Projet d’arrêté portant expérimentation de diverses dispositions en matière de dérogations aux interdictions de destruction pouvant être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus)

Consultation du 04/12/2019 au 25/12/2019 - 8870 contributions

Le loup est une espèce « strictement protégée », inscrite à l’annexe II de la Convention de Berne et aux annexes II et IV la Directive 92/43/CEE dite « Habitats, Faune, Flore ». Toutefois, des dérogations à la protection sont prévues par ces textes pour prévenir les dommages importants aux troupeaux domestiques, à condition qu’il n’existe pas d’autres solutions satisfaisantes et que les opérations ne nuisent pas au maintien du bon état de conservation de la population de loups.

L’augmentation constante de la prédation, en lien avec l’augmentation de la population lupine et de son aire de répartition, a conduit à mettre en place depuis plusieurs années une politique d’intervention sur la population de loups, pour renforcer la protection des troupeaux lorsque les autres mesures de protection ne suffisent pas à contenir la prédation. Cette politique est intégrée dans le Plan national d’actions (PNA) « loup et activités d’élevage » adopté en février 2018.

Le cadre réglementaire actuel de cette politique est constitué de l’arrêté cadre du 19 février 2018fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup. Cet arrêté « cadre » est complété par un arrêté « plafond », fixant la formule par laquelle le Préfet coordonnateur détermine le nombre maximum de loups pouvant être détruits chaque année.

Le seuil de viabilité démographique du loup, que le PNA « loup et activités d’élevage » a reconnu comme étant de 500 individus, a été atteint en 2019. Dès lors, des propositions de modification du protocole d’intervention sur la population de loup ont été formulées, visant notamment à intervenir plus efficacement sur les « foyers d’attaque » où les troupeaux subissent plus de 15 attaques par an depuis plusieurs années, malgré la mise en place des mesures de protection.

L’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) ont été sollicités pour étudier l’impact d’une hausse du prélèvement des spécimens de loup, en prenant pour base l’expertise collective scientifique réalisée en 2016. Leur avis, rendu début février 2019, indique que la croissance démographique constatée en 2017 et 2018 autorise une augmentation des prélèvements et préconise de tenir davantage compte du nombre d’attaques que de loups. Le Conseil scientifique Loup a examiné la robustesse scientifique de cet avis et a donné un avis favorable.

Une première expérimentation a été menée en 2019. Toutefois, la publication tardive du texte (26 juillet) n’a pas permis de déployer le dispositif avant la montée en estive des troupeaux et les demandes d’autorisation de tir. Les éléments disponibles sur la dynamique de la population de loup semblent indiquer, par ailleurs, qu’en 2019, elle serait restée favorable. Un bilan détaillé de l’expérimentation est en cours.

Le texte présenté propose de reconduire l’expérimentation sur toute l’année 2020 afin de pouvoir juger le dispositif sur son ensemble, notamment son impact sur la baisse de prédation en foyers d’attaque, la pertinence du nouveau type de tir et la répartition des tirs sur l’année.

Les cercles 0 ont été inscrits dans l’arrêté relatif à la protection des troupeaux publié le 4 décembre 2019, permettant ainsi un renforcement des mesures de protection dans les foyers de prédation.

L’application sera susceptible d’être revue et adaptée si nécessaire, sur la base notamment de l’évaluation de la dynamique et du niveau de population dont les résultats seront publiés en juin 2020. Le préfet coordonnateur est chargé de mettre en place des mesures de gestion des tirs, notamment afin de contenir le nombre de loups tués avant la montée en estive, tout en veillant à la protection des troupeaux (avec une adaptation fine des opérations de tirs en fonction de la pression de prédation).

Contenu des textes

Le projet d’arrêté soumis à consultation reprend les dispositions de l’arrêté du 26 juillet 2019 pour adapter certaines dispositions de l’arrêté « cadre » et de l’arrêté « plafond », pour une durée limitée à l’année 2020, à titre expérimental. L’évaluation de l’efficacité de cette expérimentation sera confiée au préfet coordonnateur du PNA.

1°) Les adaptations de l’arrêté « cadre » sont pour rappel les suivantes :
- En cohérence avec le droit de défense permanent des troupeaux, seuls les arrêtés préfectoraux ordonnant des tirs de prélèvements simples ou renforcés sont suspendus automatiquement pendant vingt-quatre heures après chaque destruction ou blessure de loup quand le plafond minoré de 4 spécimens est atteint (article 2).

- Un cercle zéro est créé (article 3 point I) pour les communes qui ont fait l’objet d’un nombre d’attaques supérieur ou égal à 15 par an en moyenne sur la période 2016-2018. Le préfet coordonnateur est chargé d’établir par arrêté la liste de ces communes.

- Une nouvelle catégorie de tirs de défense, dits « de défense mixte » est proposée en cercle 0 et dans les zones difficilement protégeables situées dans certains fronts de colonisation (article 3, point IV). Ce tir pourra comprendre jusqu’à 3 tireurs.

- Une fois atteint le plafond, l’utilisation de dispositifs de repérage utilisant la technologie d’amplification de lumière ou la détection thermique sera réservée au cercle 0 et les zones difficilement protégeables (article 3, point II).

- Les opérations de tirs de défense renforcée sont définies après avis technique de l’Office français de la biodiversité (OFB) ou d’un lieutenant de louveterie et non plus en présence de ces agents (article 3, point III).

- Les tirs de prélèvements simples seront réalisables dès le 1er juillet dans les cercles 0 et dans les zones difficilement protégeables (article 4). Ils pourront aussi être utilisés dès juillet dans les communes en cercle 1 si certaines conditions sont réunies.

- Pour les tirs de prélèvement, les dispositifs de repérage utilisant la technologie d’amplification de lumière ou la détection thermique pourront être utilisés par les chasseurs habilités en l’absence d’un lieutenant de louveterie ou d’un agent de l’OFB (article 4 point III).

2°) L’expérimentation sur le projet d’arrêté « plafond » qui définit la modalité de calcul du nombre de loups qui pourront être abattus, repose sur une augmentation du taux de prélèvement, porté à 17% pour 2020, au lieu de 10 % (article 5 point I).

Si le plafond ainsi déterminé était atteint avant le 31 décembre 2020, la possibilité d’aller jusqu’à un taux de 19 % est ouverte, afin de permettre la protection continue des troupeaux, en utilisant des tirs de défense (simple, mixte ou renforcée) ainsi que des tirs de prélèvement simple dans le cercle 0, dans les zones difficilement protégeables et les communes de cercle 1 présentant les caractéristiques exposés au paragraphe précédent.

Consultation obligatoire :

- Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) sera consulté le 18 décembre 2019.

- La consultation du public est ouverte du 4 au 25 décembre 2019.

En application du dernier alinéa du II. de l’article L.123-19-1 du code de l’environnement, les observations du public pour cette consultation sont rendues accessibles au fur et à mesure de leur réception. Les échanges font l’objet d’une modération a priori, conformément à la Charte des débats.

Partager la page

Commentaires

  •  Traiter les conséquences sans regarder les causes, le 5 décembre 2019 à 14h23

    Comme dit dans les autres commentaires, le loup est une espèce protégée, qui était présente de manière beaucoup plus développée en France il y a quelques dizaines d’années.
    D’autres pays, comme l’Italie par exemple, ont toujours eu une population de loup dense, et pourtant il y a de l’élevage également… Les deux peuvent cohabiter !

    Il faut simplement regarder le "pourquoi". Pourquoi les loups attaquent autant les troupeaux? Les ovins / caprins sont des proies faciles pour eux car concentrés dans un endroit et pas forcément gardés au mieux. Les proies des loups sont généralement forestières, cependant si ces proies sont chassées par l’Homme pour son propre loisir… Il n’a plus assez de nourriture sauvage à chasser lui même, ou bien les bêtes plus simples à chasser, blessées ou autre, ne sont plus présentes dans l’environnement.
    Il faudrait peut être donc penser à restaurer la relation naturelle proie-prédateur au lieu de toujours essayer d’imposer l’Homme comme espèce indispensable à la régulation. De ce fait, les loups auraient peut être assez de proies dans la nature avant de s’attaquer aux troupeaux.

    Et l’idéal serait d’avoir un budget assez conséquent au niveau agricole, et surtout de placer les aides au bon endroit, pour que chaque berger puisse avoir plusieurs chiens de troupeaux pour les aider à protéger leurs animaux. Il faut également financer leur dressage, et les frais que cela engendre, pour une filière qui est déjà fragilisée et qui n’a pas forcément les moyens des filières aidées actuellement par le premier pilier de la PAC…

  •  Strictement défavorable, le 5 décembre 2019 à 14h19

    Alors que la biodiversité s’effondre comment peut on imaginer que tuer une espèce protéger va résoudre des problèmes. Sérieusement, l’homme peut vivre sans manger de viande, mais pas sans la biodiversité animale. Le loup est une espèce qui a sa place dans le cycle de la vie et sa régulation, plus que les éleveurs et les chasseurs qui ne font que creuser une empreinte écologique sur notre planète. Alors STOP, le loup est une espèce protégée et doit le rester. Je dis NON au Projet d’arrêté portant expérimentation de diverses dispositions en matière de dérogations aux interdictions de destruction pouvant être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus)

  •  un mépris de la recherche et des connaissances scientifiques , le 5 décembre 2019 à 14h16

    Malgré les progrès réglementaires des statuts juridiques de la plupart des animaux sauvages, malgré une opinion publique globalement favorable à ces espèces, des acteurs des territoires, surtout ruraux, exercent sur les élus et les préfets une influence disproportionnée par rapport à leur poids effectif dans la société. Représentants agricoles, professionnels du tourisme ou chasseurs permettent des accommodations des lois environnementales quand ils ne les vident pas de leur substance. Les préfets avec les services de l’État, dont certains sont rattachés aux administrations environnementales, se retrouvent à exercer une violence dont l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) est le bras armé.Pour le loup, les requins, le blaireau, l’ibis sacré… entre autres, cela va de l’élimination contenue (à l’efficacité non prouvée) pour le loup à des massacres totalement inutiles et contre-productifs comme pour les requins ou les ibis sacrés tirés à tour de bras par l’ONCFS. Ainsi, d’importants fonds publics sont mis en œuvre, en finançant une brigade d’élimination des 40 loups à tuer sur les 360 estimés en France (en 2017), alors qu’il n’existe aucune corrélation entre tirs de loups et baisse de la prédation. Au contraire, alors que l’on n’a jamais tué autant de spécimens de cette espèce « protégée », les attaques du canidé ne cessent de croître.Ces gestions par la tuerie s’appuient aussi sur une négligence voire un mépris de la recherche et des connaissances scientifiques.

  •  Avis défavorable, le 5 décembre 2019 à 14h04

    A l’heure d’un effondrement drastique de notre biodiversité, (nous connaissons la sixième extinction massive du vivant), cette décision paraît difficile à comprendre.
    Nous savons parfaitement que le loup constitue une espèce clé de voute d’un point de vue écologique, en tant que grand prédateur et permet une résilience de nos écosystèmes.
    Les nombreuses expériences de rewilding ou la réintroduction du loup au parc de Yellowstone, atteste de ce rôle particulier et du retour de la biodiversité en sa présence.
    Arrêtons de vouloir réguler et lutter contre la nature. La nature sait se réguler toute seule.
    Au lieu d’investir dans des tirs de régulation, dont l’efficacité n’est pas prouvée scientifiquement (éclatement des meutes, dispersion des individus encore plus grandes, attaques renforcées car déstabilisation des meutes ou perte des loups alpha…), mieux vaudrait investir dans des fonds pour équiper les bergers de chiens de troupeaux, clôtures électriques, etc…

  •  Avis défavorable : Les montagnes n’appartiennent pas aux éleveurs, le 5 décembre 2019 à 13h31

    Quand comprendrons nous que l’élevage montagnard n’est pas compétitif et ne doit sa survie qu’aux subventions? Acceptons notre sort de montagnard et mettons en avant l’entretien des paysages, le tourisme plutôt qu’une pseudo compétitivité agricole illusoire. Le loups est un meilleur atout pour le tourisme montagnard que l’élevage.

  •  AVIS favorable avec reserve, le 5 décembre 2019 à 11h44

    Bonjour,

    Réserve car effectivement le loup est une espèce protégée.
    Mais comment aider les éleveurs ? Essayons …
    Le loup va s’étendre et va apparaitre certainement ailleurs (foret proche des villes par exemple ) et j’aimerai savoir comment chacun réagira quand un loup sera découvert près de chez lui (cas en Europe).
    Je tiens à rappeler que si les éleveurs disparaissent , c’est toute une biodiversité pourtant si mise en avant que sera condamnée (pâturages prairies …) et cela certains l’oublient un peu vite : en quoi un oiseau, une fleur, un insecte est il moins important ? Les gestionnaires de parc nationaux le savent bien …
    Je ne suis pas sur qu’il existe une cohabitation sereine possible mais plutôt un choix à faire .

  •  Avis défavorable, le 5 décembre 2019 à 11h09

    La France reste le vilain petit canard concernant la protection du loup …… Les bergers doivent redevenir bergers, rester avec leur troupeau. Sans quoi ils sont éleveurs.

    Le loup ne doit plus être craint mais intégré dans la réalité économique de la filière. La volonté de le réintroduire en France n’a aucun sens si un accompagnement n’est pas fait socialement pour l’accepter. Travailler a sa réintroduction d’une part et sa destruction d’autre part n’a AUCUN SENS.

    Pour terminer, le loup est une espèce « strictement protégée », inscrite à l’annexe II de la Convention de Berne et aux annexes II et IV la Directive 92/43/CEE dite « Habitats, Faune, Flore ». Ca dit tout.

  •  STOP ! , le 5 décembre 2019 à 10h31

    Comme souligné, le loup est une espèce strictement protégée par la convention de Berne, aux annexes II et IV de la directive Habitats. Dans le texte est souligné que l’absence d’autres solutions satisfaisantes et le maintien dans un bon état de conservation des populations doivent être assurés. On peut douter que l’absence d’autres solutions satisfaisantes soit justifiée, car au vu des éléments vus sur un certain nombre de supports, l’ensemble des moyens de protection sont rarement mis en oeuvre avant de décider l’autorisation de tirs.
    Vous oubliez une des conditions qu’est la raison impérative d’intérêt public majeur. Certains projets d’aménagement comme des carrières ne sont pas autorisées car les raisons impératives d’intérêt public majeur ne sont pas justifiées, que ce soit pour l’approvisionnement en matériaux nécessaire à fournir la filière construction ou pour le maintien d’emplois.
    Qu’en est-il de la filière ovine ? Le problème du loup est-il le réel problème de la filière ? La filière est-elle prête à s’adapter ? A réduire la taille se des troupeaux ? à la mise en place de réels moyens de protection ? à ne pas laisser ses troupeaux sans berger ?
    Si les prédations continuent après la mise en place de toutes ces initiatives, on pourrait alors autoriser des tirs sur les individus attaquant les troupeaux et non sur l’ensemble des individus.
    Qu’en est-il du respect du respect de la période de reproduction de l’espèce ? On autorise à chasser des individus en période de reproduction, pouvant mener au tir d’une mère élevant ses jeunes. Si on tire la mère, on condamne l’ensemble des jeunes. Ces tirs mènent donc à des pertes supplémentaires, qui ne sont pas décomptées du pourcentage de la population autorisée à être détruite.

    D’après l’étude du nombre de cas de prédation, FERUS a montré que malgré l’augmentation du nombre de loups tués, la prédation ne diminue pas. Les tirs seraient donc inutiles. Il faudrait donc chercher une autre solution.

    L’arrêté permettrait de faire effectuer des tirs par des personnes non affiliées à l’ONCFS (OFB) ou lieutenants de louveterie. Ces agents assermentés sont les seuls à pouvoir réaliser ces tirs aujourd’hui dans une période où les cas de braconnage sont toujours plus importants.

    Quant au quota proposé de 17%, voire 19% de destruction de la population, parce que l’on parle bien de destruction d’individus (terme juridique de l’article L.411-2 du CE), il est bien entendu trop élevé puisque les résultats des destructions des années précédentes ont démontré leur inefficacité pour faire diminuer le nombre d’attaques.

    Je donne donc un avis DEFAVORABLE à ce projet d’arrêté.

  •  Dérogations à la protection d’une espère protégée, en l’occurrence le loup, le 4 décembre 2019 à 19h00

    Le loup est une espèce « strictement protégée », inscrite à l’annexe II de la Convention de Berne et aux annexes II et IV la Directive 92/43/CEE dite « Habitats, Faune, Flore ». Qu’est-ce-que c’est que vous ne comprenez pas dans ce texte ??? Et surtout ne venez pas dire que toutes les mesures ont été prises pour protéger les troupeaux, ce n’est tout simplement pas vrai. Il existe des solutions satisfaisantes dans d’autres pays, pourquoi pas en France ? Parce qu’il n’y a aucune volonté politique de protéger le loup et toutes les raisons de complaire aux éleveurs et aux chasseurs…

Sur le même thème