Projet d’arrêté fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de perturbation intentionnelle et de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans (Phalacrocorax carbo sinensis)
Consultation du 18/10/2024 au 08/11/2024 - 8849 contributions
Introduction
Le grand cormoran a un statut d’espèce protégée au niveau national. Il bénéficie également au niveau européen du régime général de la protection de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er de la Directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 relative à la conservation des oiseaux sauvages. La sous-espèce autorisée à la destruction (Phalacrocorax carbo sinensis) est inféodée aux eaux douces, et son aire de répartition s’était progressivement réduite en raison des tirs importants dont elle faisait l’objet, jusqu’à ce que l’espèce soit protégée dans les années 1970. Depuis lors, le nombre moyen de grands cormorans a augmenté jusqu’à atteindre un niveau relativement stable depuis 2013, oscillant autour de 100 000 individus présents. Toutefois, afin de contrôler l’impact du grand cormoran sur les espèces de poissons protégées dans les cours d’eau et plans d’eau et sur les piscicultures en étang, un système dérogatoire à la protection stricte permet de mener des opérations de destruction si les conditions de la dérogation sont réunies. Ces dérogations ne visent pas à réguler l’espèce mais à réduire la prédation dans des zones déterminées.
L’arrêté ministériel cadre du 26 novembre 2010 fixe ainsi les conditions et limites dans lesquelles les dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées. Il est complété par un arrêté pris tous les 3 ans, qui fixe les quotas départementaux dans les limites desquelles les dérogations peuvent être accordées. Suite à la décision du Conseil d’Etat en date du 8 juillet dernier, annulant l’arrêté du 19 septembre 2022 en tant qu’il ne fixe pas de plafonds départementaux de destruction de grands cormorans en eaux libres pour la période 2022-2025 pour le département du Doubs, et enjoignant aux ministres de prendre un arrêté modificatif fixant des plafonds départementaux de destruction de grands cormorans en eaux libres pour la période 2022-2025, les services de l’Etat ont travaillé avec l’ensemble des acteurs concernés par le grand cormoran pour proposer un nouvel arrêté. L’enjeu est de répondre à l’injonction du Conseil d’Etat, tout en garantissant la conservation de l’espèce et en sécurisant les actes pris en application de l’arrêté ministériel, afin d’éviter les situations de contentieux juridiques.
Par ailleurs, la décision du Conseil d’Etat est intervenue alors que des réflexions étaient en cours avec les représentants des pisciculteurs pour faire évoluer la réglementation relative aux destructions au titre de la protection des piscicultures. Aussi, il a été décidé d’abroger et de remplacer l’arrêté-cadre du 26 novembre 2010, à la fois dans le but d’y définir un seuil pour la fixation des plafonds de destruction sur les cours d’eau et plans d’eau par les préfets (et non plus de le fixer par arrêté triennal), mais aussi d’actualiser la rédaction antérieure sur un certain nombre de points relatifs aux cours d’eau/plans d’eau et aux piscicultures, dont il avait été identifié qu’ils nécessitaient des ajustements.
Principales évolutions de l’arrêté-cadre
La principale proposition de modification de l’arrêté-cadre ministériel concerne la manière de fixer les plafonds de destruction autorisés au titre de la protection des poissons menacés (article 4) : les plafonds seront fixés par les préfets en respectant un seuil défini dans l’arrêté-cadre en fonction du nombre d’oiseaux recensés dans le département. Il est fixé un seuil maximal de 20 % de la population départementale recensée lors du comptage national autorisés à la destruction sur cours d’eau et plans d’eau. Ce chiffre correspond, rapporté en pourcentage, à la somme des plafonds départementaux fixés jusqu’en 2022 sur les eaux libres par rapport au nombre de grands cormorans recensés sur l’ensemble du territoire lors du comptage national. Outre la définition d’un seuil maximal dans l’arrêté-cadre, cette solution est sécurisée par le fait que l’article 1 soit modifié : ce ne sont plus seulement les "risques présentés par la prédation du grand cormoran" mais les "dommages liés à la prédation" "à la condition que des impacts significatifs soient avérés", notamment par la production d’études/d’expertises/de rapports, qui justifient les tirs dérogatoires. Par ailleurs, sur le fond, que les plafonds soient ou non fixés dans un arrêté triennal, il revient dans tous les cas aux préfets de prendre des arrêtés, selon la réalité de la prédation sur leurs territoires, afin d’accorder des dérogations.
Il est également proposé, à des fins de simplification administrative, d’étendre de droit la période de destruction jusqu’au 30 avril (actuellement cette période s’achève le dernier jour de février) et de conserver des possibilités d’interventions complémentaires au-delà sur justification (modification de l’ancien article 13 en conséquence) - le tout, pour les piscicultures uniquement. En effet, les possibilités complémentaires de destruction, couvrant les mêmes périodes, étaient déjà prévues dans la version initiale de l’arrêté.
Par ailleurs, les opérations d’effarouchement du grand cormoran sont souvent les mesures alternatives mises en place préalablement aux destructions. Afin d’améliorer l’encadrement réglementaire de ces opérations qui constituent une perturbation intentionnelle d’une espèce protégée, un article définissant les modalités d’exécution des opérations d’effarouchement a été ajouté (article 8). Il permet à tout bénéficiaire de dérogation à l’interdiction de destruction de réaliser en complément des opérations d’effarouchement. Il s’agit à la fois d’une simplification administrative et d’une sécurisation juridique de cette pratique. Seuls les effarouchements sonores et visuels, aux mêmes périodes et sur les mêmes lieux que les tirs, sont autorisés.
Enfin, afin d’améliorer le suivi des destructions de grand cormoran et de le simplifier, il est ajouté un délai de transmission des comptes-rendus des opérations aux préfets (dans les 24 heures suivant les destructions).
Contenu du texte
Le projet d’arrêté ministériel modifie l’arrêté en vigueur selon les éléments figurant ci-dessous :
L’article 1er précise l’objet de l’arrêté : y sont désormais mentionnés les effarouchements, puisqu’un article y est consacré dans l’arrêté modifié (article 8). En complément des dispositions portant sur les conditions et limites dans lesquelles les opérations de destruction peuvent être menées, l’ajout d’un article relatif aux opérations d’effarouchement a pour objectif d’encadrer cette perturbation intentionnelle d’espèce protégée au niveau national afin d’harmoniser les pratiques et de les sécuriser juridiquement.
L’article est également modifié ainsi : les opérations de destructions ne seront plus autorisées sur les cours d’eau et plans d’eau qu’en cas de dommages liés à la prédation, et à condition qu’un impact significatif soit avéré sur les espèces piscicoles protégées (et non plus uniquement en cas de risque). Cette modification est notamment liée aux nombreuses décisions juridiques ayant annulé des arrêtés préfectoraux autorisant des destructions sur les eaux libres, et qui faisaient mention d’absence d’impact avéré justifiant les dérogations.
L’article 2 définit les territoires d’intervention. Les zones dans lesquelles sont menées les opérations de destruction au titre de la protection des espèces piscicoles sont ici précisées (cours d’eau, plans d’eau connectés aux cours d’eau et canaux).
L’article 3 distingue désormais les périodes de destruction au titre de la protection des piscicultures et au titre de la protection des espèces piscicoles. Dans le projet d’arrêté, pour les piscicultures, la période s’étend de droit jusqu’au dernier jour d’avril. La période reste inchangée pour les cours d’eau et plans d’eau. Il est précisé que les effarouchements peuvent être réalisés durant les mêmes périodes que les tirs de destruction.
A l’article 4 est effectué un ajustement rédactionnel, le terme « quotas » étant remplacé par « plafonds », afin de mieux signifier que le nombre de grands cormorans autorisés à la destruction est un maximum et non un objectif à atteindre (cette modification avait déjà été opérée lors de l’élaboration de l’arrêté triennal 2022/2025). L’arrêté-cadre fixe le seuil au-delà duquel les destructions seront interdites : 20 % de la population estimée dans le département lors du dernier recensement national. Ainsi, il ne sera plus nécessaire de fixer un plafond de destruction par département sur les eaux libres dans l’arrêté triennal.
Un transfert inter-annuel de reliquat de plafond est proposé pour les seules piscicultures dans la limite de 20 % du plafond annuel autorisé en pisciculture.
L’article 5 définit les piscicultures en étang et reste inchangé par rapport à l’arrêté-cadre de 2010.
L’article 6 précise les bénéficiaires des dérogations à l’interdiction de destruction accordées pour prévenir des dégâts aux piscicultures : les exploitants, leurs ayants-droit et toutes personnes qu’ils délèguent titulaires d’un permis de chasser valable pour l’année en cours. Y figure uniquement un ajustement rédactionnel.
L’article 7 traite de l’organisation des opérations de destruction sur les cours d’eau et plans d’eau. Cet article est simplifié et prévoit que les personnes autorisées veillent à la cohérence des opérations prévues, si besoin avec l’appui technique d’agents assermentés. Il précise quelles personnes peuvent être mandatées par les agents assermentés pour procéder aux tirs.
L’article 8 est un nouvel article encadrant les opérations d’effarouchement. Il permet à tout bénéficiaire de dérogation à l’interdiction de destruction de réaliser en complément des opérations d’effarouchement. Seuls les effarouchements sonores et visuels, aux mêmes périodes et sur les mêmes lieux que les tirs, sont autorisés. Une mention précise la nécessité de prendre toutes les précautions pour éviter la perturbation des espèces à proximité des opérations et pour ne pas compromettre l’état de conservation des espèces protégées. En raison de l’ajout de ce nouvel article, la numérotation des articles suivants est décalée d’un rang par rapport au texte de 2010.
L’article 9 (ancien article 8) encadre les opérations de tir. Il prévoit que les destructions peuvent être réalisées uniquement en journée et jusqu’à 100 mètres des cours d’eau et plans d’eau. Il est indiqué que des précautions doivent être prises afin de ne pas perturber les espèces qui nichent à proximité des zones de tirs ni compromettre l’état de conservation des espèces protégées. Auparavant ce paragraphe figurait à l’article 13, toutefois l’allongement de la période de destruction en pisciculture a nécessité d’intégrer cette mention pour les opérations générales et plus uniquement pour les mesures complémentaires (cf infra).
L’article 10 (ancien article 9) prévoit la suspension des opérations une semaine avant le dénombrement des oiseaux d’eau chaque année. Il est précisé que ces comptages sont organisés en janvier.
L’article 11 (ancien article 10) précise que les destructions doivent s’effectuer selon les règles de la police de la chasse, notamment s’agissant de l’interdiction de la grenaille de plomb. Deux mentions sont ajoutées : l’interdiction d’utiliser le plomb s’étend sur un périmètre de 100 mètres autour des zones humides – les destructions peuvent s’effectuer par armes rayées lorsque les oiseaux sont posés au sol et immobiles, de manière à garantir un tir fichant.
L’article 12 (ancien article 11) est modifié pour préciser que les bagues récupérées sur les oiseaux morts doivent être envoyées Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d’Oiseaux.
L’article 13 (ancien article 12) traite des comptes-rendus des opérations. Il est complété afin d’y inclure un délai de transmission de ces comptes-rendus d’opérations de destruction au préfet (24 heures suivant les destructions). L’objectif est ainsi d’améliorer le suivi des tirs.
L’article 14 (ancien article 13) prévoit des possibilités complémentaires d’intervention sur les piscicultures (avant et après la période de destruction). Est supprimé le paragraphe qui prévoyait des interventions complémentaires jusqu’au 30 avril puisqu’en pisciculture la période de destruction s’est vue élargie par l’article 3. Le dernier paragraphe relatif aux précautions à prendre est déplacé à l’article 9 puisqu’il s’applique à la fois pour les opérations générales et les opérations complémentaires (cf supra).
L’article 15 (ancien article 14) permet que des opérations exceptionnelles puissent être menées à tout moment de l’année par des agents assermentés, à la fois sur les piscicultures et sur les cours d’eau/plans d’eau en cas d’impacts particulièrement importants. La rédaction est ajustée pour que la terminologie employée dans l’ensemble du texte soit harmonisée.
L’article 16 (ancien article 15) concerne les opérations exceptionnelles de destruction des nids et des œufs. Il est conservé dans sa rédaction initiale, mais une mention visant à éviter la perturbation des autres espèces est ajoutée. Ainsi, les interventions ne peuvent s’effectuer que sur les colonies non mixtes.
L’article 17 (ancien article 16) concerne les bilans des opérations. Les dates de transmission des bilans par les préfets aux ministres sont ajustées pour mieux correspondre aux périodes de destruction.
L’article 18 abroge l’arrêté du 26 novembre 2010, ce projet d’arrêté ayant vocation à le remplacer.
L’article 19 (ancien article 17) est l’article d’exécution. Il est actualisé suite aux modifications des périmètres des ministères et à la création de l’Office français de la biodiversité.
Consultations obligatoires :
• Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) a été consulté le 16 octobre 2024 et s’est prononcé défavorablement.
Lien vers le site : https://www.avis-biodiversite.developpement-durable.gouv.fr/08-octobre-2024-avis-cnpn-plenier-a432.html
• La consultation du public est ouverte du 18 octobre au 8 novembre inclus. En application du dernier alinéa du II. de l’article L.123-19-1 du code de l’environnement, les observations du public pour cette consultation sont rendues accessibles au fur et à mesure de leur réception.
Pièces jointes :
- le projet d’arrêté fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de perturbation intentionnelle et de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans (Phalacrocorax carbo sinensis) ;
- L’arrêté du 26 novembre 2010 (en vigueur) fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans (Phalacrocorax carbo sinensis) ;
- L’arrêté du 19 septembre 2022 fixant les plafonds départementaux dans les limites desquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans (Phalacrocorax carbo sinensis) pour la période 2022-2025 ;
- la décision du Conseil d’Etat en date du 8 juillet 2024 enjoignant au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de prendre un arrêté modificatif fixant des plafonds départementaux de destruction de grands cormorans en eaux libres pour la période 2022-2025.
Commentaires
Beaucoup trop présent sur certain secteurs que je connais très très bien de longue dates et bien évidemment où la population piscicole décroît fortement et d’ici 2 ou 3 ans ils partirons, enfin ne reviendrons plus car il n’y auras plus grand chose à avaler…
Mais trouverons un autres secteur et bis repetita…
Un problème connu reconnu et constaté par beaucoup de personnes présente très régulièrement sur différents plan d’eau…
Un passionné raisonné.
La lecture du projet d’arrêté montre une fois de plus le mépris envers la filière piscicole.
La pêche de loisir semble avoir été écoutée ; nous nous en réjouissons car ce sont des partenaires de nos milieux naturels et quelques avancées les concernant nous impactent positivement.
Lors des échanges préalables à la révision de l’arrêté, L’AFPPE (Association Française des Pisciculteurs Professionnels en Etangs) et Etangs de France ont travaillé sur un document au service du Ministère de la transition écologique en charge de ce sujet. Tous ces points ont été évoqués lors de nos échanges en présentiel.
3 points évoqués
1-Le classement de l’espèce cormoran. Certes, il relève de dispositifs Européens, vous n’êtes pas sans savoir que la France devient la risée de nos partenaires sur le traitement ubuesque de l’application des directives.
2-Le processus indemnitaire : le point de rupture est atteint depuis longtemps au point que nos structures nationales ne peuvent plus entretenir un calme nécessaire à une réflexion saine avec vos services. Vouloir transmettre la responsabilité de la décision et de la mise en œuvre sur les fonds FEAMPA est une injure. Ces fonds sont fléchés pour un développement constructif de la filière piscicole. Ils ne sont pas dotés pour entretenir une espèce qui n’a plus aucun critère justifiant une protection.
3-La révision de l’arrêté du 26/11/2010 :
C’est le sujet de l’actualité.
Nous avons participé activement aux échanges. Nous notons quelques décisions qui font enfin preuve de réflexion objective envers les eaux libres donc la pêche de loisir.
Nous notons surtout des aberrations qui illustrent le mépris ou l’ignorance des effets d’une législation sur une filière extensive et aux aménités environnementales reconnues. C’est une euthanasie de la filière qui est perpétrée.
Voici donc les points que nous avions présentés comme étant incontournables
Le volatil incriminé n’est pas compétent pour respecter les limites administratives. Les plafonds départementaux ne sont majoritairement pas atteints, pendant que le département limitrophe continu d’être prédaté. Alors une fongibilité inter départementale est le minimum intelligible, c’est d’ailleurs une des raisons qui nous a amenés à suggérer un préfet coordonnateur.
Départements littoraux ; sont-ils toujours l’objet d’interdiction ? Les départements tels que 35, 59 et 62 ont une telle géographie que l’interdiction totale est une hérésie. L’éthologie de ces 2 sous espèces plébiscite une limite de l’ordre de 15 km des côtes.
Concours de l’OFB : Qui de mieux que l’OFB pour prendre en charge le comptage estimatif de ce volatil ? Cette estimation est le résultat d’un appel d’offre restreint donné à un « spécialiste » qui lui-même avoue ne disposer de plus assez de compteurs et avoue lors de la même réunion n’avoir trouvé aucun ornithologiste pour l’accompagner.
Durée d’ouverture de la dérogation : Le comportement du volatil a considérablement évolué, une proportion inquiétante et croissante se sédentarise. Le prélèvement est indispensable sur les veilleurs qui restent tout l’été et indiquent à leurs congénères les étangs bien pourvus. La consommation estivale se traduit par un multiple de 2 minimum à la pêche.
Simplification administrative : Elle concerne en premier lieu les services de l’état notamment territoriaux ! De notre côté il est insoutenable d’être anéantis par ces oiseaux et de devoir justifier de mesures de défenses légitimes.
Ces points ont donc été délibérément ignorés ou à peine traités.
Enfin, il est fait allusion à un avis défavorable du CNPN, si il est évident que cette commission fasse allégeance à son président, elle se doit d’argumenter son avis et celui-ci se doit d’être public.
A ce jour, nous n’avons aucune certitude de l’existence de cet avis.
Nous vous transmettons le mark up de ce projet. Nous vous confirmons qu’il est inacceptable en l’état même après les quelques ajustements mineurs proposés.
En préambule, nous réfutons quelques termes employés à plusieurs reprises.
- Perturbations intentionnelles : Quelle est la consistance juridique d’un tel terme ? Vos services juridiques souhaitent perdurer et alimenter les tribunaux administratifs pour laisser passer cette terminologie. Nous comprenons aisément qui est à l’origine de ce genre d’exigence rédactionnelle mais vous en endossez la responsabilité.
D’autres part, s’agissant des propriétés privées, ce n’est évidemment pas recevable.
- Il en est de même avec l’emploi du terme : dégâts enregistrés. Nous ne pouvons supporter d’être soumis à la mort pour justifier que nous étions vivants. Nous pensions que le principe de précaution s’appliquait aussi en matière environnementale. Donc le seul risque suffit pour prémunir les piscicultures. Nous assurons déjà et sans aucune aides la protection, la surveillance et l’effarouchement.
Il est évoqué le seuil de 20% en eaux libres ; soit l’objectif d’avant 2022.
Pour les étangs piscicoles, nous demandons aussi le retour au plafond de 2022.
La notion de seuil en pourcentage n’aide en rien à une régulation. L’arithmétique est simple à comprendre.
Il est annoncé que la population est stable depuis 2013 !!! Autour de 100 000 !!! Il y a déjà un problème de fiabilité du comptage mais en plus la retranscription arrondie les comptes aux centaines de mille par défaut, c’est une collusion. La stabilité est toute relative, c’est une croissance plus faible que la croissance exponentielle vécue préalablement.
En conclusion, nous vous demandons de toute urgence de réunir le groupe cormoran ou d’intégrer nos demandes mentionnées. Nous vous demandons aussi un entretien pour échanger sur le sujet prédation plus largement que le seul prélèvement. Consacrer 80% de l’énergie à un ersatz de solution nous semble indigne d’un ministère de notre République
Dans ce contexte, la Filière Etangs tient à souligner les quelques demandes formulées qui sont des demandes incontournables. Aucune concession ne peut être faite sur ces points, qui sont essentiels pour garantir la survie de la pisciculture face à des pertes économiques considérables dues aux dégâts causés par les cormorans.
Nous souhaitons hiérarchiser nos demandes comme suit :
1. Extension de la durée des tirs sur l’ensemble de l’année. La durée de régulation par les tirs, telle qu’elle est proposée dans le Projet d’arrêté, est non seulement insuffisante mais met directement en danger l’existence des exploitations piscicoles. Nous insistons sur la nécessité d’élargir la période de tir à toute l’année pour garantir une gestion durable des populations de cormorans et protéger les exploitations piscicoles. Une période de tir restreinte ne permet pas de réguler efficacement les populations de cormorans, qui peuvent occasionner des dégâts importants à différentes périodes de l’année.
2. Simplification administrative des demandes de tirs. L’actuelle procédure administrative de demande de tirs est extrêmement lourde pour les pisciculteurs dès lors qu’elle exige chaque opération de tir est suivi d’un compte rendu transmis au préfet « dans un délai d’au plus 24 heures suivant la première destruction ». Nous appelons à une simplification des démarches administratives afin de permettre une mise en œuvre rapide et efficace des tirs, dans le respect des règles en vigueur. Des formalités administratives légères seraient un gage de réactivité et d’efficacité dans la gestion des dégâts causés par les cormorans.
3. Suppression des références aux perturbations intentionnelles. Nous demandons également la suppression des références aux "perturbations intentionnelles" concernant le cormoran dans le Projet d’arrêté. Cette référence n’est ni pertinente ni appropriée pour une gestion efficace des populations de cormorans. La philosophie de ce texte doit porter exclusivement sur les modalités de régulation et de destruction du cormoran, et non sur des comportements qualifiés de perturbateurs.
4. Fongibilité intra-régionale des quotas de tirs et possibilité de tirs sur le littoral. Le Projet d’arrêté se limite à entrevoir la possibilité pour un préfet d’un département de transférer le solde du quota non atteint en fin de campagne dans le cadre de la prochaine campagne et « dans la limite de 20 % du nombre d’individus autorisés annuellement par l’arrêté ministériel triennal ». Nous réitérons la nécessité de prendre en compte de la fongibilité inter-départementale des quotas de tirs qui permettrait au préfet d’un département dont le quota serait atteint en fin de campagne de demander aux départements limitrophes le transfert de tout ou partie de leurs quotas non atteints. De même, la Filière Etang sollicite également la possibilité d’effectuer des tirs sur les zones littorales au-delà d’un périmètre de 15 à 20 kilomètres, car ces zones sont souvent très impactées par les cormorans, notamment lors de leurs déplacements migratoires. La régulation doit être adaptée aux différents territoires pour être véritablement efficace. Cela n’impactera pas la sous espèce carbo carbo qui est au contraire supplantée par son cousin synensis sur ces zones.
En dépit de ces ajustements indispensables pour parvenir à un arrêté équilibré, nous soulignons que ces propositions ne répondent pas à l’urgence de la situation vécue par les pisciculteurs.
Plus que jamais, les autorités nationales doivent se saisir de la question d’un régime indemnitaire adéquat, comme cela avait été envisagé par l’ancien ministre de l’Agriculture, Michel Barnier, dans un courrier du 22 mai 2008. Depuis 16 ans, aucun progrès substantiel n’a été réalisé en matière d’indemnisation des pertes dues aux dégâts causés par les cormorans. La mise en place d’un fonds d’indemnisation, comme l’avait proposé M. Barnier, serait un levier essentiel pour soutenir la filière et garantir sa pérennité face à ces pertes importantes.
Nous restons à la disposition des autorités compétentes pour toute discussion visant à améliorer ce cadre réglementaire et espérons une prise en compte rapide de ces observations.
Telles sont les quelques observations de la Filière Etang qui sont dans l’attente de réponses urgentes et concrètes en faveur de la profession piscicole.
Nous vous remercions pour votre attention et votre compréhension.