans explication claire, risque de constituer un frein à la pratique de la pêche pour les plus jeunes. Elle introduit une complexité administrative inutile qui pourrait décourager des enfants et adolescents de pratiquer une activité de plein air pourtant essentielle pour l’éducation à la nature et à l’environnement.
En outre, cette contrainte menace la transmission des savoir-faire et des traditions halieutiques, déjà fragilisée en eau douce.
Le texte reste également silencieux sur la situation des moniteurs guides de pêche encadrant les débutants. Ces pêcheurs en herbe devront-ils se déclarer avant même d’avoir découvert l’activité et savoir s’ils poursuivront? Une incertitude qui pourrait dissuader nombre de curieux ou de pratiquants occasionnels de franchir le pas, alors même que la pêche de loisir doit rester une activité accessible et ouverte à l’initiation, comme le sont toutes les autres activités sportives ou culturelles.
En conclusion :
Ce projet d’arrêté repose sur une mise en place de règles non concertées, inachevées, incohérentes et une concertation biaisée. En l’état, il ne garantit ni la sécurité juridique, ni l’égalité de traitement, ni une véritable représentativité des pêcheurs récréatifs dans sa conception.
En conséquence, j’émets un avis défavorable à ce projet d’arrêté.