Projet d’arrêté fixant les critères de sortie de statut de déchets pour l’huile de pyrolyse issue d’une opération de pyrolyse de déchets de matière plastique, pour un usage matière au sein d’une unité pétrochimique

Consultation du 12/06/2023 au 04/07/2023 - 7 contributions

La directive n°2008/98/CE relative aux déchets a introduit la possibilité pour des substances ou des objets qui ont le statut de déchet de cesser d’être des déchets lorsqu’ils ont subi une opération de valorisation et répondent à des critères spécifiques. Ces critères portent sur l’existence d’un marché pour cette substance ou objet, son utilisation à des fins spécifiques, le respect des normes et législations applicables aux produits ainsi que l’absence d’effet globaux nocifs pour l’environnement ou la santé humaine.
Cette disposition a été transposée à l’article L 541-4-3 du code de l’environnement.

Dans ce cadre, un dossier de demande de sortie du statut de déchet a été déposé pour l’huile de pyrolyse issue de la pyrolyse de déchets de matières plastiques.

La présente consultation met ainsi à disposition du public un projet d’arrêté ministériel fixant les critères de sortie du statut de déchet pour l’huile de pyrolyse issue de la pyrolyse de déchets de matières plastiques. L’huile de pyrolyse concernée est destinée à un usage matière au sein d’une unité de vapocraquage ou à un usage matière au sein d’une unité de purification et à destination ultérieure d’une unité de vapocraquage.
Ces unités sont définies comme appartenant à une unité pétrochimique relevant de la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles.

Ce projet d’arrêté prévoit de faire perdre le statut de déchet aux lots d’huiles de pyrolyse qui respectent les critères édictés par l’arrêté. Ces critères portent sur la composition des déchets de matières plastiques acceptés au sein de l’opération de pyrolyse et sur la qualité de l’huile de pyrolyse ainsi produite.
Des analyses sont à réaliser sur des lots sortants, notamment sur les taux d’azote, de soufre, d’oxygène, d’halogénés et de métaux, afin de justifier de leur conformité. L’exploitant doit également mettre en œuvre un système de gestion de la qualité qui couvre les différentes opérations de gestion de ces lots.
En complément, il est demandé à chaque lot d’huile de pyrolyse de respecter les spécifications techniques propres à chaque installation pétrochimique utilisatrice. Ces spécifications sont définies sur la base d’essais préalables.

Si la sortie de statut de déchet n’est pas effectuée, l’utilisation de ces lots au sein des installations pétrochimiques est possible en se conformant aux dispositions encadrant l’utilisation de déchets.

L’utilisation de l’huile de pyrolyse dans le cadre de cet arrêté relève d’une démarche volontaire. Elle se base sur des dispositifs de contrôle renforcés qui garantissent la qualité de l’huile de pyrolyse et sa bonne utilisation future.

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Commentaires

  •  Contribution de VALOREGEN, le 4 juillet 2023 à 19h25

    L’Union Européenne a pour objectif de recycler annuellement 50% des déchets plastiques et 55% des déchets ménagers d’ici 2025. Conformément à la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, la France vise, pour sa part, 100 % de recyclage des plastiques d’ici 2025. Elle fait également partie des États qui aspirent à mettre un terme à la pollution plastique d’ici 2040. Le recyclage chimique est un outil indispensable pour cet objectif étant donné qu’il permet un recyclage de qualité pour des produits que le recyclage mécanique ne permet pas de traiter . L’objectif final du recyclage est de réintégrer les produits dans l’économie par des filières « Plastics to plastics ». Afin de « fluidifier » la circularité, il est primordial d’avoir un régime de « sortie statut déchet » adapté aux enjeux précédemment cités, aux impacts environnementaux acceptables et aussi au contexte d’économie naissante dans lequel se trouve le recyclage chimique.
    Nous avons bien noté que la DGPR avait été sollicitée par Plastics Europe et France Chimie qui ont déposé un dossier de demande de sortie du statut déchet pour l’huile de pyrolyse issue de la pyrolyse de déchets de matières plastiques. Cette sollicitation semblerait être en relation avec un projet spécifique. L’objectif de notre contribution n’est aucunement de remettre en cause les exigences de qualité de l’huile de pyrolyse. A travers nos propositions, nous souhaitons plutôt ouvrir le débat sur le choix qui a été fait par les organisations précédemment citées d’utiliser la pyrolyse comme cadre technologique de la sortie statut déchet (SSD) de l’huile dans le marché naissant du recyclage chimique.
    <span class="puce">-  Dans un premier temps nous rappellerons la nécessité pour la France d’accompagner l’essor de la filière recyclage en lui offrant un cadre règlementaire adéquat.
    <span class="puce">-  Nous nous questionnerons également sur l’articulation du présent projet avec le projet de loi pour une industrie verte et avec la rubrique ICPE 2771.
    <span class="puce">-  Enfin, nous présenterons nos inquiétudes vis-à-vis des risques dans l’obligation imposée au producteur de déchets d’effectuer des tests pour la détection des polluants organiques persistants. Nous comprenons la nécessité de cette disposition, mais il ne nous semble pas adapté de l’intégrer spécifiquement pour le recyclage chimique mais plutôt de l’intégrer de façon générale au domaine du recyclage des plastiques.

    I- La nécessité d’accompagner l’essor de la filière recyclage en lui offrant un cadre règlementaire adéquat

    En dépit des bonnes volontés, force est de constater que la transposition pratique des ambitions françaises et européennes s’avère difficile. Le 8 juin 2023, la Commission européenne demandait ainsi à la France de « considérablement intensifier [ses] efforts » en matière de recyclage pour atteindre ses objectifs . En effet, notre pays accuse un retard sur certains objectifs européens : en matière de recyclage des emballages plastiques, par exemple, la France obtenait un taux de recyclage de seulement 25% en 2019, contre un objectif européen de 60% pour 2030.
    A ce stade, il est donc urgent de promouvoir et de soutenir la filière recyclage en France, notamment les activités de recyclage chimique des emballages plastiques. Concrètement, il s’agit d’accompagner les nouveaux projets industriels et d’encourager l’innovation sans préjuger des orientations technologiques. Le recyclage chimique est complémentaire du recyclage mécanique. Tout recycler chimiquement ou tout recycler mécaniquement ne sont pas des solutions envisageables. Toutefois, ces deux techniques ne doivent pas non plus être mises en concurrence. Selon les études sur le sujet, c’est en combinant ces deux procédés que l’on obtient le meilleur rapport entre rendement et émission carbone. Malgré son importance, le recyclage chimique reste un secteur d’activité émergent : des arbitrages prématurés risqueraient de retarder le développement des solutions qui lui permettraient d’atteindre sa pleine maturité. Notre objectif est de proposer des solutions qui permettront d’une part de limiter les risques environnementaux et d’autre part d’assurer le développement économique du recyclage chimique.
    Pour se montrer à la hauteur de ces ambitions environnementales, nous pensons qu’il faudrait offrir un cadre règlementaire favorable aux activités de recyclage. Il est crucial que celles-ci bénéficient d’une règlementation adaptée, stable et accessible. Dès 2015, l’Agence de la transition écologique (ADEME) alertait sur la façon dont certains protocoles administratifs trop rigides s’opposaient au développement du recyclage chimique en France.
    Au-delà du territoire national, un cadre européen harmonisé sur les déchets et le recyclage est absolument nécessaire. Pareille avancée permettrait d’assurer l’approvisionnement des installations de recyclage et de faciliter la libre circulation des matières premières recyclées à l’échelle européenne en application de la libre circulation des marchandises. Cela permettrait également de maximiser l’efficience du recyclage à l’échelle continentale et donc entrainerait la diminution des quantités de déchets mises en décharge ou éliminées. Cela passera entre autres par la facilitation d’une sortie du statut déchet qui soit propice au transport des matières au sein de l’espace intra-communautaire. La majorité des vapocraqueurs européens ne se situant pas en France, ce cadre européen permettrait l’usage de l’huile là où se trouvent les installations industrielles en mesure d’incorporer en remplacement de l’usage de matière première d’origine fossile.
    Actuellement, l’huile pyrolytique, pour sa SSD et son export intra européen, doit respecter à la fois le régime du pays d’import et le régime du pays d’export. De ce fait, imposé une SSD explicite en France pour l’huile de pyrolyse n’entraine-t-il pas un alourdissement de la procédure de SSD ? Selon notre lecture, un alourdissement administratif comme celui proposé n’est-il pas contraire aux objectifs de circularité poursuivis par l’Union Européenne ? De plus, étant donné que la majorité des vapocraqueurs ne sont pas situés en France et que l’export de l’huile est nécessaire, un texte national est-il nécessaire ? Pour ces raisons, nous pensons que la priorité n’est pas à la création d’un régime français de la SSD de l’huile de pyrolyse mais à un cadre plus général au niveau européen. Etant dans un marché naissant, imposer de telles contraintes aux produits du recyclage chimique ne nous semble pas adapté pour cette nouvelle économie.

    II- Le choix du cadre de la pyrolyse pour la SSD de l’huile

    Nous comprenons que France Chimie et Plastic Europe ont sollicité la DGPR pour encadrer la sortie du statut déchet (SSD) de l’huile pyrolytique de deux manières. D’une part par la méthode de production et d’autre part par l’usage qui sera fait de cette huile. Le procédé choisi par le projet est la pyrolyse. Elle se définit à l’alinéa 8 de l’article 1er du projet d’arrêté comme une « décomposition thermique d’un composé organique, entre 300 et 800°C, en l’absence d’oxygène ou en atmosphère pauvre en oxygène ». Pour ce qui est de la finalité, la SSD concernera les mélanges d’hydrocarbures en phase liquide à destination d’une unité de vapocraquage au sein d’une installation pétrochimique. A la lecture de ce cadre, plusieurs interrogations se sont posées vis-à-vis du choix de la DGPR de définir une méthode de production pour l’huile de pyrolyse. En effet, il semble que le choix de la pyrolyse comme porte de sortie du statut déchet de l’huile ne corresponde pas à la réalité de l’économie du recyclage des plastiques de demain.

    A- La pyrolyse : des techniques différentes pour des fins différentes dans le traitement des déchets

    La pyrolyse est une réaction de thermolyse en l’absence d’oxygène qui décompose la macrostructure du polymère et conduit à la formation de monomères ou de produits de type combustible . Cette méthode très ancienne est de nos jours utilisée, entre autres, pour le traitement des déchets mais à des fins très différentes les unes des autres.
    La pyrolyse classique est notamment utilisée pour la valorisation énergétique. La coke, l’huile et les gaz obtenus sont utilisés comme combustible afin de produire de l’énergie .
    Pour ce qui est de la production de matière première recyclée à partir de déchets plastiques, deux types de pyrolyses existent : la dépolymérisation thermique et le craquage thermique . La dépolymérisation thermique vient déconstruire le polymère pour conduire à son monomère. C’est la méthode utilisée pour le traitement du polystyrène (PS), des polyamides (PA) et du polyméthacrylate de méthyle (PMMA). Cette méthode permet donc une coupe sélective des chaines carbonées et le retour aux intermédiaires de production comme le méthacrylate de méthyle, qui est un intermédiaire du PMMA. Le craquage thermique est une opération de découpage thermique, catalytique ou non et non sélective de la chaine de polymère (sélective dans le cas d’un craquage catalytique). Elle conduit à une multitude de produits, chacun de poids moléculaire différent pour finalement conduire à une forme d’équivalent de naphta pétrolier3. Cet équivalent de coupe pétrolière pourra ensuite être séparé dans un vapocraqueur pour obtenir des oléfines (éthylène, propylène…) . Au sein même de ce type de pyrolyse, il existe des méthodes différentes comme le craquage catalytique, l’hydrocraquage, le craquage assisté par micro-onde, etc. Cette division des types de pyrolyse est reprise dans le rapport du JRC intitulé « Toward a better definition and calculation of recycling » de 2023.
    Au regard de ce qui vient d’être succinctement expliqué, le projet d’arrêté a donc pour objectif de venir règlementer la SSD de l’huile produite par craquage thermique et non les autres produits de la pyrolyse. La question est donc : pourquoi avoir choisi d’utiliser un cadre aussi large que la pyrolyse alors qu’il était possible de limiter le champ d’application en utilisant le terme de craquage thermique ? La règlementation française utilise déjà le terme de vapocraquage et de craquage catalytique alors pourquoi ne pas en faire de même pour traiter de la production d’huile de pyrolyse ? De plus, une nouvelle technologie récemment apparue outre-manche utilise de l’eau supercritique en parallèle du craquage. La définition de la pyrolyse donnée par l’arrêté englobe-t-elle l’ « hydrothermal cracking » malgré la présence d’oxygène au sein des molécules d’eau ? Bien que le rapport du JRC le considère comme une pyrolyse, le doute est permis pour ce qui est de l’interprétation du cadre donné par le projet d’arrêté.

    Ainsi, en conclusion, le projet d’arrêté ne vise qu’un produit spécifique de la pyrolyse : les mélanges d’hydrocarbures en phase liquide à destination d’une unité de vapocraquage au sein d’une installation pétrochimique. Or la pyrolyse produit d’autres produits qui n’ont pas les mêmes caractéristiques physico-chimiques et pas les mêmes destinations. De ce fait, le terme de pyrolyse ne nous parait pas adapté aux objectifs poursuivis par le texte et c’est pourquoi nous proposons de le remplacer par « craquage thermique ».

    B- La pyrolyse : une méthode de recyclage chimique parmi d’autres dans une économie naissante

    Le recyclage chimique des plastiques s’inscrit dans ce que la fondation Ellen MacArthur appelle « The New Plastics Economy » . De par la nécessité urgente de transition vers une économie circulaire, l’émergence d’un nouveau modèle économique de gestion des déchets plastiques est devenue une nécessité. Le recyclage chimique permet la production de matières premières recyclées (MPR) d’une grande qualité, une circularité potentiellement infinie et est donc un outil essentiel de la transition.
    Consciente de l’importance de développer des filières productrices de produits circulaires de qualité, l’Union Européenne a investi des milliards d’euros pour l’innovation du secteur depuis quelques années par le biais de programmes divers comme Horizon (95,5 milliards d’euros) ou Life+ (6 milliards d’euros sur 6 ans). Au-delà des investissements européens en la matière, l’intérêt pour les pétrochimistes envers la production d’hydrocarbures à partir de déchets plastiques utilisables comme une coupe pétrolière classique est évident au regard des futures mesures de l’UE . C’est pourquoi des acteurs mondiaux de l’industrie plastique investissent massivement dans ces filières .
    Ces contributions à travers des fonds, combinées à diverses mesures en faveur de l’économie circulaire12, ont fortement dynamisé l’innovation technologique en matière de recyclage chimique. Selon l’Office européen des brevets (OEP), le nombre d’« international patent families » (IPFs) relatif au recyclage chimique a explosé depuis le début des années 2000. Entre 2000 et 2014 (le pic de dépôts de brevet), le nombre d’IFPS par année a quasiment été multiplié par trois, passant d’environ 270 en 2000 à près de 750 en 2014 (+177%).
    L’état de l’art du recyclage chimique évolue sans cesse et de nouvelles techniques de recyclage sont brevetées très régulièrement. Aujourd’hui, la seule manière connue de fabriquer de l’huile de plastique est de passer par le craquage thermique. Toutefois, à la vue de l’évolution rapide du secteur, rien n’empêche qu’une nouvelle méthode de recyclage chimique différente produisant un mélange d’hydrocarbure semblable à l’huile la pyrolyse fasse son apparition. Dans cette hypothèse, l’huile de plastique obtenue par ce procédé viendrait échapper au contrôle du projet d’arrêté alors que le produit, son usage et son marché seraient exactement les mêmes. Cela reviendrait potentiellement à une distorsion de concurrence.

    C- Notre proposition

    En somme, pour les raisons citées précédemment, il ne nous semble pas opportun d’utiliser le cadre de la pyrolyse pour caractériser la SSD de l’huile de plastique. Pour aller plus loin, nous pensons que définir une quelconque méthode pour qualifier l’huile de plastique pourrait représenter un risque dans le futur. En effet, il semble plus adapté de dissocier la méthode du produit afin d’éviter les risques détaillés dans le 3.2. Il nous semblerait plus adapté de conserver ce texte en précisant que la méthode n’importe pas, seules les caractéristiques du produit et son usage devraient être pris en compte. Par exemple comme suit : « Huile de plastique obtenue par le recyclage chimique de déchets plastiques et similaire à une coupe pétrolière dans sa composition pour une utilisation dans une unité de vapocraquage ». Cette formulation permettrait de viser le même produit que le projet d’arrêté actuel tout en prévoyant l’arrivée de nouvelles technologies.

    III- L’articulation du projet d’arrêté avec la rubrique ICPE numéro 2771 relative aux installations de traitement thermique de déchets non dangereux

    Le projet d’arrêté, en utilisant le terme de « pyrolyse », nous fait nous interroger sur le lien de ce texte avec l’arrêté du 20/09/2002 relatif aux installations d’incinération . Même si le projet d’arrêté ne mentionne pas la rubrique 2771, un lien implicite existe. En effet, ce texte définit une installation d’incinération comme : « tout équipement ou unité technique fixe ou mobile destiné spécifiquement au traitement thermique de déchets, avec ou sans récupération de la chaleur produite par la combustion. Le traitement thermique comprend l’incinération par oxydation ou tout autre procédé de traitement thermique, tel que la pyrolyse, la gazéification ou le traitement plasmatique ».
    Or, le projet d’arrêté dispose à son article 1 alinéa 9 qu’une unité de pyrolyse se définissait comme une « unité soumise au régime de l’autorisation environnementale au titre de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement et permettant de réaliser une opération de pyrolyse ». Cet article en choisissant d’utiliser les termes de pyrolyse et d’autorisation environnementale sans mentionner clairement la rubrique ICPE n°2771 Installation de traitement thermique de déchets non dangereux, laisse planer le doute sur le lien entre les deux textes. Cette incertitude est un risque.
    Nous proposons donc que le lien entre le projet d’arrêté et la rubrique ICPE 2771 soit clarifié juridiquement dans le présent arrêté. Dans le cas où un lien existe, le projet d’arrêté devra le mentionner clairement. A l’inverse, il doit être précisé que ces deux textes sont indépendants l’un de l’autre le cas échéant et que l’application de l’un n’entraine pas de facto l’application de l’autre.

    IV- Les obligations d’analyse des Polluants Organiques Persistants (POP) reposant sur le producteur de déchet

    Le projet d’arrêté dispose, dans l’annexe I, section 4, point 4.1. Information préalable que le producteur de déchets doit réaliser une « analyse des polluants organiques (POP) en type et concentration, pour les déchets susceptibles d’en contenir ». De ce fait, il fait peser sur le producteur de déchets une obligation qui pourrait s’avérer couteuse et contraignante dans le cas où il cèderait ses déchets à un producteur d’huile de plastique. De ce fait, il est fort probable que, afin d’éviter ces formalités, les producteurs de déchets comme les PME préfèrent céder leurs déchets à des centres de tri ou des entreprises ne produisant pas d’huile de plastique. Les producteurs d’huile de plastique verraient alors leurs gisements grandement diminués par rapport à ceux de leurs concurrents. La définition même du POP est qu’il est très compliqué à éliminer que ça soit par traitement thermique, chimique ou mécanique. Cela ne fait pas sens que cette obligation relative aux POPs ne s’applique qu’aux producteurs d’huile de plastique et pas aux autres secteurs du recyclage.
    De plus, de nombreuses études ont montré que la méthode la moins polluante et la plus efficace était de combiner recyclage chimique et recyclage mécanique. De ce fait, une grande partie des start-ups de recyclage chimique adoptent ce modèle. Comment doivent-elles alors appliquer les obligations liées aux POPs ? Au moment de l’enlèvement, l’entreprise ne sait pas si tel ou tel morceau de plastique ira vers un recyclage mécanique ou un recyclage chimique. Encore une fois cette incertitude peut entraîner des conséquences néfastes sur l’économie naissante du recyclage chimique en créant des distorsions de concurrence.
    Notre proposition est donc de supprimer cette obligation relative au POP au sein de ce texte. Il nous semble plus adapté, de par sa nature et son importance pour l’environnement, que la règlementation applicable aux POPs soit de portée générale. Afin d’éviter une distorsion de concurrence et permettre une plus grande protection des consommateurs, les obligations d’analyses en POP devraient s’appliquer à toutes les méthodes de recyclage et pas seulement aux producteurs d’huile de pyrolyse.

  •  Contribution de Valoregen, le 4 juillet 2023 à 19h16

    L’Union Européenne a pour objectif de recycler annuellement 50% des déchets plastiques et 55% des déchets ménagers d’ici 2025. Conformément à la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, la France vise, pour sa part, 100 % de recyclage des plastiques d’ici 2025. Elle fait également partie des États qui aspirent à mettre un terme à la pollution plastique d’ici 2040. Le recyclage chimique est un outil indispensable pour cet objectif étant donné qu’il permet un recyclage de qualité pour des produits que le recyclage mécanique ne permet pas de traiter . L’objectif final du recyclage est de réintégrer les produits dans l’économie par des filières « Plastics to plastics ». Afin de « fluidifier » la circularité, il est primordial d’avoir un régime de « sortie statut déchet » adapté aux enjeux précédemment cités, aux impacts environnementaux acceptables et aussi au contexte d’économie naissante dans lequel se trouve le recyclage chimique.
    Nous avons bien noté que la DGPR avait été sollicitée par Plastics Europe et France Chimie qui ont déposé un dossier de demande de sortie du statut déchet pour l’huile de pyrolyse issue de la pyrolyse de déchets de matières plastiques. Cette sollicitation semblerait être en relation avec un projet spécifique. L’objectif de notre contribution n’est aucunement de remettre en cause les exigences de qualité de l’huile de pyrolyse. A travers nos propositions, nous souhaitons plutôt ouvrir le débat sur le choix qui a été fait par les organisations précédemment citées d’utiliser la pyrolyse comme cadre technologique de la sortie statut déchet (SSD) de l’huile dans le marché naissant du recyclage chimique.
    <span class="puce">-  Dans un premier temps nous rappellerons la nécessité pour la France d’accompagner l’essor de la filière recyclage en lui offrant un cadre règlementaire adéquat.
    <span class="puce">-  Nous nous questionnerons également sur l’articulation du présent projet avec le projet de loi pour une industrie verte et avec la rubrique ICPE 2771.
    <span class="puce">-  Enfin, nous présenterons nos inquiétudes vis-à-vis des risques dans l’obligation imposée au producteur de déchets d’effectuer des tests pour la détection des polluants organiques persistants. Nous comprenons la nécessité de cette disposition, mais il ne nous semble pas adapté de l’intégrer spécifiquement pour le recyclage chimique mais plutôt de l’intégrer de façon générale au domaine du recyclage des plastiques.

    I- La nécessité d’accompagner l’essor de la filière recyclage en lui offrant un cadre règlementaire adéquat

    En dépit des bonnes volontés, force est de constater que la transposition pratique des ambitions françaises et européennes s’avère difficile. Le 8 juin 2023, la Commission européenne demandait ainsi à la France de « considérablement intensifier [ses] efforts » en matière de recyclage pour atteindre ses objectifs . En effet, notre pays accuse un retard sur certains objectifs européens : en matière de recyclage des emballages plastiques, par exemple, la France obtenait un taux de recyclage de seulement 25% en 2019, contre un objectif européen de 60% pour 2030.
    A ce stade, il est donc urgent de promouvoir et de soutenir la filière recyclage en France, notamment les activités de recyclage chimique des emballages plastiques. Concrètement, il s’agit d’accompagner les nouveaux projets industriels et d’encourager l’innovation sans préjuger des orientations technologiques. Le recyclage chimique est complémentaire du recyclage mécanique. Tout recycler chimiquement ou tout recycler mécaniquement ne sont pas des solutions envisageables. Toutefois, ces deux techniques ne doivent pas non plus être mises en concurrence. Selon les études sur le sujet, c’est en combinant ces deux procédés que l’on obtient le meilleur rapport entre rendement et émission carbone. Malgré son importance, le recyclage chimique reste un secteur d’activité émergent : des arbitrages prématurés risqueraient de retarder le développement des solutions qui lui permettraient d’atteindre sa pleine maturité. Notre objectif est de proposer des solutions qui permettront d’une part de limiter les risques environnementaux et d’autre part d’assurer le développement économique du recyclage chimique.
    Pour se montrer à la hauteur de ces ambitions environnementales, nous pensons qu’il faudrait offrir un cadre règlementaire favorable aux activités de recyclage. Il est crucial que celles-ci bénéficient d’une règlementation adaptée, stable et accessible. Dès 2015, l’Agence de la transition écologique (ADEME) alertait sur la façon dont certains protocoles administratifs trop rigides s’opposaient au développement du recyclage chimique en France.
    Au-delà du territoire national, un cadre européen harmonisé sur les déchets et le recyclage est absolument nécessaire. Pareille avancée permettrait d’assurer l’approvisionnement des installations de recyclage et de faciliter la libre circulation des matières premières recyclées à l’échelle européenne en application de la libre circulation des marchandises. Cela permettrait également de maximiser l’efficience du recyclage à l’échelle continentale et donc entrainerait la diminution des quantités de déchets mises en décharge ou éliminées. Cela passera entre autres par la facilitation d’une sortie du statut déchet qui soit propice au transport des matières au sein de l’espace intra-communautaire. La majorité des vapocraqueurs européens ne se situant pas en France, ce cadre européen permettrait l’usage de l’huile là où se trouvent les installations industrielles en mesure d’incorporer en remplacement de l’usage de matière première d’origine fossile.
    Actuellement, l’huile pyrolytique, pour sa SSD et son export intra européen, doit respecter à la fois le régime du pays d’import et le régime du pays d’export. De ce fait, imposé une SSD explicite en France pour l’huile de pyrolyse n’entraine-t-il pas un alourdissement de la procédure de SSD ? Selon notre lecture, un alourdissement administratif comme celui proposé n’est-il pas contraire aux objectifs de circularité poursuivis par l’Union Européenne ? De plus, étant donné que la majorité des vapocraqueurs ne sont pas situés en France et que l’export de l’huile est nécessaire, un texte national est-il nécessaire ? Pour ces raisons, nous pensons que la priorité n’est pas à la création d’un régime français de la SSD de l’huile de pyrolyse mais à un cadre plus général au niveau européen. Etant dans un marché naissant, imposer de telles contraintes aux produits du recyclage chimique ne nous semble pas adapté pour cette nouvelle économie.

    II- Le choix du cadre de la pyrolyse pour la SSD de l’huile

    Nous comprenons que France Chimie et Plastic Europe ont sollicité la DGPR pour encadrer la sortie du statut déchet (SSD) de l’huile pyrolytique de deux manières. D’une part par la méthode de production et d’autre part par l’usage qui sera fait de cette huile. Le procédé choisi par le projet est la pyrolyse. Elle se définit à l’alinéa 8 de l’article 1er du projet d’arrêté comme une « décomposition thermique d’un composé organique, entre 300 et 800°C, en l’absence d’oxygène ou en atmosphère pauvre en oxygène ». Pour ce qui est de la finalité, la SSD concernera les mélanges d’hydrocarbures en phase liquide à destination d’une unité de vapocraquage au sein d’une installation pétrochimique. A la lecture de ce cadre, plusieurs interrogations se sont posées vis-à-vis du choix de la DGPR de définir une méthode de production pour l’huile de pyrolyse. En effet, il semble que le choix de la pyrolyse comme porte de sortie du statut déchet de l’huile ne corresponde pas à la réalité de l’économie du recyclage des plastiques de demain.

    A- La pyrolyse : des techniques différentes pour des fins différentes dans le traitement des déchets

    La pyrolyse est une réaction de thermolyse en l’absence d’oxygène qui décompose la macrostructure du polymère et conduit à la formation de monomères ou de produits de type combustible . Cette méthode très ancienne est de nos jours utilisée, entre autres, pour le traitement des déchets mais à des fins très différentes les unes des autres.
    La pyrolyse classique est notamment utilisée pour la valorisation énergétique. La coke, l’huile et les gaz obtenus sont utilisés comme combustible afin de produire de l’énergie .
    Pour ce qui est de la production de matière première recyclée à partir de déchets plastiques, deux types de pyrolyses existent : la dépolymérisation thermique et le craquage thermique . La dépolymérisation thermique vient déconstruire le polymère pour conduire à son monomère. C’est la méthode utilisée pour le traitement du polystyrène (PS), des polyamides (PA) et du polyméthacrylate de méthyle (PMMA). Cette méthode permet donc une coupe sélective des chaines carbonées et le retour aux intermédiaires de production comme le méthacrylate de méthyle, qui est un intermédiaire du PMMA. Le craquage thermique est une opération de découpage thermique, catalytique ou non et non sélective de la chaine de polymère (sélective dans le cas d’un craquage catalytique). Elle conduit à une multitude de produits, chacun de poids moléculaire différent pour finalement conduire à une forme d’équivalent de naphta pétrolier3. Cet équivalent de coupe pétrolière pourra ensuite être séparé dans un vapocraqueur pour obtenir des oléfines (éthylène, propylène…) . Au sein même de ce type de pyrolyse, il existe des méthodes différentes comme le craquage catalytique, l’hydrocraquage, le craquage assisté par micro-onde, etc. Cette division des types de pyrolyse est reprise dans le rapport du JRC intitulé « Toward a better definition and calculation of recycling » de 2023.
    Au regard de ce qui vient d’être succinctement expliqué, le projet d’arrêté a donc pour objectif de venir règlementer la SSD de l’huile produite par craquage thermique et non les autres produits de la pyrolyse. La question est donc : pourquoi avoir choisi d’utiliser un cadre aussi large que la pyrolyse alors qu’il était possible de limiter le champ d’application en utilisant le terme de craquage thermique ? La règlementation française utilise déjà le terme de vapocraquage et de craquage catalytique alors pourquoi ne pas en faire de même pour traiter de la production d’huile de pyrolyse ? De plus, une nouvelle technologie récemment apparue outre-manche utilise de l’eau supercritique en parallèle du craquage. La définition de la pyrolyse donnée par l’arrêté englobe-t-elle l’ « hydrothermal cracking » malgré la présence d’oxygène au sein des molécules d’eau ? Bien que le rapport du JRC le considère comme une pyrolyse, le doute est permis pour ce qui est de l’interprétation du cadre donné par le projet d’arrêté.

    Ainsi, en conclusion, le projet d’arrêté ne vise qu’un produit spécifique de la pyrolyse : les mélanges d’hydrocarbures en phase liquide à destination d’une unité de vapocraquage au sein d’une installation pétrochimique. Or la pyrolyse produit d’autres produits qui n’ont pas les mêmes caractéristiques physico-chimiques et pas les mêmes destinations. De ce fait, le terme de pyrolyse ne nous parait pas adapté aux objectifs poursuivis par le texte et c’est pourquoi nous proposons de le remplacer par « craquage thermique ».

    B- La pyrolyse : une méthode de recyclage chimique parmi d’autres dans une économie naissante

    Le recyclage chimique des plastiques s’inscrit dans ce que la fondation Ellen MacArthur appelle « The New Plastics Economy » . De par la nécessité urgente de transition vers une économie circulaire, l’émergence d’un nouveau modèle économique de gestion des déchets plastiques est devenue une nécessité. Le recyclage chimique permet la production de matières premières recyclées (MPR) d’une grande qualité, une circularité potentiellement infinie et est donc un outil essentiel de la transition.
    Consciente de l’importance de développer des filières productrices de produits circulaires de qualité, l’Union Européenne a investi des milliards d’euros pour l’innovation du secteur depuis quelques années par le biais de programmes divers comme Horizon (95,5 milliards d’euros) ou Life+ (6 milliards d’euros sur 6 ans). Au-delà des investissements européens en la matière, l’intérêt pour les pétrochimistes envers la production d’hydrocarbures à partir de déchets plastiques utilisables comme une coupe pétrolière classique est évident au regard des futures mesures de l’UE . C’est pourquoi des acteurs mondiaux de l’industrie plastique investissent massivement dans ces filières .
    Ces contributions à travers des fonds, combinées à diverses mesures en faveur de l’économie circulaire12, ont fortement dynamisé l’innovation technologique en matière de recyclage chimique. Selon l’Office européen des brevets (OEP), le nombre d’« international patent families » (IPFs) relatif au recyclage chimique a explosé depuis le début des années 2000. Entre 2000 et 2014 (le pic de dépôts de brevet), le nombre d’IFPS par année a quasiment été multiplié par trois, passant d’environ 270 en 2000 à près de 750 en 2014 (+177%).
    L’état de l’art du recyclage chimique évolue sans cesse et de nouvelles techniques de recyclage sont brevetées très régulièrement. Aujourd’hui, la seule manière connue de fabriquer de l’huile de plastique est de passer par le craquage thermique. Toutefois, à la vue de l’évolution rapide du secteur, rien n’empêche qu’une nouvelle méthode de recyclage chimique différente produisant un mélange d’hydrocarbure semblable à l’huile la pyrolyse fasse son apparition. Dans cette hypothèse, l’huile de plastique obtenue par ce procédé viendrait échapper au contrôle du projet d’arrêté alors que le produit, son usage et son marché seraient exactement les mêmes. Cela reviendrait potentiellement à une distorsion de concurrence.

    C- Notre proposition

    En somme, pour les raisons citées précédemment, il ne nous semble pas opportun d’utiliser le cadre de la pyrolyse pour caractériser la SSD de l’huile de plastique. Pour aller plus loin, nous pensons que définir une quelconque méthode pour qualifier l’huile de plastique pourrait représenter un risque dans le futur. En effet, il semble plus adapté de dissocier la méthode du produit afin d’éviter les risques détaillés dans le 3.2. Il nous semblerait plus adapté de conserver ce texte en précisant que la méthode n’importe pas, seules les caractéristiques du produit et son usage devraient être pris en compte. Par exemple comme suit : « Huile de plastique obtenue par le recyclage chimique de déchets plastiques et similaire à une coupe pétrolière dans sa composition pour une utilisation dans une unité de vapocraquage ». Cette formulation permettrait de viser le même produit que le projet d’arrêté actuel tout en prévoyant l’arrivée de nouvelles technologies.

    III- L’articulation du projet d’arrêté avec la rubrique ICPE numéro 2771 relative aux installations de traitement thermique de déchets non dangereux

    Le projet d’arrêté, en utilisant le terme de « pyrolyse », nous fait nous interroger sur le lien de ce texte avec l’arrêté du 20/09/2002 relatif aux installations d’incinération . Même si le projet d’arrêté ne mentionne pas la rubrique 2771, un lien implicite existe. En effet, ce texte définit une installation d’incinération comme : « tout équipement ou unité technique fixe ou mobile destiné spécifiquement au traitement thermique de déchets, avec ou sans récupération de la chaleur produite par la combustion. Le traitement thermique comprend l’incinération par oxydation ou tout autre procédé de traitement thermique, tel que la pyrolyse, la gazéification ou le traitement plasmatique ».
    Or, le projet d’arrêté dispose à son article 1 alinéa 9 qu’une unité de pyrolyse se définissait comme une « unité soumise au régime de l’autorisation environnementale au titre de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement et permettant de réaliser une opération de pyrolyse ». Cet article en choisissant d’utiliser les termes de pyrolyse et d’autorisation environnementale sans mentionner clairement la rubrique ICPE n°2771 Installation de traitement thermique de déchets non dangereux, laisse planer le doute sur le lien entre les deux textes. Cette incertitude est un risque.
    Nous proposons donc que le lien entre le projet d’arrêté et la rubrique ICPE 2771 soit clarifié juridiquement dans le présent arrêté. Dans le cas où un lien existe, le projet d’arrêté devra le mentionner clairement. A l’inverse, il doit être précisé que ces deux textes sont indépendants l’un de l’autre le cas échéant et que l’application de l’un n’entraine pas de facto l’application de l’autre.

    IV- Les obligations d’analyse des Polluants Organiques Persistants (POP) reposant sur le producteur de déchet

    Le projet d’arrêté dispose, dans l’annexe I, section 4, point 4.1. Information préalable que le producteur de déchets doit réaliser une « analyse des polluants organiques (POP) en type et concentration, pour les déchets susceptibles d’en contenir ». De ce fait, il fait peser sur le producteur de déchets une obligation qui pourrait s’avérer couteuse et contraignante dans le cas où il cèderait ses déchets à un producteur d’huile de plastique. De ce fait, il est fort probable que, afin d’éviter ces formalités, les producteurs de déchets comme les PME préfèrent céder leurs déchets à des centres de tri ou des entreprises ne produisant pas d’huile de plastique. Les producteurs d’huile de plastique verraient alors leurs gisements grandement diminués par rapport à ceux de leurs concurrents. La définition même du POP est qu’il est très compliqué à éliminer que ça soit par traitement thermique, chimique ou mécanique. Cela ne fait pas sens que cette obligation relative aux POPs ne s’applique qu’aux producteurs d’huile de plastique et pas aux autres secteurs du recyclage.
    De plus, de nombreuses études ont montré que la méthode la moins polluante et la plus efficace était de combiner recyclage chimique et recyclage mécanique. De ce fait, une grande partie des start-ups de recyclage chimique adoptent ce modèle. Comment doivent-elles alors appliquer les obligations liées aux POPs ? Au moment de l’enlèvement, l’entreprise ne sait pas si tel ou tel morceau de plastique ira vers un recyclage mécanique ou un recyclage chimique. Encore une fois cette incertitude peut entraîner des conséquences néfastes sur l’économie naissante du recyclage chimique en créant des distorsions de concurrence.
    Notre proposition est donc de supprimer cette obligation relative au POP au sein de ce texte. Il nous semble plus adapté, de par sa nature et son importance pour l’environnement, que la règlementation applicable aux POPs soit de portée générale. Afin d’éviter une distorsion de concurrence et permettre une plus grande protection des consommateurs, les obligations d’analyses en POP devraient s’appliquer à toutes les méthodes de recyclage et pas seulement aux producteurs d’huile de pyrolyse.

  •  Contribution FEDEREC - Sortie du statut de déchet des huiles de pyrolyse , le 4 juillet 2023 à 18h24

    La présente note porte sur le projet d’arrêté fixant les critères de sortie du statut de déchet pour l’huile de pyrolyse issue de la pyrolyse de déchets de matières plastiques, pour un usage en mélange dans une unité de vapocraquage au sein d’une installation pétrochimique relevant de la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, transmis pour consultation informelle par le Ministère de la Transition Ecologique et de la cohésion des territoires en décembre 2022.

    Synthèse :
    Nous nous s’interrogent sur :
    L’opportunité de cette procédure de sortie de statut de déchet nationale,
    L’articulation et l’impact de cette procédure de statut de déchet positionnée à un stade précoce du procédé, sur la traçabilité et la comptabilisation du contenu recyclé aux étapes ultérieures du processus de recyclage, en particulier à l’étape de vapocraquage (mass balance).
    Nous recommandons :
    De traiter ce sujet au niveau européen, dans le cadre d’une procédure harmonisée et ;
    De mentionner explicitement, dans le corps de l’arrêté, que la SSD des huiles de pyrolyse ne préjuge en rien des règles de comptabilisation du contenu recyclé dans les produits issus du recyclage chimique par pyrolyse et vapocraquage (méthode de la mass balance). L’utilisation de la mass balance doit faire l’objet d’un encadrement réglementaire spécifique.
    En contexte, il convient de rappeler que :
    Contexte général
    Le recyclage mécanique des déchets plastiques ne bénéficie pas, à date, d’une procédure explicite de sortie de statut de déchet. La Sortie de Statut de Déchet (SSD) implicite aujourd’hui appliquée fait peser une insécurité juridique sur les matières premières issues du recyclage mécanique. La mise en œuvre d’une procédure explicite de sortie de statut de déchet est demandée par la profession et est en cours au niveau européen (étude JRC en cours).
    Le recyclage chimique des plastiques, en particulier les technologies de recyclage par pyrolyse et substitution des intrants pétroliers dans les installations de vapocraquage, fait l’objet d’études et de débats quant à son bénéfice environnemental, la traçabilité et à la comptabilisation du contenu recyclé des produits sortants. La comptabilisation (recyclage vs valorisation énergétique) des carburants et combustibles produits et l’attribution des contenus recyclés aux produits selon la méthode de la mass balance font particulièrement débat. Des travaux de clarification sont en cours au niveau européen dans le cadre notamment de la Directive dite SUP.
    Les ACV disponibles concluent de manière univoque à une performance environnementale du recyclage mécanique supérieure à celle du recyclage chimique. Dans ce contexte, il fait consensus au sein de la chaine de valeur que le recyclage mécanique est prioritaire sur le recyclage chimique. Un traitement réglementaire, équivalent de ces deux technologies, gage de neutralité technologique, est donc souhaitable.

    Contexte spécifique des DEEE
    Le projet d’arrêté portant SSD de l’huile de pyrolyse, prévoit d’interdire l’huile de pyrolyse produite à part de déchets susceptibles de contenir des retardateurs de flamme bromés, des polluants organiques persistants (POP), ainsi que les DEEE.
    D’une part, on ne pyrolyse pas de « DEEE », mais des fractions issues de DEEE comme les plastiques. D’autre part, tous les DEEE ne contiennent pas de RFB ou POP.
    En effet, les plastiques issus de DEEE sont présumés contenir des RFB, à l’exclusion des plastiques des gros électroménagers froid (GEM F) et hors froid (GEM HF). Ce sont donc les plastiques issus des écrans et petits appareils en mélange (PAM) qui sont concernés par la présence de brome et de substances classées POP. En 2017, une campagne européenne d’analyses des plastiques du gros électroménager a été réalisée en partenariat avec le Ministère, l’INERIS, les entreprises de recyclage, l’OCAD3E (organisme coordinateur de la filière REP DEEE en France) et 6 autres pays européens. Les résultats ont permis de confirmer que les plastiques des GEM ne sont pas concernés par une problématique de RFB. Le ministère doit avoir une posture cohérente en lien avec ces résultats.
    Par ailleurs, les plastiques issus de PAM et d’écrans doivent faire l’objet d’une séparation afin d’extraire les fractions bromées et contenant des POP. Les plastiques issus du tri sont exemptes de brome/POP.

    Positionnement et propositions
    Positionnement général
    Nous nous interrogeons sur le positionnement de la SSD en sortie d’unité de pyrolyse, plutôt qu’en sortie d’unité de vapocraquage. Positionner la sortie de statut de déchet en sortie d’unité de pyrolyse conduira-t-il à comptabiliser automatiquement 100% de l’huile de pyrolyse et des matières produites à partir de cette huile de pyrolyse comme des produits recyclés ? Une telle comptabilisation ne serait pas satisfaisante et doit être explicitement écartée car :
    Elle méconnaitrait le fait qu’une part significative de l’huile de pyrolyse est transformée, par le vapocraquage, en carburants et combustibles, et non pas en monomères. La production de carburants et combustibles correspondent à de la valorisation énergétique.
    Elle ne tiendrait pas compte des rendements des étapes ultérieures à la pyrolyse (purification, vapocraquage, voire polymérisation), alors même que le recyclage mécanique est soumis à des règles de comptage de plus en plus drastique, notamment dans le cadre de la directive Emballages et déchets d’emballages .
    Elle éluderait la question de la perte de traçabilité du contenu recyclé à l’étape du vapocraquage ainsi que les débats sur l’affectation des contenus recyclés via la mass balance.
    Au vu des travaux déjà en cours au niveau européen, nous proposons de mentionner explicitement, dans le corps de l’arrêté, que :
    L’utilisation de la méthode de mass balance fera l’objet d’un encadrement réglementaire spécifique.
    Notre recommandation stipulant que la SSD des huiles de pyrolyse ne préjuge en rien des règles de comptabilisation du contenu recyclé dans les produits issus du recyclage chimique par pyrolyse et vapocraquage en précisant que ces règles devront être précisées par ailleurs a été reprise par la DGPR. FEDEREC salue ce geste et soutient pleinement cette recommandation.
    A titre complémentaire, nous nous interrogeons sur certaines prescriptions techniques du projet d’arrêté.
    Qualité de l’entrant Les taux de contaminants autorisés sont sensiblement plus élevés que les prescriptions techniques connues. Par exemple : PVC autorisé jusqu’à 3%, contre 0,5% à 1% selon les prescriptions connues ; PET autorisé jusqu’à 5% par l’arrêté, contre 1% selon les prescriptions connues
    Qualité du produit sortant et opération de purification complémentaire Le projet d’arrêté prévoit que :
    « Le taux maximum d’azote, de soufre et de métaux pour l’huile de pyrolyse entrant dans l’unité de vapocraquage ne doit pas dépasser 150% du taux maximum prévu par les spécifications de cette installation pour les produits auxquels l’huile se substitue. » (Annexe 1, 3.3)
    Une étape de purification de l’huile de pyrolyse sur le site de vapocraquage est autorisée. La purification est définie comme « étape préalable au vapocraquage, visant à éliminer certaines impuretés présentes dans l’huile de pyrolyse (…) ». (Art. 1 ; Annexe 1)
    Ces éléments indiquent que les huiles de pyrolyse nécessitent, avant utilisation dans un procédé industriel, un traitement assimilable à un traitement de déchet puisque son objet est l’élimination d’impuretés et de substances indésirables. Ceci ne parait pas cohérent avec les critères de SSD selon lequel « la substance ou l’objet remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ».
    Positionnement spécifique aux DEEE
    Afin de permettre aux plastiques issus de DEEE ne contenant pas de retardateurs de flammes bromés ou POP d’être valorisés par pyrolyse, FEDEREC demande :

    Que les codes déchets suivants soient ajoutés à l’Annexe I, Section 1 – Déchets utilisés en tant qu’intrants dans l’opération de pyrolyse – Partie 1.1 :
    16 02 14 équipements mis au rebut autres que ceux visés aux rubriques 16 02 09 à 16 02 13,
    16 02 16 composants retirés des équipements mis au rebut autres que ceux visés à la rubrique 16 02 15.

    Les modifications suivantes dans l’Annexe I, Section 1 – Déchets utilisés en tant qu’intrants dans l’opération de pyrolyse – Partie 1.3 :
    Supprimer les mots « De déchets d’équipements électriques et électroniques » ,
    Remplacer les mots « De déchets pouvant contenir des retardateurs de flamme bromés » par « De déchets contenant des retardateurs de flamme bromés ».

  •  Commentaire de Robin des Bois sur le projet d’arrêté fixant les critères de sortie de statut de déchet de l’huile de pyrolyse issue de matières plastiques, le 4 juillet 2023 à 17h08

    Encore un gros succès de la consultation du public. Sur trois observations, une est hors sujet (Elanova qui pousse sa sortie de déchet caoutchouc) et l’autre provient d’une start-up étrangère et embryonnaire du recyclage chimique des déchets plastiques.

    Sur un plan général, nous ne comprenons pas qu’une sortie de statut de déchet soit réclamée pour les huiles de pyrolyse des déchets de matières plastiques destinées à être vapocraquées dans des raffineries.

    La diversité des matières plastiques et des adjuvants fera des huiles de pyrolyse un déchet difficile à cerner, à analyser, à uniformiser. Une telle variabilité en fin de process constituera pour chaque lot un test et une somme d’inconnues pour l’unité pétrochimique réceptrice. Considérer les huiles de pyrolyse de matières plastiques comme un produit risque d’alléger les analyses tout au long de la chaîne de conversion de ces huiles.

    Les installations pétrochimiques utilisatrices n’auront aucune garantie de ne pas augmenter leurs émissions diffuses et canalisées dans l’environnement.

    L’article 3 parle d’une attestation de conformité émise par le producteur de l’huile de pyrolyse. Ces attestations de conformité de "produits" qui seront introduits dans le process d’une usine Seveso manqueront de fiabilité.

    Tous les critères de conformité listés dans l’Annexe 1 du projet d’arrêté seront très difficiles, lot par lot, à être vérifiés par les producteurs. En conséquence, les risques d’incidents/accidents ou de dégradations des équipements des installations pétrochimiques et en particulier de leurs unités de vapocraquage seront multiples et pourront surprendre les opérateurs.

    Tout est affaire de papiers, de contrats de cession. Le fait que le 3.1 et le 3.2 de la section 3 de l’Annexe 1 et les clauses associées soient tenus à disposition de l’inspection des installations classées n’oblige pas malheureusement cette inspection ou des organismes tiers à vérifier l’absence d’impuretés ou d’indésirables susceptibles de nuire à la qualité des produits de l’installation pétrochimique et de nuire via des accidents à la sécurité intrinsèque du site, de ses salariés et de son environnement.

    Dans le 1.3 de la section 1 de l’Annexe 1, les PFAS sont oubliés.

    Le a) du 3.3 nous pose d’autres questions auxquelles nous vous serions reconnaissants de nous répondre. Nous ne comprenons pas la trajectoire des huiles qui ne subissent pas une étape de purification dans l’installation pétrochimique et l’énorme différence qu’il y a dans les taux maximums du tableau a et du tableau b en particulier pour les halogénés soit 500 ppm dans le tableau a et 30.000 dans le tableau b. Nous estimons que la plupart des paramètres dans le tableau b devraient être minorés et d’une certaine manière alignés sur les paramètres du tableau a.

    Dans la section 4 de l’Annexe 1 qui évoque l’amont du process, nous constatons que là encore il y a une espèce de gentleman agreement préalable entre le producteur de déchets de matières plastiques et le pyrolyseur et que c’est au moment de l’admission, quand le lot est dans la cour du pyrolyseur, que les teneurs en POP sont théoriquement analysées. Compte tenu de la variabilité de la qualité de ces analyses, des biais de laboratoire et surtout de la diversité des déchets de matières plastiques, ces contrôles de la teneur en POP avant que les déchets soient pyrolysés nous paraissent aléatoires. Il en va de même pour le contrôle du lot des huiles de pyrolyse.

    Enfin, le 4.5 de l’Annexe 1 dit que l’installation de vapocraquage effectue des essais préalables avant toute acceptation d’un contrat de cession de l’eau et que ces essais sont censés garantir l’absence d’incidence de l’utilisation de l’huile de pyrolyse sur les équipements, sur les émissions et sur la qualité des produits de sortie. En vérité, il faudrait que tous les lots d’huile de pyrolyse fassent l’objet de ces vérifications. C’est pourquoi, compte tenu de la légèreté du projet d’arrêté, Robin des Bois est contre cette sortie de statut de déchet. Si les huiles de pyrolyse de matières plastiques restaient des déchets, l’utilisateur serait obligé pour protéger son installation, ses salariés et sa production de faire des analyses au moment de l’arrivée de chaque lot.

    L’Annexe 2 et le fac-similé de l’information devant figurer dans l’attestation de conformité renforcent notre méfiance vis-à-vis de ce projet tel qu’il est rédigé.

    Association Robin des Bois

  •  elanova, syndicat national du caoutchouc, le 3 juillet 2023 à 22h25

    La filière nationale du caoutchouc salue cette initiative de projet d’arrêté qui s’inscrit dans la volonté gouvernementale de favoriser la transition de l’industrie française vers l’économie circulaire, en faisant en sorte que des matières premières résultant d’opérations de recyclage dans certaines conditions et suivant des critères spécifiques cessent d’être des déchets, comme le prévoient les dispositions du code de l’environnement et de la directive cadre européenne sur les déchets.
    elanova accueille favorablement le projet d’arrêté fixant les critères de la sortie du statut de déchet pour l’huile de pyrolyse issue d’une opération de pyrolyse de déchets de matière plastique, pour un usage matière au sein d’une unité pétrochimique.

    Ce projet d’arrêté marque également la reconnaissance par les pouvoirs publics du fait que la transition vers une économie climatiquement neutre et plus économe en ressources nécessitera non seulement davantage de recyclage par des procédés mécaniques mais également le recours au recyclage chimique, en raison de la complexité de certains déchets.

    A cet égard, au-delà du plastique, une attention particulière des pouvoirs publics doit absolument être portée sur d’autres flux de déchets pour lesquels la pyrolyse est une voie de recyclage plus appropriée. A titre d’exemple significatif, au sein de la filière du caoutchouc, la pyrolyse des pneumatiques en fin de vie permet de recouvrer du noir de carbone et de l’huile pyrolyse. Le noir de carbone recyclé peut ensuite être réutilisé dans la fabrication de nouveaux pneus, alors que l’huile de pyrolyse peut être utilisée en substitution de matières premières vierges au travers de divers procédés chimiques.

    En outre, elanova appelle l’attention du législateur sur les disparités entre pays européens, soit dans l’existence ou non de critères, soit dans la compatibilité entres les critères pour un même objet : ces disparités sont un frein considérable à la circularité ; en la matière, le bon échelon réglementaire est l’échelon européen. Nous appelons dès lors les pouvoirs publics à prendre des initiatives pour que le cadre réglementaire européen sur la sortie du statut déchet soit plus harmonisé et à la hauteur de ses ambitions stratégiques pour une économie climatiquement neutre, économe en ressources et sans toxiques.

  •  Commentaire de Neste , le 3 juillet 2023 à 19h45

    La société Neste, acteur du recyclage chimique investissant actuellement dans le développement de nouvelles capacités de valorisation de l’huile de pyrolyse, salue l’initiative française de mettre en place un cadre règlementaire de sortie du statut de déchet pour l’huile de pyrolyse issue d’un procédé de recyclage chimique et espère que ce dernier pourra être dupliqué sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne afin d’en assurer sa pleine opérationnalité.

    Ce projet de règlementation facilitera, en effet, la montée en puissance du recyclage chimique grâce à un cadre clair permettant son intensification.

    La société Neste préconise néanmoins que la réglementation prévoie une révision régulière des exigences de qualité fixées, afin de tenir compte tant des évolutions technologiques que des ambitions de l’industrie, qui vise à élargir la typologie des intrants pouvant être traités pour recevoir une seconde vie à tous les déchets actuellement non recyclables mécaniquement et pour lesquels l’incinération et l’enfouissement constituent les seuls exutoires.

  •  Matériaux composites en fibre de carbone, le 3 juillet 2023 à 15h01

    La nomenclature des déchets utilisée pour définir la liste des intrants autorisés pour la pyrolyse (section 1 de l’annexe 1) ne permet pas de pointer précisément si des déchets de composites en fibre de carbone pourraient en faire partie. Il conviendrait d’exclure explicitement ceux-ci, en les mentionnant au 1.3 de l’annexe 1 :
    <span class="puce">- des solutions de recyclage mécanique ou chimique existent et permettent de réutiliser ce matériau, pour peu qu’elles ne portent que sur ce matériaux, non mélangés à d’autres types de plastiques.
    <span class="puce">- il est important de veiller à une meilleure disponibilité et accessibilité des composites en fibre de carbone recyclés, qui ont vocation à être massivement utilisés pour des équipements concourant à la transition écologique (éolienne, piles à hydrogène, véhicules électriques…)
    L’exclusion formelle des déchets de composites en fibre de carbone permettrait donc d’éviter le risque qu’ils soient par facilité envoyés en mélange dans les exutoires à grande échelle que seront à terme les usines de recyclage chimique.